Prisons : Un projet de loi pénitentiaire au rabais

2 août 2008

C’était l’une des promesses phares de campagne du candidat Sarkozy : répondre massivement à l’inflation carcérale. Rachida Dati, sa ministre de la Justice, a présenté en Conseil des ministres cette bien décevante « réponse ».

La ministre de la Justice, Rachida Dati, a présenté lundi dernier en Conseil des ministres le projet de loi pénitentiaire, l’un de ses grands chantiers, qui entend développer les alternatives à la détention provisoire et les aménagements de peine tout en reconnaissant « un ensemble de droits fondamentaux aux détenus ».
Le texte « garantit » ainsi « la domiciliation à l’établissement pénitentiaire », « le maintien des liens familiaux » grâce à une amélioration de l’accueil des familles, « le droit au travail » avec l’encouragement à l’exercice d’une activité professionnelle, « le droit à la formation » (« à titre expérimental », des régions pourront assurer la formation professionnelle des détenus), et l’aide aux détenus les « plus démunis ».
Deuxième axe du projet, le développement des alternatives à la détention provisoire. « Une personne mise en examen pourra être assignée à résidence sous bracelet électronique fixe ou mobile au lieu d’être placée en détention provisoire ». Quant aux aménagements de peine, ils « seront facilités pour réussir la réinsertion », indique le texte : les peines d’emprisonnement « de moins de deux ans » seront aménageables.
Selon le compte-rendu, « les missions de l’administration pénitentiaire seront davantage tournées vers la réinsertion et la prévention de la récidive ».
Le texte était particulièrement attendu, pour la double raison que, d’une part, le Président Nicolas Sarkozy en avait fait un engagement de campagne, et que, d’autre part, la présentation du texte se fait dans un contexte de surpopulation carcérale record. Il y avait en effet 68.151 détenus au 1er juillet 2008 pour une capacité d’accueil de 50.806 places dans les quelque 200 prisons françaises, soit un taux d’occupation supérieur à 126%.
Cette attente a pourtant été globalement déçue. Le syndicat national de l’ensemble des personnels de l’administration pénitentiaire, le Snepap-FSU, déplore ainsi que le texte de Mme Dati « n’ait pas la portée fondamentale que les personnels pénitentiaires attendaient ». Dans son communiqué, le syndicat se félicite que « les droits des détenus progressent : l’accès au téléphone, l’entrée des entreprises d’insertion, la domiciliation qui permettra aux détenus d’accéder plus facilement aux prestations sociales », mais regrette que « des insatisfactions demeurent comme le droit du travail qui ne sera pas plus effectif qu’auparavant ».
Selon ce syndicat, ce dont manque la loi est « d’une réelle ambition », prenant pour exemple le fait que soit à nouveau différée l’obligation d’enfermer seul tout détenu en attente de jugement. « Le nouveau moratoire de cinq années provoque beaucoup d’amertume et de désespoir, et cela d’autant que le reste du texte ne nous apparaît pas contenir des dispositions qui permettront à l’issue de ce délai d’assurer un encellulement respectueux des droits des personnes », conclut le Snepap-FSU.
Le maquillage prodigué par Mme Dati dans sa loi pénitentiaire n’aura donc au mieux que le rôle de cache-misère, mais ne parviendra pas, selon ces personnes, à répondre complètement à la crise inhérente à l’inflation carcérale.


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