Violence des jeunes, violence sur les jeunes

29 novembre 2006

Le Ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy, veut absolument réformer l’ordonnance de 1945 sur la protection des mineurs car il la considère obsolète au regard de « l’impunité » dont bénéficieraient les mineurs délinquants. Profitant de plusieurs faits-divers violents qui ont eu lieu en Métropole ces derniers mois, il veut relancer l’offensive sur l’instauration des peines planchers pour les récidivistes, c’est-à-dire des peines automatiques, ne laissant aucune marge d’appréciation aux juges et l’abaissement de la majorité pénale. Se heurtant à l’opposition d’une partie de sa majorité au premier rang de laquelle se trouve le Premier ministre, il se voit contraint de défendre le projet de loi sur la prévention de la délinquance actuellement débattue à l’Assemblée nationale. Le but de ce projet de loi est de sanctionner plus rapidement les mineurs récidivistes. Il vient par ailleurs renforcer les dispositions de la loi Perben 1 de septembre 2002 qui a largement remanié l’ordonnance de 1945 sur l’enfance délinquante. Rappelons que cette loi prévoyait la création de 60 centres éducatifs fermés avant 2007 dont 1 dans la commune de Saint-Benoît.

Des voix s’élèvent pour qualifier ce projet de loi de « dangereux » car contrairement à l’ordonnance de 1945 qui fait primer la dimension éducative et impose la spécialisation du juge appelé à suivre l’adolescent dans le temps et dans tous les aspects de sa vie, la philosophie de celui-ci c’est de mieux surveiller les récidivistes (par les maires ???) et de les réprimer plus efficacement. Pour Nicolas Sarkozy, « la sanction est le premier outil de la prévention ». Tout est dit dans cette déclaration.

Aujourd’hui, la société produit des violences accrues qui traversent toutes les couches sociales. La jeunesse n’en est pas plus responsable que d’autres catégories, elle en subit peut-être davantage les effets. La dégradation sociale et l’absence de perspectives d’avenir pour beaucoup de jeunes, la ghettoïsation de certains quartiers et les discriminations dont ils font l’objet contribuent manifestement au développement de la violence. Les difficultés de tous ordres qui, parfois, se cumulent, le sentiment d’échec, la perte de l’estime de soi, mais aussi le sentiment d’insécurité peuvent conduire certains jeunes aussi bien à une extrême passivité qu’à un comportement violent. Il convient de s’attaquer aux racines de ce problème. Pour cela, il faut instaurer le dialogue avec les jeunes et apporter des solutions aux problèmes rencontrés. D’où la nécessité de rétablir dans les quartiers des services publics forts (éducation, culture, social, justice, de santé, de police de proximité...) avec des personnels formés à ces questions et œuvrant dans un souci d’apaisement.

À la violence sociale s’ajoute souvent une violence qui naît au sein de l’Ecole : les difficultés scolaires du jeune, son impossibilité à communiquer avec les enseignants et l’institution, les exigences mal comprises de celle-ci placent le jeune en situation de blocage et de réaction face à un univers auquel il n’adhère pas. Les réponses institutionnelles n’ont jusqu’alors pas été à la hauteur des enjeux et des souffrances. Dans les établissements, la réduction massive du nombre de postes d’encadrement a largement contribué à l’aggravation de la violence. Il faut au contraire une véritable politique de prévention avec des équipes pluri-professionnelles plus nombreuses (psychologues, assistantes sociales, infirmières, médecins...) au sein des établissements scolaires pour aider mieux et plus tôt les jeunes avant les passages à l’acte violent sur autrui ou sur eux-mêmes.

Ce n’est pas en renforçant le dispositif de répression que l’on arrivera à enrayer la violence. C’est au contraire par la mise en place d’une vraie politique de prévention, le développement des dispositifs de régulation et de partenariats que l’on pourra aller vers moins de violence dans notre société. Nicolas Sarkozy se trompe lourdement car tous les jeunes ne sont pas des délinquants en puissance.

Yvon Virapin


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