Trois points de suspension d’Emmanuel Lemagnen

Des rites de passage...

5 avril 2007

Il y a quelques années, notre futur ex-président de la République supprimait le service militaire.
Le temps passant vite, et notre mémoire effaçant encore plus vite l’ardoise de nos souvenirs, ce service qui était obligatoire pour tous jeune majeur nous semblerait aujourd’hui incongru s’il était réhabilité
Il fallait interrompre ses études, son travail ou son chômage pour partir faire quelques semaines de “classes” et quelques mois de caserne.
Mais il fallait PARTIR ! Il fallait quitter ses parents, quitter ses potes, quitter son quartier, quitter sa tantine et souvent à La Réunion quitter son île.
L’armée vous prenait un an de votre vie, mais vous apprenait en échange à marcher au pas, à obéir, à défendre la patrie, à vous lever tôt au son du clairon et à vous coucher tard dans l’odorante intimité des chambrées.
En bref, on s’emmerdait ferme sur le moment, puis on regrettait après ce “bon temps”, par nostalgie de la jeunesse qui vous file entre les doigts.
Ces quelques mois de pénitence avaient cependant une vertu cachée : CELLE DE L’INITIATION.
Le principe initiatique est le fait de passer d’un état à un autre, en visant un changement positif, un état supérieur. Le petit Larousse donne la définition anthropologique suivante : « Cérémonie permettant aux individus d’accéder à un nouveau statut (lié à une classe d’âge, à un métier...) qui leur confère une pleine appartenance à la société. Les rites d’initiation contribuent à assurer la pérennité de la société ».
De très nombreuses civilisations, on eut et a encore ces RITES DE PASSAGE qui marquent l’entrée de l’adolescent dans l’âge adulte. La période militaire agissait comme telle, qu’on le veuille ou pas. On en revenait changé, enrichi de l’expérience de la vie en groupe, conscient des obligations que génère la vie en société, sensibilisé à la nécessaire citoyenneté collective.

Il serait intéressant au travers d’une étude sociologique de mesurer les impacts comportementaux qui ont découlé de la suppression de cette période obligatoire (il serait tout aussi rigolo de chiffrer cette forme de continuité territoriale). Ca faisait quand même plusieurs centaines de billets d’avion par an...).
La famille et l’école se désengagent peu à peu de cette part éducative. A l’heure où nous serons amenés à être de plus en plus nombreux sur notre île, et donc à développer un système de socialisation plus aigu, PEUT-ÊTRE NOUS FAUT-IL CHERCHER DANS NOS TRADITIONS DES SOLUTIONS CONTEMPORAINES ?
Je ne veux pas faire mon vieux con (d’ailleurs, je n’ai pas fait l’armée, j’étais planqué comme VAT), mais il me semble important qu’on ait le courage de se poser la question et de réfléchir, sans préjugés ni sectarisme, à une nouvelle offre initiatique ancrée dans les turbulences de ce siècle, à même d’éveiller les consciences de nos futurs adultes.
Ne fermons pas la porte aux bonnes idées et n’ayons pas peur d’envisager un NOUVEAU SERVICE CITOYEN.
Pour une majorité de jeunes aujourd’hui, les rites de passages sont l’obtention du Bac ou du permis de conduire, voir même quelques mois de prison pour une petite minorité.
Pendant une période donnée, aller par exemple aider son voisin de palier ou un malgache dans la brousse ne me semble pas être une idée d’ultra conservateur mais simplement de la générosité humaine bien comprise.
Et porteuse de tellement de choses...

Emmanuel Lemagnen


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