Quand M. Jean-Pierre Brard s’étonne de la cherté de la vie outre-mer

10 janvier 2007

M. Jean Pierre Brard, Député apparenté PCF, mandaté par l’Assemblée nationale, conduit actuellement une commission qui est chargée d’établir un rapport d’information sur les suppléments de pensions de retraites et les sur-rémunérations outre-mer. Il est venu à La Réunion à la fin du mois de novembre, a écouté un certain nombre de partenaires sociaux (organisations syndicales de fonctionnaires et des salariés du privé, organismes institutionnels, etc....) et s’est même rendu dans des grandes surfaces pour constater de visu les prix des marchandises. Après avoir visité d’autres territoires ultramarins, c’est à Nouméa en Nouvelle-Calédonie qu’il s’est exprimé sur la question sensible des sur-rémunérations. Ainsi donc, il a dénoncé des pratiques anormales, responsables de la cherté de la vie dans ces territoires : « Il y a des produits qui sont l’objet d’un quasi monopole d’importation, et pour ceux fabriqués localement, les prix ne résultent pas des coûts de production mais de l’alignement sur les produits importés ».

Par ces propos, M. Brard reconnaît la cherté de la vie outre-mer, contredisant ainsi toutes les déclarations faites jusque-là à l’Assemblée nationale par M. Méhaignerie ou encore au Sénat par M. Arthuis. Il met ainsi le doigt sur la vraie raison d’être de ces indexations qui, à l’origine, était de compenser le prix des voyages et la cherté de la vie sur place. Aujourd’hui, rien n’a changé. Pire, le coût de la vie n’a cessé d’augmenter, et en ce qui concerne la question de monopole, en prenant seulement le cas des compagnies aériennes desservant La Réunion, rien n’indique en l’état actuel qu’elles semblent prêtes à baisser leurs prix tant pour les voyageurs que pour le fret.

Dans le même temps, ces propos mettent à mal le rapport d’audit de modernisation commandé par le ministère du Budget et sur lequel s’étaient appuyé certains parlementaires pour justifier leur amendement au projet de loi de finances pour 2007 visant à supprimer l’indexation des retraites outre-mer au 1er janvier. Il est vrai que les inspecteurs des finances n’ont jamais vérifié la question du pouvoir d’achat sur place, préférant argumenter sur l’impact limité sur l’économie locale de ces compléments de retraites, même s’ils reconnaissent qu’ils représentent 2 points de PIB à La Réunion et 3 points en Nouvelle-Calédonie, et sur l’inéquité du régime des pensions entre les agents des différentes fonctions publiques d’une part et les salariés du privé d’autre part, et enfin sur les disparités de bonus appliquées selon les territoires.

M. Brard a l’air de s’étonner de la cherté de la vie dans les DOM et les TOM. Pourtant, ce constat a déjà été évoqué à maintes reprises au Parlement par nos députés et sénateurs. Il suffit de relire les comptes-rendus des discussions qui ont eu lieu au moment du vote de la Loi d’orientation pour l’outre-mer ou encore de la loi-programme pour se rendre compte. Mais il est vrai que quand il s’agit de débattre de l’avenir de ces territoires éloignés, certains parlementaires de l’hexagone brillent par leur absence tandis que d’autres se bouchent les oreilles. D’ailleurs, c’est bien ce constat qui a motivé le vote de l’article 75 de la LOOM en 2000 instituant un Observatoire de la formation des prix et des revenus dans chaque territoire ultramarin. Aujourd’hui, tout en dénonçant les abus des importateurs, M. Jean-Pierre Brard recommande son instauration. “Mieux vaut tard que jamais”, serais-je tenté de dire.

