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par le Dr Raymond Vergès

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Le financement des collectivités menacé dès ce semestre !

Sur le blog de Pierre Vergès

mercredi 20 juillet 2011


La perspective d’une réglementation financière plus stricte (nouvelles normes dites de Bâle 3) conduit les banques à se désengager du marché des collectivités locales. Le financement de celles-ci pourrait être menacé dès ce semestre.


Cette récente réforme bancaire est soi-disant destinée à prévenir une nouvelle crise bancaire. Elle prévoit un relèvement des fonds propres des établissements financiers.
Les nouvelles dispositions pénalisent ainsi les financements longs qui ne sont pas adossés à des ressources stables, telles que les dépôts bancaires.

L’accord conclu en 2010 prévoit un relèvement progressif entre 2013 et 2019 des fonds propres des établissements financiers, pour leur permettre de mieux absorber des pertes en cas de crise.
Pour y parvenir, les banques pourraient privilégier les marchés des entreprises et des ménages, au détriment du secteur public local.

« Pour résumer, cela signifie qu’un établissement ne peut prêter que si l’emprunteur a de l’épargne », explique un banquier.
D’où l’inquiétude des élus et l’alerte donnée par le député UMP Michel Bouvard, président de la commission de surveillance de la Caisse des Dépôts et Consignations.

Michel Bouvard a expliqué que la diminution des prêts des banques aux collectivités locales pourrait rapidement leur poser des problèmes de financement. Elles n’arriveront pas obtenir la totalité des prêts dont elles vont avoir besoin.

Toutes les banques sont impliquées

M. Bouvard avait souligné que la banque franco-belge Dexia, leader historique du financement des collectivités en France, est maintenant « moins présente sur le marché ».
D’autres établissements, comme la Banque populaire/Caisse d’Épargne, numéro un sur le marché, et la Société Générale ne peuvent pas « donner satisfaction à leurs clients » et « accorder tous les prêts demandés par les collectivités ». Le Crédit Agricole s’est retiré de cette activité.

Pas d’épargne ? Pas de prêt !

La Communauté urbaine de Marseille vient de faire l’expérience de cette nouvelle règle : elle n’a ainsi reçu des réponses des banques que pour un montant de 100 millions d’euros alors qu’elle demandait 200 millions !

La situation est plus difficile pour les collectivités moins importantes, qui n’ont pas la taille suffisante pour se refinancer sur le marché obligataire ou par des billets de trésorerie.
En effet, comme le souligne le représentant d’une banque, les collectivités n’épargnent rien. Ou très peu.

Ainsi, les collectivités locales pourraient être en incapacité de financer leurs projets dès les prochains mois. Elles risquent d’être rapidement prises à la gorge, d’autant plus que certaines sont déjà affaiblies par les emprunts toxiques.

Les élus montent au créneau

« Alors que les collectivités françaises constituent le premier investisseur public depuis de longues années, sur lequel, d’ailleurs, l’État s’est appuyé pour soutenir l’activité économique en 2009, dans cette course aux crédits, celles-ci vont courir avec des semelles de plomb » !
C’est en ces termes que Jacques Pellissard, Claudy Lebreton et Alain Rousset, respectivement, présidents des associations des maires, des départements et des régions de France avaient alerté le gouvernement, dans un courrier commun adressé en juin à Matignon.

Cette restriction du crédit pourrait retarder de nombreux investissements et ralentir l’économie française dans son ensemble, écrivaient-ils en substance, en demandant la réunion rapide d’un Conseil national des exécutifs.
Sans attendre d’éventuelles décisions gouvernementales, les associations nationales d’élus locaux envisagent la création en 2012 d’une agence de financement des collectivités locales, qui empruntera directement sur les marchés financiers.

Cette agence « sera le gage d’une diversification accrue des financements et d’un accès pérenne à la liquidité, y compris en temps de crise », affirmait récemment l’Association des communautés urbaines de France.

Aggravation de la crise

Le président de l’Observatoire des finances locales, par ailleurs secrétaire général de l’Association des maires de France et ancien ministre socialiste, André Laignel, en présentant son rapport 2011, a estimé que « tous les éléments d’une aggravation des difficultés financières des collectivités territoriales (étaient) en place ».
Cette situation rend « difficile pour les décideurs locaux de se projeter vers l’avenir » et freine « l’indispensable modernisation des territoires et la qualité des services publics locaux ».

Pour 2011, le président de l’Observatoire des finances locales estime que « la reprise de l’inflation et la hausse des taux d’intérêt tirent les dépenses de fonctionnement vers le haut, alors que les recettes sont, au mieux, stagnantes, voire en déclin ».

