Quand la crise est globale, la solution est politique

6 avril, par Ary Yée-Chong-Tchi-Kan

« Le Quotidien » a évité la liquidation pure et simple. Pensant avoir à faire à des aléas économiques conjoncturels, la holding familiale a injecté, avec courage, des dizaines de millions pour sauver l’entreprise. Cela a permis de tenir. Sans plus.

Reprenons le débat au fond. Voici le projet de son fondateur exposé lors du 40e anniversaire : « Proposer aux Réunionnais un journal qui soit au-dessus des partis et des parti-pris, très nombreux à l’époque. Un quotidien neutre politiquement qui livre une bonne information et ainsi contribue à la paix à La Réunion » (L’info.re/13/09/2016). Passé le jugement économique, il faut juger le bien fondé politique. Selon lui, la paix à La Réunion passe par la neutralité politique… Dans le temps d’un article, nous laisserons le lecteur débattre de cette idéologie « moin lé pa là eksa ». Mais revenons aux réalités.

La Réunion est dans une impasse

En 2013, l’Insee titre : « Avec 330 000 pauvres, La Réunion est un Département socialement hors norme ». Relayer l’information n’est pas suffisant. D’accord ou pas d’accord, cette information mérite débats. Pour éviter des débats stériles, il faut exposer les solutions. Si la situation est « socialement hors norme », il faut donc de nouvelles normes. Lesquelles ? La société a besoin de débats politiques pour permettre aux acteurs socio-économiques et politiques d’exposer leurs points de vue et laisser à la population le choix ultime. La neutralité prônée comme ligne politique est un parti-pris. Dans ce cas, cela fait 11 ans que l’Insee a fait cette déclaration. Toujours rien de nouveau.

La Réunion doit sortir de l’impasse

L’idée d’élaborer un projet réunionnais est de plus en plus acceptée. Tout comme l’idée de profiter de l’existence légale de la Conférence Territoriale de l’Action Publique pour légitimer le résultat. Et puisqu’il faut un consensus le plus large, les forces vives (Partis, Syndicats, Associations, Groupes citoyens etc) doivent être associées aux travaux. Sommes-nous arrivés au bout de l’insupportable pour prendre position ? Ou alors croyons-nous qu’il existe encore de la marge pour ne rien décider ?

« Le Quotidien » est-il sorti de l’impasse ?

Dans sa dernière parution, le repreneur Jean-Jacques Dijoux échange avec les journalistes. Ce qui ressort du titre d’un article : « une identité forte ». En sous titre : « d’abord, un projet réunionnais ». Sur la même page, le vice-président du tribunal n’est pas serein : « Maintenant c’est à vous de voir avec le repreneur ce qu’il pourra faire. S’il y a un salut, pour le journal, ce sera par l’effort de chacun. Dans la forme actuelle, c’est un à deux millions d’euros de passifs en plus par an, une impasse totale. ». Par ailleurs, il regrette que les procédures collectives menées il y a 2 ou 3 ans entre « le JIR » et « le Quotidien » n’aient pas abouti.

La solution réunionnaise est globale

Je l’ai exprimé dans un courrier de lecteur : sauver la presse écrite, c’est se sentir responsable du patrimoine historique et culturel que recèlent « Témoignages » , le « JIR » et « le Quotidien ». « « Témoignages » fait partie des résistants. A travers des articles et des chroniques, c’est un témoin privilégié d’une longue évolution pour la reconnaissance du fait réunionnais. A ce titre, c’est un patrimoine linguistique et une chronique politique de 3 quarts de siècle. Il compte plus de 10 000 textes en créole ; ce qui constitue un matériau de base susceptible d’intéresser beaucoup d’acteurs du développement durable réunionnais. Les textes numérisés remontent au 1er janvier 1974. L’archivage papier est de bonne tenue mais le support est devenu sensible avec le temps. »« La situation d’aujourd’hui avait été largement anticipée, il y a plus de 15 ans. Des discussions étaient très avancées avec l’imprimeur du Port, Chane Pane, pour imprimer les 3 titres de presse existant. Le projet a capoté alors que l’investissement dans une nouvelle rotative était déjà lancé. »

C’est dommage car c’était une solution qui n’ignore pas la réalité, n’élimine personne et permet de relancer les débats sur le fond (l’avenir), sachant que les contingences matérielles de l’existence sont réglées d’un commun accord. C’est politique mais non partisan, une démarche volontariste différente de la neutralité.

Ary Yée Chong Tchi Kan

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