Regard sur les élections... Avec Jean-Pierre Técher

Apporter la clarification aux citoyens

20 février 2008, par Manuel Marchal

Pour Jean-Pierre Técher, militant associatif au Collectif de lutte contre l’exclusion (CLE), la campagne des Municipales et des Cantonales doit être l’occasion d’une clarification. Les candidats doivent se positionner sur les questions essentielles. Et les électeurs doivent avoir la possibilité d’être informés clairement sur les choix de chaque prétendant aux responsabilités sur les problèmes qui touchent notamment à la vie quotidienne des Réunionnais.

À moins de 3 semaines du scrutin, Jean-Pierre Técher note que la campagne électorale n’est pas axée sur un certain nombre de thèmes forts. Ces derniers sont par exemple le décret destiné à contrôler le train de vie des allocataires du RMI, le pouvoir d’achat, les perspectives pour la jeunesse et l’impact du résultat des élections sur la politique menée par le gouvernement.
« Sur le décret visant à contrôler le train de vie des allocataires de prestations sociales, je n’ai pas encore vu ou entendu grand-chose sur ce thème », déplore le militant du Collectif de lutte contre l’exclusion. Car derrière la volonté de lutter contre la fraude, se cache probablement celle de faire diminuer le nombre des allocataires. Les mesures déjà prises sous les mêmes prétextes à l’ANPE et à l’ASSEDIC ont en effet débouché massivement sur des radiations injustes de travailleurs privés d’emploi. Que pensent les candidats de ce projet ?

Répondre aux préoccupations

« Une autre question à laquelle les candidats doivent répondre est celle du pouvoir d’achat : que proposent-ils ? », ajoute Jean-Pierre Técher. Il revient sur la longue bataille menée avec le Collectif, aux côtés de Jean-Hugues Ratenon notamment, pour obtenir l’installation de l’Observatoire des Prix et des Revenus. « Nous souhaitons la transparence, une meilleure lisibilité afin de connaître les paramètres sur lesquels il est possible d’agir afin de faire baisser les prix ». Quels sont les engagements des candidats sur ce sujet qui touche la vie quotidienne de tous les Réunionnais ?
« Que faire pour éviter les problèmes de violence ? », demande également Jean-Pierre Técher aux candidats aux responsabilités. Or, la première des violences est celle de l’exclusion. Ce sont tout d’abord les jeunes qui sont gravement touchés par le chômage et pour qui les perspectives d’avenir ne sont pas favorables.
« On pousse les jeunes vers la délinquance, on en fait des marginaux pour ensuite "nettoyer au kärcher" », constate-t-il, « Or, que propose-t-on aux jeunes aujourd’hui ? Rien à part la mobilité. Mais l’actualité de ces derniers jours a souligné la restriction budgétaire dans ce domaine. Que restera-t-il alors ? ».
« On pousse également les 45-50 ans sur le bord du chemin », poursuit Jean-Pierre Técher. Il déplore la disparition d’une mesure qui avait fait ses preuves : le congé-solidarité. « Au cours des 25 dernières années de politique d’insertion, c’était sans doute la meilleure des mesures mises en place. Elle permettait le départ en préretraite d’un travailleur de plus de 55 ans en échange de l’embauche en CDI d’un jeune. Mais au lieu de pérenniser le congé-solidarité, il a été supprimé ».

Élever le débat

Les dernières annonces en termes de politique d’insertion ne sont pas rassurantes pour Jean-Pierre Técher. Le Contrat Unique d’Insertion (CUI) marque avant tout une ouverture vers le privé, note-t-il. « Il n’y a pas de garde-fous, pas d’obligation de résultat pour les entreprises », poursuit-il. Pour Jean-Pierre Técher, il faudrait obliger les entreprises qui recrutent des travailleurs en CUI à en pérenniser au moins la moitié en CDI à la fin du contrat d’insertion.
Le porte-parole du CLE souligne également l’importance d’élever le débat lors de cette campagne électorale. Il constate que trop souvent, les réunions publiques se résument à « des diatribes lancées contre l’adversaire plutôt qu’à la présentation d’un projet et aux explications ». Il est en effet essentiel pour les électeurs de connaître la position d’un candidat sur des projets qui concernent la vie quotidienne de la population. Quel est son point de vue sur la précarité et sur les moyens d’y mettre fin ? Quel est le projet d’avenir qu’il propose aux jeunes ? Va-t-il se lever et défendre la dignité des allocataires de minima sociaux ? Aborder ces questions lors des réunions publiques, c’est apporter une clarification aux électeurs afin que ces derniers puissent se prononcer en toute connaissance de cause lors du scrutin.
Enfin, Jean-Pierre Técher affirme que même si ce scrutin est une élection locale, elle n’en a pas moins des répercussions nationales.
« Les citoyens n’ont pas suffisamment conscience du rapport de force qui peut se créer lors des Municipales et des Cantonales », précise-t-il, « si les candidats du même parti que le gouvernement sont largement battus, alors cela peut conduire à un changement d’attitude du gouvernement, à une prise en compte de ce résultat dans sa politique ».
En conclusion, Jean-Pierre Técher appelle les électeurs à se rendre massivement aux urnes afin de s’exprimer. « Je suis pour le vote obligatoire », précise-t-il.

Manuel Marchal


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