Le 15 octobre : Journée Nationale des Toxicomanies

L’alcool conserve sa spécificité dans l’île

15 octobre 2008, par Sophie Périabe

Aujourd’hui, c’est la Journée Nationale des Toxicomanies, l’occasion de faire le point sur les addictions à La Réunion. Constat : La Réunion est marquée par plusieurs particularités en matière de toxicomanie, avec des comportements à risques vis-à-vis des différents produits qui semblent se cumuler chez les hommes.

La consommation d’alcool est particulière à La Réunion. En effet, malgré une consommation moins fréquente dans l’île, la proportion de personnes ayant connu des épisodes d’ivresse au cours des 12 derniers mois est comparable entre La Réunion et la Métropole, et ce, quel que soit le sexe. Plus de 2 hommes Réunionnais sur 10 ont été confrontés à ces situations, comme leurs homologues métropolitains. Et cette consommation excessive d’alcool entraîne des conséquences sanitaires et judiciaires plus fréquentes et plus lourdes dans notre région par rapport à la situation métropolitaine : • La mortalité régionale directement liée à l’alcool est supérieure de 70% à la mortalité métropolitaine. • 290 Réunionnais meurent chaque année suite à des maladies directement liées à l’alcool : principalement des hommes avant 65 ans : 5 fois plus de décès chez les hommes ; 70% des décès surviennent avant 65 ans. • 4 personnes sur 10 tuées sur les routes de l’île le sont à cause de l’alcool. Chez les jeunes, près de 9 Réunionnais sur 10 déclarent avoir déjà consommé de l’alcool au moins une fois au cours de leur vie. Mais cette proportion chute à 4% lorsqu’il s’agit de consommation régulière (plus de 10 consommations dans le mois). En outre, les ivresses répétées ne touchent que 9% des jeunes.

Consommation de tabac : bilan mitigé en 2007

Les ventes de cigarettes ne sont qu’en légère baisse en 2007 malgré l’augmentation des prix et les efforts importants réalisés en matière de prévention, de soins et de prises en charge. En 2007, 3,9 cigarettes ont été vendues en moyenne quotidiennement par habitant de plus de 15 ans à La Réunion. La moyenne métropolitaine était estimée à 3,2 en 2006. La Réunion figure ainsi parmi les régions les plus fortement concernées par la vente de cigarettes. Conséquence : la mortalité régionale directement liée au tabac est supérieure de 20% à la mortalité métropolitaine. Chaque année, 560 Réunionnais meurent en moyenne suite à des maladies directement liées au tabac, principalement des hommes (60% des décès). De plus, le tabac est la première cause de décès par cancer (16% des cancers). Notons que les décès par cancer progressent chez les femmes même si les hommes sont toujours beaucoup plus concernés. Par contre, la baisse significative de la consommation de tabac chez les jeunes est encourageante. Trois jeunes de 17/18 ans sur 5 déclarent avoir déjà expérimenté le tabac en 2005 et 17% fument tous les jours contre 20% en 2001. Les jeunes Réunionnais fument leur première cigarette vers l’âge de 14 ans, et ont un usage quotidien du tabac presque 2 ans plus tard en moyenne. 40% des jeunes ont expérimenté le zamal La Réunion est marquée par des particularités dont les principales sont : - Le cannabis (zamal) est de loin le produit le plus expérimenté et le plus consommé en population générale comme chez les plus jeunes : on observe un phénomène de banalisation de la consommation de zamal. En 2005, à La Réunion, 5 garçons sur 10 et moins de 3 filles sur 10 ont déjà expérimenté le cannabis à 17/18 ans, mais seuls 7% des garçons et 1% des filles déclarent consommer régulièrement. - D’autre part, l’expérimentation de médicaments est non négligeable chez les jeunes de l’île et en particulier chez les filles (26% contre 9% chez les garçons). On se souvient bien sûr du récent fait-divers qui s’est déroulé à Saint-Pierre où une jeune maman de 14 ans a été retrouvée morte d’overdose. Parallèlement, les ventes de certains médicaments détournés de leur usage (Artane, Rivotril, méthadone) se maintiennent à des niveaux élevés dans notre île. - Enfin, le phénomène de polytoxicomanie est également bien présent sur l’île : les usagers de drogues réunionnais associant fréquemment alcool + zamal + médicaments détournés de leur usage, un cocktail très dangereux.

Sophie Périabe (Avec le tableau de bord sur les addictions à la Réunion réalisé par l’ORS)


Les demandes d’exclusion des casinos ont triplé en 2 ans

Les jeux de hasard et d’argent sont aussi considérés comme des addictions, et on peut dire que dans notre île, le contexte est propice aux comportements à risques. Résultats : - Les Réunionnais dépensent plus d’argent aux jeux de loterie, de tirage et de grattage : 3,2 euros en moyenne chaque semaine contre 2,8 euros en Métropole. - Les Réunionnais misent également plus d’argent pour les courses de chevaux : 216 euros par an contre 143 euros en Métropole. - Le nombre de demandes d’exclusion de casinos a fortement augmenté en 2007 : 135 joueurs réunionnais ont demandé à être exclus des casinos en 2007, estimant avoir un comportement à risques, compulsif vis-à-vis des jeux. Les chiffres ont quasiment triplé en 2 ans (54 demandes en 2005).


Un plan gouvernemental de prise en charge et de prévention des addictions 2008-2011

Adopté le 8 juillet 2008, le nouveau Plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les toxicomanies s’est fixé l’horizon 2011 pour faire reculer les consommations de drogues illicites et les consommations excessives d’alcool en France. Le nouveau plan repose d’abord sur une extension du domaine de la prévention, en élargissant ce registre aux mesures pouvant avoir un effet dissuasif sur les consommations : renforcement de la confiance des adultes dans leur capacité à protéger les plus jeunes des consommations ou des modes de consommations dangereux, via notamment une campagne d’information, mise en place des stages de sensibilisation aux dangers de l’usage de produits stupéfiants, réduction de l’offre d’alcool aux mineurs pour lutter contre le “binge drinking” (alcoolisation massive express). Le plan prévoit également de conduire des actions contre la culture illicite de cannabis et l’offre de drogues sur Internet, avec la mise en place - au niveau européen - d’une structure permettant de mieux gérer les biens criminels saisis, de renforcer la coopération policière et douanière, y compris aux frontières de l’Union Européenne avec les pays de la région Méditerranée. Enfin, le plan diversifie le dispositif de prise en charge sanitaire et sociale des addictions en ciblant les populations exposées et vulnérables, et notamment au risque de contamination de l’hépatite C, tout en étudiant, dans une démarche pluridisciplinaire, les différentes causes de ces parcours. Nourri de l’évaluation du plan 2004-2008 et de la consultation des principaux acteurs associatifs, il comprend 193 mesures dont 38 dans le domaine de la prévention et de la communication, 41 dans le domaine de l’application de la loi, 69 dans le domaine des soins et de la réduction des risques associés aux usages, 30 dans le domaine de la formation et de la recherche et 15 mesures au plan international. Le budget prévu pour l’exécution du nouveau plan s’élève à 87,5 millions d’euros sur 4 ans.

(Source : site du gouvernement)


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