"I have a dream", Non pas un rêve ! Plutôt un cauchemar qui m’a pourri la nuit.
La rivière des Remparts, ma tumultueuse rivière, celle de mon enfance, ma rivière de proximité, celle de mes premiers amours nautiques, de mes premières brasses, de mes premiers plongeons téméraires, de mes bassins construits patiemment avec les galets, des plus gros aux plus petits où s’entremêlaient les racines de vétiver cuites que nous charroyons sur le dos de l’usine située au-dessus de la berge, côté Butor. Avec les copains, nous rivalisions d’ingéniosité pour réaliser le bassin le plus parfait, pour s’en vanter. Réalisation éphémère que des mains jalouses prenaient un malin plaisir à casser un peu plus tard, à moins que ce ne fut un renforcement du courant de la rivière rebelle.
Je reviens à mon cauchemar. Ma rivière en pleine crue, des crues terribles, couleur chocolat noir, dévalait de ces remparts abrupts, coulant bord à bord, raclant dans un fracas assourdissant le tablier du seul pont qui, depuis plus de deux siècles, relie les deux parties de Saint-Joseph et permet de continuer le tour de l’île vers l’Est.
Des crues, disais-je, provoquées par des cyclones et tempêtes coalisés, complices, associés pour détruire. Un mélange de Diwa et de Firinga épicé par Hyacinthe, sans oublier le Damoclès barrage de Mahavel. Dans cet horrible et terrible rêve, j’ai vu partir, sous les coups de boutoir de cette furie hydraulique, le site sportif synthétique de la Caverne des Hirondelles dont on pourrait contester la qualité et la conception mais dont l’utilité pour les sportifs de tous âges et tous niveaux n’est plus à faire.
En traversant dans le sens de la longueur le stade de la Caverne des Hirondelles, appelé anciennement le "terrain de l’abattoir", la Rivière des Remparts retrouvait ainsi une partie de son ancien lit des temps anciens.
Ah ! La nature reprend donc ses droits surtout quand on les bafoue impunément !
Le pire de mon cauchemar est à venir.
Mon regard se porte un peu plus haut en amont et que vois-je ? Le stade d’Honneur, le stade Raphaël Babet, situé à 20 mètres à peine de la Rivière impétueuse qui, à chaque entraînement et match nous "chipe" quelques ballons, est amputé du tiers de sa surface laissant un trou béant, des blocs de galets, de la boue... triste dévastation !
En quelques secondes d’un cauchemar qui dure une éternité, nous perdions deux outils, deux lieux, deux sites sportifs fondamentaux.
Cauchemar, fiction, prémonition ?
Si ce désastre arrivait un jour, que deviendraient les habitations, les commerces, les immeubles qui sont là, tout au long et tout autour de notre rivière aux berges qui s’érodent inexorablement à chaque crue, chaque année un peu plus ? Certaines maisons longent de plus en plus le précipice en voyant leur centre de gravité se déplacer dangereusement vers les gros galets. Un jour elles plongeront...
Sommes-nous à l’abri d’une Vaison-la-Romaine tropicale et australe ?
Depuis près de 20 ans, je crayonne dans mes cahiers à spirales ou dans mes petits carnets à petits carreaux des schémas, des croquis, des esquisses sur cette digue des berges de la rivière des Remparts. Pas une simple digue pour sécuriser. Mais une route digue de chaque côté, sur plusieurs kilomètres, en plusieurs tranches, en plusieurs étapes, en plusieurs années.
Endiguer pour sécuriser des centaines de maisons, des quartiers (Goyaves, Butor, Quai-Cayenne), le cœur de la ville.
Endiguer avec une route qui permettrait de mieux circuler, de fluidifier, de délester cette circulation, ces caillots de véhicules qui nous entraînent vers l’infarctus, le coma circulatoire.
Endiguer pour dégager des espaces parkings avec des passerelles piétonnières vers le centre-ville réoxigéné et agrandir de chaque côté du cours d’eau maîtrisé, canalisé et apprivoisé dans le respect la nature.
La dégradation de ces deux sites sportifs, ne fut-ce que dans un cauchemar, m’émeut et m’interpelle. Qu’en serait-il des populations, des habitations... si une telle catastrophe survenait ?
Alors je fais un rêve, un vœu : que dans pas longtemps, cinq à huit ans, un endiguement moderne, fonctionnel, efficace, futuriste soit réalisé sur les berges de la rivière des Remparts. Par qui et comment ? C’est aux spécialistes de répondre.

G. Gangate

PS qui n’a rien avoir avec mes propos précédents : Ma famille et moi avons été affligés, attristés, peinés par la disparition de notre ami Léon Martin, travailleur, enseignant, pédagogue, militant humaniste et bon père de famille.
Son rire, le timbre de sa voix, ses remarques franches et les fameux cakes qu’il nous confectionnait au hasard des rencontres à la Montagne, au Port ou à Sainte-Thérèse.
À Jacques, Simone, Michèle, Hélène, petits-enfants et toute la famille, nos sincères condoléances. Nous n’oublierons jamais Monsieur et Madame Léon Martin.