Rapport de l’Observatoire National de la Délinquance (OND) sur les violences conjugales

La Réunion toujours parmi les mauvais élèves

11 juillet 2008, par Sophie Périabe

813 faits de violence constatés sur les femmes en 2007, soit 47,8% de plus qu’en 2004, avec une proportion de 28,9 faits pour 10.000 femmes majeures (contre une moyenne nationale de 18,7 pour 10.000), tels sont les résultats d’une étude menée par l’OND sur les violences conjugales en France. Avec la région parisienne, le Nord et les autres DOM, La Réunion fait figure de mauvais élève. Dans notre département, cette hausse est, bien sûr, à mettre sur le compte de l’augmentation des actes de violence envers les femmes, comme le prouvent les différents faits-divers, mais également sur le nombre croissant de dépôts de plainte.

En 2007, en France, 47.573 faits de ce type ont été enregistrés par la police et la gendarmerie, soit 31% de plus qu’en 2004. Cette évolution a été continue depuis 2004, mais son rythme s’est fortement accentué en 2006 et surtout en 2007. Les 3 hausses annuelles successives ont été de +2,1% en 2005, +10,9% en 2006 et +16% en 2007. Cette dernière correspond à 6.558 faits constatés de violences volontaires sur femmes majeures par conjoint en plus en 2007 par rapport à 2006, soit plus de la moitié de l’augmentation enregistrée sur 3 ans. Dans de nombreux départements, cette hausse ne s’explique pas par une augmentation du phénomène, mais par un plus grand nombre de plaintes favorisé par des campagnes publiques et une évolution de la législation qui a durci la répression de ces faits et étendu leur définition. Les violences exercées par un ancien conjoint sont en effet depuis 2006 considérées comme violences conjugales au même titre que celles exercées par un conjoint.

21% des faits donneraient lieu à une plainte

L’OND a cependant remarqué que ces faits faisaient traditionnellement l’objet de peu de plaintes ; il a donc affiné l’étude en utilisant l’enquête dite de “victimation” faite par l’Insee auprès de plusieurs milliers de femmes de 18 à 60 ans. Ce type d’enquête permet de mesurer la fréquence des atteintes à travers l’interrogation directe d’un échantillon de la population. Selon cette enquête de 2007, 410.000 femmes ont déclaré avoir subi des violences de leur conjoint ou ex-conjoint en 2005 et 2006, soit 2,3% des femmes de cette tranche d’âge. Donc, seuls environ 21% des faits donneraient lieu à une plainte, conclut l’OND. Pour les faits dénoncés à la police et la gendarmerie, c’est la Creuse qui enregistre le plus faible nombre de cas par rapport à sa population féminine (6,1 pour 10.000 femmes). La Seine-Saint-Denis est celui qui détient le record inverse avec 50,1 faits pour 10.000 femmes, la moyenne nationale étant de 18,7. Dans les 3 DOM, Guadeloupe (23,8/10.000), Martinique (24,5/10.000) et Réunion (28,9/10.000), ce taux est au moins supérieur de 5 points à la moyenne nationale. La Guyane, quant à elle, atteint une proportion de 49,1 faits pour 10.000 femmes majeures, soit +30,4 points par rapport à la moyenne nationale.

Beaucoup reste à faire

L’interprétation des évolutions du nombre de faits constatés de violences volontaires sur femmes majeures par conjoint ou ex-conjoint mérite d’être complétée et enrichie. En effet, les Parquets ont donné des instructions aux services enquêteurs afin que soit établie de manière systématique une procédure au lieu d’une main courante ou d’un procès verbal de renseignements judiciaires, et ce, malgré l’absence ou le retrait de la plainte par la victime. Ils ont également rappelé l’interdiction de refuser un dépôt de plainte. Mais beaucoup de doutes demeurent quant à l’application de ces instructions par les services concernés. Si l’on se réfère à plusieurs faits-divers qui se sont déroulés dans notre île et notamment à cette femme abattue par son ex-conjoint après plusieurs menaces et dépôts de plainte, on peut se questionner sur le suivi de ces dépôts de plainte et sur l’application des instructions des Parquets. Enfin, il faut souligner les importantes actions de prévention et de communication menées par certaines associations pour inciter les victimes à dénoncer de tels faits ; et d’après cette étude, fort heureusement, de nombreuses femmes osent enfin parler pour sortir de leur enfer quotidien.

Sophie Périabe


Peu de plaintes quand l’auteur est le conjoint actuel

Sur une évaluation du nombre de femmes victimes d’un conjoint « au moment des violences », soit 345.000, on mesure que 13,2% d’entre elles ont déposé plainte. Si l’on s’en tient au nombre de femmes qui, au moment de l’enquête, vivaient encore avec le conjoint auteur de l’acte violent, soit un total de 285.000 victimes, ce taux de plaintes ne s’élève pas à plus de 9%. En revanche, pour des actes de violences commis par un ex-conjoint, il dépasse 60%.


Moins de 130.000 hommes se déclarent victimes

L’absence de dénombrement des faits de violences volontaires sur hommes majeurs ou sur mineurs (hommes ou femmes) par conjoint, dans les services de la sécurité publique, ne permet pas de disposer, pour l’ensemble du territoire, du nombre de faits constatés de violences par conjoint. Ainsi, selon une enquête de “victimation”, on estime que 127.000 hommes de 18 à 60 ans ont été victimes de violences physiques d’une conjointe ou d’une ex-conjointe en 2005/2006. La part d’hommes se déclarant victimes, soit 0,7% des 18 à 60 ans, est donc 3 fois inférieure à celle des femmes. En 2007, alors que le nombre de faits constatés de violences volontaires sur femmes majeures par conjoint est en hausse de 12,9% en zone gendarmerie, celui des faits sur hommes majeurs affiche une augmentation bien plus marquée : +39,3% sur 1 an (+654 faits constatés). À la suite de cette évolution, la part de ces violences gagne 2,7 points et atteint la valeur de 16,7% en 2007.


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année


+ Lus