Surpopulation carcérale

Les prisons n’ont jamais été aussi pleines

29 février 2008

Justice. L’administration pénitentiaire a annoncé le chiffre record de 61.076 personnes détenues en France, pour 51.500 places. Soit un taux d’occupation de 119%.

Toujours et encore plus ! Le nombre de personnes écrouées en France a augmenté de 6% en 2007, pour atteindre le chiffre record de 64.003 au 1er janvier 2008 (contre 60.403 un an auparavant), selon les statistiques rendues publiques par l’administration pénitentiaire. Si l’on excepte les condamnés placés sous bracelet électronique, on obtient 61.076 personnes emprisonnées... pour un nombre de places tournant autour de 51.500, soit un taux d’occupation de près de 119%. Le flux des entrées-sorties en prison est, lui, passé d’une moyenne annuelle de 85.000, ces dernières années, à environ 90.000 l’an dernier.

La « modernisation » du parc pénitentiaire

Le Directeur de l’AP, Claude d’Harcourt, avance plusieurs explications à cette forte hausse. Par exemple, l’absence, cette année, des traditionnelles grâces du 14-Juillet, sur lesquelles Nicolas Sarkozy a préféré faire une croix. Ou encore la progression des condamnations à de courtes peines (moins d’un an), notamment pour des faits de violences routières. « Cette hausse des détenus est comparable au phénomène qui s’est déroulé en 2002, estime Claude d’Harcourt, lorsque l’affaire dite "du Chinois" avait provoqué une certaine crispation des juges ».

Pas un mot, en revanche, de l’impact de la politique pénale menée ces dernières années. Selon le directeur de l’AP, les peines planchers pour les récidivistes, votées l’été dernier, n’ont pas encore eu l’effet redouté sur le nombre et la durée des incarcérations. « Les peines moyennes et longues restent plutôt stables », assure simplement Claude d’Harcourt. Il préfère mettre l’accent sur la « modernisation » du parc pénitentiaire : 7 nouveaux établissements, offrant 3.050 places de détention supplémentaires, doivent ouvrir en 2008, tandis que 16 autres, « hors normes », fermeront leurs portes.

Conformément à une disposition de la Loi de programmation et d’orientation pour la justice (LOPJ) de 2002, les premiers quartiers réservés aux courtes peines devraient aussi voir le jour d’ici à 2009 dans les prisons de Fleury-Mérogis (Essonne), Nantes et Toulouse-Seysses, soit environ 300 places. Un total de 2.000 places de ce type est prévu à l’horizon 2012. « Comme quoi, l’administration pénitentiaire n’attend pas la construction de nouveaux établissements pour agir sur ce sujet », souligne Claude d’Harcourt.

L’Observatoire international des prisons (OIP), lui, ne partage pas cet enthousiasme. Et dénonce un « exercice d’autosatisfaction ». « En 2000, tous les parlementaires étaient d’accord pour dire que les courtes peines étaient les plus contre-productives en termes de récidive, qu’il fallait leur trouver des alternatives, s’agace Patrick Marest, le délégué national de l’organisation. Or, depuis 2002, le nombre de courtes peines, justement, est passé de 10.412 à 16.366, soit 57,2% d’augmentation ! ».

L’OIP souligne également l’augmentation du taux de détention. Entre 2002 et 2007, il est passé en France de 77,1 pour 100.000 habitants à 102. Soit 32,3% d’augmentation en 5 ans. « Depuis 2004, ajoute Patrick Marest, le Comité européen anti-torture a dénoncé le surpeuplement comme un traitement inhumain et dégradant. Mais force est de constater que la France, au lieu de faire cesser cette situation immédiatement, continue de remplir les prisons sans que cela n’émeuve personne... ».

Par ailleurs, Claude d’Harcourt a reconnu que l’encellulement individuel, censé devenir effectif au 13 juin 2008, ne sera pas réalisé. « Encore une promesse qui n’est pas tenue », peste Patrick Marest, qui se dit très inquiet pour la future loi pénitentiaire qui sera présentée au Parlement après les élections municipales.

Laurent Mouloud


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?

Messages

  • La France est contrainte de se mettre aux normes européennes. Critiquée pour son parc pénitentiaire, elle doit maintenant rattrapper le retard. A ce sujet savez vous que s les régles pénitentiaires européennes stipulent que les majeurs doivent être séparés des mineurs. A Domenjod il me semble qu’il y aura un quartier mineur ? A quant la construction d’un EPM à la Réunion, véritable outil de réinsertion pour les mineurs, vecteur d’emplois pour bon nombres de réunionnais.


Témoignages - 80e année


+ Lus