Première enquête “Cadre de vie et sécurité”

La responsabilité des médias dans le sentiment d’insécurité

6 juillet 2012, par Manuel Marchal

Moins de violences qu’en France, mais un sentiment d’insécurité plus fort à La Réunion. Cette perception s’explique en partie par « la médiatisation des actes de violence alimentant ainsi la crainte ». La responsabilité des médias est à nouveau posée.

Dans une société en crise comme la nôtre, les nombreuses situations d’injustice et de précarité favorisent les phénomènes de violence. Ainsi entre 2009 et 2010, un Réunionnais sur trois a été victime de violences. Cette proportion est très élevée. C’est au sein de la famille que ces phénomènes sont plus présents qu’en France. Nul doute que le chômage de masse, la pauvreté que cela entraine ainsi que le sentiment de frustration généré contribuent à faire du domicile familial un lieu d’insécurité.
Globalement, une part moins importante qu’en France est victime de violence, et pourtant, c’est à La Réunion que le sentiment d’insécurité est plus élevé, quasiment deux fois plus.
Pour expliquer ce décrochage entre la réalité et le sentiment, le directeur des études de l’INSEE a avancé hier deux explications sur le plateau du journal télévisé de Réunion Première. C’est tout d’abord l’insularité. Dans une île, les nouvelles vont vite, car nous sommes plus proches, a-t-il dit en substance.
Mais il a également voulu évoquer le rôle des médias dans ce sentiment d’insécurité. Dommage que le responsable de l’INSEE ait été interrompu quand il a commencé à développer ce thème.
Il est vrai que les journaux télévisés ainsi que la presse à grand tirage mettent très souvent à leur "Une" des faits-divers. Et quand un fait-divers est particulièrement grave, c’est un véritable filon pour certains. Ainsi, dans son journal de mercredi soir, une télévision a fait un reportage dans lequel des personnes dans la rue étaient amenées à donner leur opinion sur un fait-divers particulièrement sordide… comme si les faits ne se suffisaient pas à eux-mêmes et qu’il faille en rajouter.
Il est évident qu’à force de voir sans arrêt des faits-divers exposés en long et en large, le sentiment d’insécurité ne peut que se développer, ce qui ne peut que nuire à la cohésion sociale. Et manifestement à La Réunion, cette médiatisation est encore plus grave qu’en France.

M.M.

Pour expliquer ce décrochage entre la réalité et le sentiment, le directeur des études de l’INSEE a avancé hier deux explications sur le plateau du journal télévisé de Réunion Première. C’est tout d’abord

Moins de victimes de violences qu’en France

Voici un résumé de l’étude réalisée par un partenariat réunissant l’INSEE, la Délégation à l’Outre-mer, l’Agence régionale de Santé et la Direction de la Jeunesse et des Sports.

Cette publication, réalisée en partenariat par l’INSEE et la Délégation générale à l’Outre-mer, l’Agence de santé et la Direction de la Jeunesse et des Sports et de la Cohésion sociale dresse un premier diagnostic sur les violences à La Réunion.

Elle a été élaborée à partir de l’enquête “Cadre de vie et sécurité”. Cette enquête réalisée au niveau national par l’INSEE et l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales depuis 2007 s’est déroulée pour la première fois à La Réunion en 2011.

Un tiers des Réunionnais ont été victimes de violences en 2009 ou 2010. C’est moins qu’en France métropolitaine, mais le sentiment d’insécurité est plus répandu sur l’île. Les atteintes les plus sensibles, à caractère sexuel ou perpétrées par un membre du ménage, touchent un dixième de la population, majoritairement des femmes. Elles sont plus fréquentes à La Réunion et sont aussi les moins exprimées.

Les autres atteintes à la personne, moins graves, sont le plus souvent des insultes et des menaces. La moitié des atteintes aux biens des ménages concerne les voitures.

Les actes de délinquance sont moins fréquents qu’en métropole, mais le sentiment d’insécurité est plus prégnant à La Réunion. Par exemple, 18% des personnes sont concernées dans leur quartier contre 11% en métropole. Cette inquiétude s’explique d’une part par la médiatisation des actes de violence alimentant ainsi la crainte. D’autre part, les Réunionnais se sentent peu protégés, en effet, 51% sont insatisfaits de l’action de la gendarmerie ou de la police contre 44% en métropole.

Les violences familiales plus fréquentes qu’en métropole

Les violences dites sensibles : atteinte sexuelle ou bien violence perpétrée à l’intérieur du ménage concernent une personne sur dix à La Réunion. Les violences sexuelles par une personne extérieure du ménage sont les plus fréquentes et concernent 7% de la population contre 4% en métropole.

Au sein du ménage, 3,9% des personnes sont exposées à la violence d’un proche (2,4% en métropole).

En 2009 ou 2010, 18% des Réunionnais ont été victimes d’une agression dite d’atteinte aux personnes : insultes, menaces, vols aux personnes ou violences physiques en dehors du ménage. Les plus jeunes sont particulièrement exposés, un tiers des 14 à 24 ans en sont victimes.

Les atteintes aux biens du ménage concernent les véhicules, le logement ou les fraudes bancaires : 19% des ménages réunionnais en sont victimes.

Plus c’est grave, moins c’est dit

Les dépôts de plainte sont rares et leur fréquence varie selon le type d’agression. Les plus déclarées sont les atteintes aux biens du ménage (29%) et les vols personnels. Les violences dites sensibles sont les moins déclarées (9%). Les violences intrafamiliales sont parfois exprimées ailleurs qu’à la police. Ainsi, 37% des victimes consultent un médecin suite à ces violences. Alors, le personnel médical joue un rôle primordial dans l’écoute. Il est formé à l’accueil des victimes.

Les violences intrafamiliales, particulièrement envers les femmes, sont encore fréquentes. En 2011, six Réunionnaises sont décédées sous les coups de leur conjoint. Afin de lutter contre ces violences, une gouvernance spécifique et des actions propres à l’île ont été mises en place. Elles s’inscrivent dans le plan interministériel de lutte contre les violences faites aux femmes.

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