Entre la Chapelle pointue et Le Port...

29 juillet 2006

"Mariage à la Chapelle pointue ! Les médias y ont vu un privilège familial et historique. Sans aborder le problème dans toutes ses dimensions, je voudrais juste donner ma propre perception en tant que Maire... ayant célébré le mariage civil de ce couple au centre de ces articles.
Autrement dit, si le mariage religieux s’est déroulé là où est inhumée Ombline Desbassyns, le mariage civil a eu lieu dans une ville dont personne ne niera la forte symbolique de luttes historiques, syndicales et politiques. Une ville dont le Maire - faut-il le rappeler ? - est descendant d’esclaves et d’engagés, ascendance qu’il ne brandit jamais comme un drapeau, s’affirmant essentiellement comme Réunionnais, mais qui donne à cet acte un relief particulier.
Étrange, ce mariage qui tente d’allier des références aussi inconciliables ? Oui, mais précisément, j’ai été touché par la démarche de ce couple qui avait bien conscience de bousculer les repères, au point d’avoir même voulu se marier un 20 décembre, fête réunionnaise de la liberté, pour finalement le faire le week-end du 14 juillet, commémorant la Révolution française. Par là, ils ont tenté de montrer que tout individu a certes des appartenances sociales, ethniques qui l’inscrivent dans une filiation déterminée, mais qu’il a aussi une conscience personnelle qui lui permet de faire son propre cheminement. Pour cette femme et cet homme, venus d’horizons différents, leur geste était celui d’une réconciliation. Aussi me permettrez-vous de leur renouveler ici mes vœux de bonheur.
Certes, les réactions dont la presse s’est fait l’écho soulignent les limites de cette tentative individuelle de dépasser les clivages qui continuent de blesser la société réunionnaise. Mais, à ce niveau-là, faut-il faire une cible de ce jeune couple ou poser le problème plus large de l’utilisation de ce lieu à ceux qui lui ont délivré l’autorisation, à savoir l’Evêché et le Conseil général ? En effet, on ne voit pas pourquoi la Chapelle pointue, patrimoine réunionnais, n’accueillerait pas d’autres noces, et, tout particulièrement, les mariages de ceux qui vivent dans sa proximité quotidienne, qui ont participé à la restauration de cette chapelle. De la sorte, on permettrait à chacune et à chacun, au-delà de ses origines ancestrales propres qu’on ne choisit pas, de s’approprier pleinement l’histoire de La Réunion et de l’assumer dans sa complexité."

Jean-Yves Langenier
Maire du Port


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