Tout ce que dit M. Brard n’est pas nouveau. Il ne fait que répéter ce que tous les habitants des DOM et des TOM dénoncent depuis longtemps déjà. C’est pour cela que les partenaires sociaux et les élus de toutes tendances politiques de La Réunion réclament depuis plus de 6 ans du gouvernement le décret d’application de cet article 75 de la LOOM. Visiblement, ce gouvernement n’a pas l’air d’acquiescer puisque M. Baroin, appuyé par M. Virapoullé, préconise plutôt une étude de faisabilité de l’Observatoire des prix et des revenus. Une manière de

Yvon Virapin


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Messages

  • Ce que dit Jean-Pierre Brard correspond à ce que dénoncze depuis des lustres le Parti Communiste Martiniquais.
    Les lobbys de l’importation et des transport maritimes et aériens disposent de situations de rente néocoloniale leur assurant des profits fabuleux. Jamais les études de l’INSEE et de l’IEDOM ne mettent en évidence ces profits des capitalistes compradores.
    Les Directions de la concurrence et de la consommation, pilotées sous l’empire du libéralisme ferment les yeux.
    Il faut non seulement un Observatoire des prix, mais une politique des prix volontariste dans les DOM avec une réglementation appliquée par une Assemblée Unique disposant de pouvoirs législatifs et réglementaires.
    Michel BRANCHI, Rédacteur en Chef de "Justice", hebdomadaire communiste de la Martinique.

  • Est il besoin d’attendre de Paris la mise en place de cet "observatoire" ?

    Une solution alternative, à l’initiative de ceux et celles qui pensent que les collectivités réunionnaises ont les capacités de palier sur ce sujet aux "lenteurs" parisiennes, pourrait voir le jour.

    Le mécanisme est le suivant :

    a) pour comparer le coût de la vie réunion/métropole
    - définition des typologies de structures commerciales pour lesquelles la comparaison avec les structures réunionnaises "a du sens" ;
    - collecte des informations au niveau de ces structures en métropole via des associations de réunionnais qui proposeraient à des réunionnais vivant aux 4 coins de la métropole, des emplois par ce biais ;
    - collecte des informatons au niveau des structures locales avec l’appui au besoin, des associations de consommateurs et création d’une association avec les emplois à la clef pour des réunionnais diplômés et compétents.

    ps : une simple base de données permettraient par la suite, la mise en évidence des différentiels de prix Réunion / Métropole par zone géographique, typologie de produits etc..

    b) sur la formation des prix
    - marchandises importées à la Réunion et ne subissant pas de transformation (achat importés revendus en l’état) : utilisation des informations des douanes. Je rappelle que les collectivités locales municipales et régionales perçoivent des fonds liés à l’octroi de mer. la Région ayant la responsabilité de la fixation des taux d’octroi de mer, il paraîtrait incompréhensible que ses services n’aient pas accès aux volumes et valeurs de marchandises importés qui justifient le montant de ressources dont elle dispose à ce titre... N’oublions pas la compétence économique qu’elle se doit d’assumer de plein droit..
    - marchandises fabriquées à la Réunion à base ou non d’importations : utilisation des informations disponibles au greffe du tribunal de commerce puisque toutes les entreprises, de par la loi, sont contraintes à y déposer leurs comptes annuels. Celles qui ne satisferaient pas à cette obligation, s’exposent à des sanctions financières. La liste des entreprises "ne jouant pas le jeu de la transparence" pourrait ainsi être connu du public et s’exposeraient par la même à une réaction citoyenne de boycott de la part des consommateurs réunionnais "avertis"...

    c) formation des revenus

    - analyse des conventions collectives applicables par les entreprises, analyse des informations des différents types de revenus en partenariat avec les services fiscaux et les services de l’URSSAF, etc...

    Sur ces trois points, une structure associative dont la mission "publique" ne saurait être discutée puisque la loi pose le principe de la création d’un "observatoire", financée par les collectivités dont la Région au regard de sa compétence économique, avec des recrutements de jeunes diplômés locaux, aura la charge de cette triple analyse et pourait constituer le vivier de l’essentiel des recrutements à venir pour cet observatoire, quand le MEDEF réunionnais voudra bien "acter" son installation...

    Chiche ?
    ps : et que certains élus ne s’empressent pas de répondre qu’il est de la responsabilité de l’Etat de créer cet outil, n’oublions que pendant la crise du chik, certaines collectivités ont aidé l’Etat et que certaines collectivités n’hésitent pas à communiquer le cas échéant, sur des prérogatives et de compétences dont elles s’emparent (puisqu’elles ont le droit de le faire). Pourquoi d’autres compétences spécifiques et pas celle-ci via le financement d’une association ???


Témoignages - 80e année


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