Marie-Ange Pongérard, centenaire

« J’ai connu tous les goûts, toutes les couleurs, toutes les douleurs aussi… mais j’ai été heureuse »

13 février 2013

Samedi 9 février, la Ville du Port a célébré les 100 ans de Mme Marie-Ange Pongérard, Citoyenne d’honneur de la Ville. Voici un court résumé de sa vie, avec des intertitres de “Témoignages”.

Fille de Marie-Antoinette et Toussaint Maillot, Marie-Ange vient au monde le 9 février 1913 à Grand-Ilet (Salazie). Elle est la huitième d’une fratrie de neuf enfants dont elle est la seule vivante aujourd’hui.
Agriculteur, Toussaint cultivait le manioc, la patate et le chouchou. Cela ne permettait pas de grandes rentrées d’argent, mais apportait au moins une subsistance à la maison.
Marie-Antoinette s’occupait du foyer et de l’éducation des enfants tout en épaulant son mari.

Quant aux enfants, dès qu’ils avaient un certain âge et qu’ils étaient assez forts, ils devaient prendre part aux activités, celles des champs comme celles de la maison. Chacun s’acquittait de sa tâche comme faisant partie intégrante de la vie quotidienne. Personne ne se plaignait, Marie-Ange, comme les autres. Chacun mettait du sien pour le bien de tous. C’est ainsi que Marie-Ange a grandi, nourrie de ces valeurs que sont le sens du devoir, du partage et de la solidarité dont elle saura faire preuve tout au long de sa vie.

L’école de la vie

Marie-Ange est partie à l’école, mais malgré ses capacités, elle a été contrainte de s’arrêter au cours moyen, car elle souffrait de fièvres chroniques. Ce parcours scolaire peut paraître modeste aujourd’hui, mais pour l’époque, c’était beaucoup. Lorsqu’on savait lire et écrire, on avait déjà ce qu’on appelait « un bagage ». L’école de la vie faisait le reste.

Quelque temps après, la famille Maillot s’installa au lieu-dit Ravine à Malheur à La Possession. A Ravine à Malheur, Marie-Ange trouve le bonheur puisque c’est là-bas qu’elle rencontre l’élu de son cœur, Marcel Pongérard, qu’elle épousera le 30 septembre 1933. Elle avait alors vingt ans. De leur union naîtront neuf enfants qui ne sont plus que quatre aujourd’hui.

Femme et mère au foyer…

Marcel était à la fois bûcheron, charpentier et charbonnier. Il allait couper et préparer le bois en forêt où il restait plusieurs jours d’affilée, dormant dans les boucans. Quand il revenait, ce n’était pas pour longtemps, il lui fallait très vite repartir au travail. Marie-Ange restait à la maison, mais elle ne chômait pas. Elle devait gérer seule le quotidien, le ménage, s’occuper des enfants, veiller sur leur santé, leur scolarité, les faire grandir tout simplement. Elle a assumé ces charges avec beaucoup de courage. Un courage qui lui a permis de surmonter toutes les difficultés et les épreuves qu’elle a rencontrées au cours de sa vie, les plus dures étant la perte de cinq de ses enfants et puis celle de Marcel, son mari.

… et militante

Si la vie n’a pas toujours été tendre avec Marie-Ange, cela ne l’a pas empêchée d’être à l’écoute des autres et d’aider ceux qu’elle estimait encore plus démunis qu’elle. Le peu qu’elle avait, elle le partageait. C’est probablement cette générosité qui l’amènera à s’engager au sein de l’Union des Femmes françaises où elle a milité aux côtés d’illustres figures telles que Isnelle Amelin, Alice Pévérelly, Laurence Vergès, Odette Mofy… Marie-Ange intervenait régulièrement auprès des femmes et des familles en difficulté pour leur apporter un peu de soutien et de réconfort.
Elle participera aux luttes pour la justice sociale, pour le respect des droits sociaux et du citoyen, pour la démocratie. Elle connaîtra les années sombres marquées par la répression.

L’esprit de solidarité

Pour la petite histoire : Lors d’une élection municipale à La Possession, Marie-Ange et son mari viendront au secours du maire sortant de l’époque (Roland Jamin) qui portait l’étiquette communiste. Le candidat de la droite était proclamé élu grâce aux méthodes frauduleuses, pratique courante à l’époque et cautionnée par le pouvoir institutionnel représenté à ce moment-là par le Préfet Perreau-Pradier. Le candidat communiste fût expulsé de la mairie par la force et la violence. Sa maison était prise d’assaut.

Pourchassé par les sbires de son adversaire, il trouva refuge chez les Pongérard qui lui offrirent le gîte et le couvert pendant quelque temps. C’est encore eux qui le recueilleront lorsque, plus tard, il se retrouva seul et complètement dépourvu. Pourtant, les Pongérard eux-mêmes n’étaient pas riches et vivaient dans des conditions qui n’étaient pas faciles, mais ils possédaient une qualité qui n’a pas de prix : l’esprit de solidarité.

Portoise de cœur et de conviction

Par la suite, la famille Pongérard s’installe au Port dans le quartier du Cœur-Saignant. Au Port, Marie-Ange poursuivra son action militante avec les forces de gauche pour la défense des plus pauvres et pour un véritable projet de développement de cette ville. Membre de l’OPIAPA et de l’Association générale des retraités, elle participe à la dynamique de la vie associative. Elle est un témoin privilégié de l’histoire de notre île et des grandes transformations de la ville du Port depuis quelques décennies. Portoise de cœur et de conviction, Marie-Ange a contribué par son engagement au développement de la cité maritime.
En 2006, la municipalité du Port lui décerne le titre de Citoyenne d’honneur.

Aujourd’hui, quand on demande à Marie-Ange quel regard elle porte sur sa vie, voici ce qu’elle répond :
« J’ai connu tous les goûts, toutes les couleurs, toutes les douleurs aussi… mais j’ai été heureuse ».


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Messages

  • Des larmes d’emotions !
    Oui des perles ont ruisselle sur mes joues. Des perles nees de ces emotions quand j ai lu la vie de Marie-Ange. Quelle vie !
    Quelle vie faite de simplicite ! Une vie de galere sans jamais se plaindre. Elle s en est allee de village en village avec toujours le meme sentiment etre au service des autres. Son Mari. Ses Enfants. Ses voisines. Le Parti Communiste qu elle a su reconnaitre comme le parti des pauvres gens .
    D age en age elle s est montree DIGNE et AIMANTE. De tout age elle nous a montre et nous demontre qu elle est FEMME MAMAN .
    Marie Ange c est la FEMME qui sans cesse travaille sans compter ses douleurs . Elle travaille pour ses enfants, son Mari et les petites gens qu elle rencontre, qu elle reconforte, qu elle AIME.
    Marie Ange est AMOUR.
    Moi qui ne te connait pas je vois un visage plein de quietude . Un visage SAGE. Un visage ou chaque ride est le signe des bienfaits que tu as su nous donner . Ces beaux bienfaits venus de TOI.
    Marie Ange , Ma Grande Mere : MERCI .


Témoignages - 80e année


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