« Bricolage des réformes »

Dans son rapport, Laignel cite la baisse de 0,21% de la dotation globale de fonctionnement (DGF) attribuée par l’État aux collectivités.
« Le bricolage des réformes successives et les fortes incertitudes sur le véritable impact de la suppression de la taxe professionnelle », le financement de la péréquation et le coût de la nouvelle carte de l’intercommunalité, « placent les décideurs locaux dans un contexte particulièrement instable et imprévisible ».

En 2010, souligne M. Laignel, les dépenses de fonctionnement des collectivités ont évolué de 2,2%, alors que la DGF ne progressait que de 0,8%. « Cet écart confirme et accentue l’effet de ciseaux constaté chaque année sans interruption depuis 2007 », poursuit l’ancien ministre.

Impacts sur les investissements futurs

La baisse des recettes d’investissement a eu pour conséquence une chute de 8,3% des investissements et une hausse de la dette (+3,4%).
Les subventions d’équipement accordées par les départements (-14,3%) et par les régions (-11,1%) ont impacté les capacités futures d’investissements des communes et intercommunalités, relève M. Laignel.

La tendance longue, pour les départements, reste à un nouvel amoindrissement de leurs marges.
Quant aux Régions, « leur absence de tout véritable levier fiscal, ajoutée à la baisse des recettes de TIPP, les rendent pour l’essentiel dépendantes des dotations de l’État, qui sont en principe gelées pour plusieurs années et les fragilisent très fortement », écrit M. Laignel.

Au fait, qu’en pense le serviteur local du gouvernement Sarkozy ? Pas le Préfet, voyons ! Mais Didier Robert !

Vers la multiplication d’appel d’offres infructueux ?

L’Assemblée des communautés de France affirme que plusieurs intercommunalités l’ont saisie de ce sujet.
« Les organismes prêteurs se montrent de plus en plus discrets et prudents sur le marché, au point que certains appels d’offres pourraient se révéler infructueux faute de trouver un nombre de réponses suffisantes ou des offres répondant en volume suffisant à la demande des collectivités », écrit l’association dans sa dernière lettre d’information hebdomadaire.

Tiens, tiens, ça ne vous rappelle rien au plan local ? Si, si, réfléchissez ! Dans le BTP notamment…


Retard structurel, faiblesse des recettes, rôle d’amortisseur social

Outre-mer : les communes dans une situation critique

La Cour des comptes tire la sonnette d’alarme concernant la situation financière des communes des Départements d’Outre-mer. Résumé dans cette dépêche de DOM-Actu :

« La Cour des comptes a produit un rapport thématique sur les 112 communes de quatre des cinq départements ultramarins. Les magistrats de la rue de Cambon se sont attardés sur le cas de l’Outre-mer et le moins que l’on puisse dire c’est qu’ils n’y sont pas allés avec le dos de la cuillère sur le cas des 3 départements français d’Amérique et de La Réunion.

 Il est bien entendu que les enjeux particuliers dont font face les collectivités ultramarines, liés à leur spécificité économique et sociale et leur situation financière, ne peuvent s’apprécier qu’en restant dans leur contexte. Elles avaient une croissance plus rapide qu’en métropole qui s’est ralentie fin 2008 et s’est carrément dégradée en 2009 à cause de la crise sociale, entre autres.

Ce contexte tient également à l’éloignement, au climat et aux risques sismiques et cycloniques, autant de facteurs qui entraînent aussi des surcoûts d’entretien pour des collectivités qui ont également du mal à faire jouer la concurrence en cas d’appels d’offres à cause du manque de prestataires.

 Même si la situation s’améliore notamment à La Réunion, les difficultés des communes d’Outre-mer proviennent d’une conjonction de facteurs :


- l’insincérité des comptes avec des dépenses minorées et des recettes souvent majorées,


- des recettes dépendantes de l’Octroi de mer (dont l’avenir est remis en cause par l’Union européenne) et de la taxe sur les produits pétroliers


- et un manque de fiscalité directe (taxe d’habitation et foncière) car, très souvent, on ne peut coopter l’impôt du fait d’une base cadastrale non actualisée.


Les communes dépensent beaucoup à cause d’effectifs trop pléthoriques, dus à une multitude d’emplois précaires, un rôle d’employeur social qui sert cependant de tampon pour les populations.

 Elles investissent très peu et manquent cruellement de rigueur dans la conduite de leurs projets. Le rapport souligne le fait que les communes des DOM accusent un retard structurel sur celles de la métropole par rapport aux équipements nécessaires tels que des stations d’épuration, des réseaux d’eau potable ou encore des systèmes de ramassage et de traitements des ordures ménagères. »


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