Premier Réunionnais du Centre d’études diplomatiques et stratégiques

Sur les chemins de la diplomatie réunionnaise

6 juillet 2006

Christophe Rocheland est le tout premier Réunionnais diplômé du Centre d’Études Diplomatiques et Stratégiques (CEDS). Ce centre est la seule école de diplomatie professionnelle d’Europe, il est membre du Conseil économique et social des Nations Unies et également membre du réseau des Universités des Nations Unies (ACADEMIA). En outre, le CEDS est rattaché auprès du Secrétariat Général de la Défense Nationale, un service du Premier ministre français. Il ne fallait pas moins que tout le prestige de cette école à Christophe, car si certains ont le football dans la peau, lui c’est la diplomatie !

Après avoir été journaliste à KOI, Christophe a suivi l’École des Hautes Études Politiques à Paris en obtenant un certificat de premier cycle universitaire. De retour à La Réunion en 2000, il a été successivement journaliste à “Témoignages” puis correspondant Océan Indien de la South African Broadcasting Corporation (la radio publique sud-africaine) basée à La Réunion.
Puis, c’est l’agence Panafricaine d’Information qui lui a confié la responsabilité du bureau Océan Indien de l’agence officielle de l’Union Africaine (UA) avec un pari original : celui de baser le siège de l’agence à La Réunion (non-membre de l’UA) et compétent pour les pays du Sud-Ouest de l’Océan Indien. Ce qui lui a permis de nouer des contacts au plus haut niveau avec les responsables mauriciens, seychellois, rodriguais, malgaches, comoriens, mozambicains et sud-africains mais également de réaliser des reportages en Tanzanie, au Kenya et en Libye.
Dans le même temps, Christophe n’a pas perdu le fil des études puisqu’il a entamé un Master en Politique et Stratégie de Développement, en e-learning (enseignement à distance par internet) avec la European International University de Bruxelles.
Fort de cette expérience, il a été recruté par le Maire du Port en septembre 2004 en tant que Responsable du service de Coopération décentralisée de la Ville du Port jusqu’en novembre 2005. Il a pu négocier la signature d’une convention de coopération décentralisée (la première de l’histoire de La Réunion) entre une ville réunionnaise et une ville sud-africaine et non des moindres : Durban (plus de 4 millions d’habitants) dont le Maire, Obed Mlaba est venu en visite officielle au Port en novembre 2005.

Un parcours pré-diplomatique riche en... diplomatie

C’est en novembre 2005 que Christophe décide de reprendre le chemin des études en étant admis par la Commission d’admission du Cycle d’Enseignement Diplomatique Supérieur du CEDS réservé aux diplomates et aux fonctionnaires publics des relations internationales ainsi qu’à quelques étudiants chercheurs. Sa motivation était de parfaire sa formation dans ce domaine et de sanctionner sa pratique des relations internationales par un diplôme de 3ème cycle. "Aussi, j’estimais, avant d’entrer au CEDS que beaucoup plus de jeunes Réunionnais ont la capacité (sans pour autant passer par le moule de l’ENA) de suivre une formation pour pouvoir ensuite mieux représenter leur pays à l’étranger, car ce qui nous manque véritablement c’est de faire notre propre diplomatie avec les moyens dont nous disposons (au niveau touristique, économique et politique), car l’État français ne le fera pas pour nous (j’espère qu’en disant cela je ne serai pas considéré comme trop avant-gardiste)", nous confie notre jeune futur diplomate.

