Grand Angle d’Yvon Virapin

Accueil des handicapés à l’école : des moyens insuffisants

23 mai 2007

Tout le monde se souvient du débat télévisé entre les 2 finalistes du 2e tour de l’élection présidentielle où il a été question entre autres de la scolarisation des jeunes en situation de handicap. Ce sujet a suscité une vive polémique entre les candidats, l’une regrettant que les préconisations contenues dans son texte “Handiscol” de 1998, n’aient pas été toujours suivi d’effet, a exprimé des “colères saines”, l’autre se targuant d’avoir fait voter la loi de février 2005 sur la scolarisation des enfants handicapés, s’est félicité de la situation. Qu’en est-il, en réalité, dans les établissements scolaires ?

La loi sur la scolarisation des enfants handicapés est en application depuis un peu plus de 2 ans. Celle-ci nécessite des accompagnements à tous les niveaux et engage des transformations de l’école certainement plus profondes qu’il n’y paraît. Malheureusement, à déclarer des principes sans donner aux professionnels concernés les moyens, l’Éducation nationale tend à annuler ce que la loi a prescrit.

« Toute personne handicapée a droit à la solidarité de l’ensemble de la collectivité nationale, qui lui garantit l’accès aux droits fondamentaux reconnus à tous les citoyens ainsi que le plein exercice de sa citoyenneté », stipule le texte. Il est ainsi conforme aux directives européennes en matière de non-discrimination imposant à la société de s’adapter pour accueillir les personnes handicapées et non l’inverse. La loi définit les responsabilités : « l’État est garant de l’égalité de traitement des personnes handicapées ». Elle a institué la création des MDPH (Maisons Départementales des Personnes Handicapées), gérées par les conseils généraux en vertu des nouvelles lois de décentralisation. Elle prévoit que « tout enfant doit être inscrit dans une école de référence ». Mais force est de constater que dans les écoles, les équipes rencontrent bien des difficultés. La scolarisation des élèves handicapés doit être accompagnée d’une volonté politique forte. Or les écoles qui avaient déjà une expérience certaine de cette scolarisation à travers les précédentes politiques d’intégration n’ont pas leur mot à dire.
En matière d’information, malgré les déclarations de l’ex-ministre Gilles de Robien estimant que « les enseignants sont informés », aucun document national n’est parvenu dans les écoles. Et l’on constate une baisse sensible et persistante des départs en formation de spécialisation. Par ailleurs, la formation continue sur les modules spécialisés est en nette diminution.

Pourtant, les situations auxquelles sont confrontés élèves, familles et enseignants ne sont pas simples. La mise en place des MDPH était censée introduire plus de proximité, mais elle bouscule bien des pratiques et n’est pas sans dommage. Si leur rôle est à la fois de gérer les moyens et de répondre aux besoins des personnes, la mise en œuvre de la scolarisation est une responsabilité de l’Éducation nationale. Les deux années écoulées ont été marquées par un désintérêt majeur de la part de l’institution qui s’est reposée sur les écoles pour répondre aux demandes des familles.

Or, la scolarisation des élèves handicapés appelle une remise en cause de l’organisation de l’école : comment prendre en compte les besoins d’un élève particulier dans la classe par exemple ? Cela nécessite aussi une transformation des pratiques professionnelles : adaptations pédagogiques innovantes, autres relations aux élèves... ainsi qu’une formation de base plus large et plus complète, le développement du travail en équipe, à la fois dans l’école, et avec les partenaires extérieurs.

La mise en œuvre de la loi de 2005 ne peut non plus ignorer la question des moyens. Le nombre d’enseignants référents et d’enseignants spécialisés est largement insuffisant. Les listes d’attente pour des places en établissements spécialisés ou pour bénéficier d’un assistant de vie scolaire restent longues. De nombreux élèves sont scolarisés sur des temps très courts. L’avenir des personnels accompagnant les élèves n’est pas assuré alors que l’intégration réclame la pérennisation et la professionnalisation de leur emploi. L’accompagnement des équipes est peu pris en compte.

Plus que jamais, pour réussir la mise en œuvre de la loi de 2005 un travail collectif est nécessaire avec tous ceux qui sont concernés et l’institution doit y mettre les moyens nécessaires.


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