Vers un nouveau traitement médiatique des affaires politico-judiciaires ?

Marchés de la nouvelle route du littoral : Journal de l’île de La Réunion et Quotidien remarquablement discrets…

7 février 2015, par Manuel Marchal

Le 30 janvier dernier, des gendarmes sont venus à la Région pour rencontrer dans son bureau le président du Conseil régional. Ils enquêtent sur les attributions des marchés de la nouvelle route en mer. Si prompts à mettre en « une » la moindre affaire politico-judiciaire, les deux journaux de la presse écrite à grand tirage ont été d’une remarquable discrétion pour cette fois : pas de « une » et un simple article en page intérieure. Coïncidence ?

Les Unes du Quotidien et du Journal de l’île de La Réunion du vendredi 6 février 2015 : aucune mention de la descente des gendarmes à la Région Réunion, une affaire pourtant pas ordinaire...

Jeudi matin, un coup de tonnerre raisonne à La Réunion. Le site Imaz Press Réunion révèle que des gendarmes étaient à la Région Réunion le 30 janvier dernier. Ce jour là, ils y ont rencontré le président de la Région Réunion Didier Robert. Une enquête est en effet lancée et a dû bien avancer, au point que la justice ait décidé d’envoyer des gendarmes à la Région au vu de tout le monde.

Dans son édition d’hier, « Témoignages » a estimé que l’affaire n’est pas ordinaire, contrairement à ce que tentent de faire croire les explications embarrassées de la Région Réunion. En effet, pendant les 12 années précédant l’arrivée de Didier Robert à la Région, la collectivité avait été maître d’ouvrage de plusieurs grands travaux dépassant la centaine de millions d’euros à chaque chantier. Jamais la justice n’avait jugé nécessaire d’aller à la Région Réunion pour entendre son président, car il n’y avait aucune enquête visant les marchés attribués par la collectivité.
Cela explique pourquoi « Témoignages » avait décidé de consacrer son éditorial à l’affaire concernant la Région Réunion.

1,2 milliard d’euros

Pour la presse à grand tirage, les affaires politico-judiciaires sont des sujets vendeurs. Les citoyens sont en effet très intéressés par le devenir des impôts qu’ils paient. C’est pourquoi il n’est pas rare que le simple début d’une enquête préliminaire dans une commune fasse la « une » de la presse quotidienne à grand tirage. Mais hier, les lecteurs sont restés sur leur faim, alors que l’enquête semble avoir déjà commencé depuis quelque temps. En effet, on imagine mal des gendarmes venir à la Région en plein jour au tout début d’une procédure. Or, le « JIR » et le « Quotidien » n’ont fait aucune mention en « une » de l’événement extraordinaire qui venait de se passer à la Région. Il fallait vraiment chercher en page intérieure pour tomber sur l’information condensée dans un petit article. Cette discrétion étonne, sachant les sommes en jeu. Dans son article, « le Quotidien » confirme en effet que l’enquête s’intéresse à des marchés d’un montant cumulé de 1,2 milliard d’euros. Ce n’est pas rien et c’est une base idéale pour qui veut mener un travail de presse d’investigation.

« Charlie », es-tu là ?

Cette remarquable discrétion de deux journaux quotidiens à grand tirage sur un sujet aussi énorme interroge.
Inaugure-t-elle un nouveau traitement médiatique des affaires politico-judiciaires ? Cela veut dire que désormais le « JIR » et le « Quotidien » s’abstiendront de mettre en avant les enquêtes visant des élus, des collectivités, et se limiteront à une information minimale en page intérieure.

À moins que nos deux confrères nous réservent des révélations encore plus explosives sur cette affaire pour leurs prochaines éditions, et que ce retard à l’allumage vise alors à bien couvrir leurs arrières ? Dans ce cas, vivement aujourd’hui, dimanche ou lundi…

Car un mois après l’attaque de Charlie Hebdo, à l’heure où la liberté d’expression est unanimement célébrée dans les médias les plus diffusés, qui pourrait croire que des journaux se disant « Charlie » se fassent complices d’une conspiration du silence ?

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  • Je me posais la même question. Ils Ont peur de perdre leur financeur. Voilà ce qui arrive quand on est grassement payé par Mr didier. Des donneurs d leçons ces journalistes


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