Former des diplomates de haut niveau

Ce cycle qui dure une année est ponctué de conférences, cours d’enseignement en Droit international, Relations économiques internationales, Droit des organisations internationales mais également de stages de formation aux Nations Unies à Genève. Il a pour fonction de former des diplomates de haut niveau.
"Aussi, nous avons suivi un stage au Collège Interarmées de Défense (ex Ecole de Guerre) avec la promotion 2005-2006 de l’état-major français, dans le but de gérer une situation (fictive) de crise internationale.
Dans ma promotion et parmi mes "collègues", il y avait la Ministre conseillère du Costa Rica à Paris, le Vice-Consul du Maroc, le Conseiller spécial du Président du Niger, l’Attaché de Défense du Venezuela, le Chef d’état-major adjoint des Forces armées angolaises, des diplomates du Mali, Congo-Brazzaville, d’Algérie, du Cambodge, du Tchad, mais aussi des fonctionnaires français du Ministère de la Défense et des Affaires étrangères. Nous avons pu lier de solides amitiés. Ce fut également pour moi une fierté particulière d’être le premier Réunionnais à être inscrit au CEDS et obtenir le 29 juin dernier le Diplôme de fin de cycle (Master 1)".

S’émanciper et chercher une voie à l’internationale

Tout d’abord, Christophe nous explique qu’il faut admettre que parmi des diplomates de haut rang, "il m’a fallu faire preuve de beaucoup de "diplomatie" pour ne pas employer de redondances afin d’expliquer que nous sommes à La Réunion une région française et européenne qui dispose dorénavant (depuis les lois de décentralisation de 2000) de capacités spéciales en matière de relations internationales. La situation n’avait pas l’air de les choquer dans la mesure où nous vivons tous dans un monde interconnecté et régionalisé, cela avait même l’air de les enchanter de voir un ancien territoire colonial français s’émanciper et chercher une voie à l’internationale."
Parmi les sujets sur lesquels il avait à travailler figure un mémoire collectif sur le développement durable (qui sera publié aux éditions Economica) dans lequel il a, bien entendu, mis l’accent sur le rôle novateur de La Réunion au travers des actions de la Région Réunion depuis 1998 avec le développement des énergies renouvelables et la perspective de l’autonomie énergétique à l’horizon 2025. Il poursuit : "J’ai aussi mis l’accent, malheureusement, sur les faits d’actualité nous concernant avec le chik en tirant la sonnette d’alarme. Car quoi qu’on en dise, le développement des maladies ré-émergentes comme le chikungunya trouve un terrain de prolifération avec l’augmentation du réchauffement planétaire. Si à La Réunion nous avons le chik, sur le continent africain, nous avons la dengue hémorragique ou encore le paludisme qui prolifèrent sans qu’on en parle pour autant. Ce sont des effets indirects de l’augmentation de la température au niveau mondial. Autre sujet de préoccupation dans ce domaine : la plus qu’imminente fin du pétrole, comment y faire face ? Quelles sont les alternatives ? Autant de sujets, qui m’ont amené, en tant que Réunionnais, à évoquer l’expérience originale de notre territoire et des projets à y développer en la matière.
Sur tous ces sujets, bien entendu je me suis entretenu avec des élus réunionnais de séjour à Paris, et plus particulièrement la sénatrice Gélita Hoarau et le Vice-Président de la Région, Pierre Vergès."

L’émergence d’une diplomatie réunionnaise

La question de l’émergence réunionnaise fera l’objet du mémoire de Christophe. Il nous livre ici en avant-première son sujet qu’il présentera avant la fin de l’année pour obtenir le Master 2ième année : "La Réunion doit-elle et peut-elle développer une véritable diplomatie sur la scène internationale ?... En termes juridiques, j’essayerai de démontrer l’émergence d’entités infra étatique sur la scène internationale avec l’exemple original de La Réunion, les possibilités, les limites et les perspectives. Avec un constat simple : si La Réunion veut réussir son intégration économique avec ses voisins de l’Océan Indien, d’Afrique et d’Asie pour diversifier son économie, créer de la croissance et donc de l’emploi, elle doit impérativement développer des outils lui permettant (comme nos voisins l’ont fait après leur indépendance) d’orienter une véritable politique publique extérieure cohérente pour le territoire réunionnais et ceci conformément à notre statut de Région ultra périphérique européenne." La suite, Christophe aura le plaisir de nous le présenter quand tout sera bouclé... Ce qu’on attend d’ailleurs avec beaucoup d’impatience !

Younous Ahamed


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