Billet d’humeur...

Mon Dieu, laissez-nous la encore deux heures

27 février 2007

Dans billet d’humeur, il y a "billet" mais aussi "humeur", alors mauvaise ou bonne humeur, eh bien, plutôt bonne, puisque j’ai profité d’un peu de repos pour me faufiler dans une salle de cinéma et y déguster le film événement de ce mois de février "La Môme". Jadis, on parlait d’humeur pour chasser ces mauvais sangs qui pourrissaient dans notre corps, alors un barbier nous saignait afin de laisser s’écouler toute notre mauvaise humeur pour repartir guillerets à l’assaut de la vie.
Ainsi, j’ai vibré pour la “Môme” Cotillard, pendant près de 2 heures, confortablement assis dans une atmosphère climatisée. L’histoire d’Edith Piaf sur grand écran, je dois vous avouer que cela paraissait alléchant. Fan de la grande Edith, j’avais déjà vu le film "Édith et Marcel" de Claude Lelouch et cela ne m’avait pas laissé un souvenir impérissable.
Il pleut, et c’est toujours mieux, le spleen s’installe, il pleut toujours sur la passion et c’est cela qui fait transpirer les grands artistes. C’est toujours lorsqu’il pleut que la pensée et les images se magnifient, la pluie transformée en larmes, celles d’une femme moitié Française moitié Berbère, une fille de la rue au sens le plus noble du terme, une môme des fortifs qui s’égosille la voix dans les cours d’immeubles pour trouver de quoi remplir son estomac.
Plus tard, ce sont d’autres qui quémanderont pour elle, sans omettre de prendre leur part au passage, et elle, la môme Piaf, elle n’aura qu’une chose à faire en échange : pousser sur ses cordes vocales afin de sortir le filet de voix qui demeure encore et de loin le plus beau du monde. Il y avait un bal au fond de sa rue, et la "Môme" est sortie du bordel pour guincher avec les Aminches. Elle a poussé la chansonnette et on l’a reconnue, reconnue une nouvelle fois, dans le sens noble du terme.
Mais voilà, il y a l’alcool et la poudre blanche qui vous font oublier vos vieilles douleurs, et puis l’amour qui vous fait carburer car, "sans amour, croyez-moi, on n’est rien du tout !!". Alors, la Cotillard, elle a voulu entrer dans la peau de ce petit bout de femme "de rien du tout", 1 mètre 43 au garrot et un cœur gros comme une pastèque. Elle y est parvenue, elle est devenue la "Môme", et je dois vous avouer qu’il faudra encore longtemps pour trouver une interprétation à cette hauteur ! Bien m’a pris d’aller au cinéma, ce jour de février 2007, car j’ai vu de mes yeux Marion Cotillard entrer dans le corps de Mme Edith Piaf. Elle y est entrée par le bas, par le haut, on a eu envie de gueuler, c’était physique ! Mais rien ne sortait, subjugué par le jeu de l’artiste. Les mains de Cotillard ou de Piaf, on ne sait plus très bien jouer de l’accordéon sur son ventre, comme si la fille de joie au coin de la rue là-bas attendait toujours son joueur de piano à brettelles pour lui remplir son bas.
Je ne suis pas du genre à donner des conseils, mais pendant que ce film est sur les écrans réunionnais, il serait bien dommage de passer à côté du chef-d’œuvre d’Olivier Dahan "La Môme". L’essentiel du film nous raconte la grande histoire d’Amour entre la grande dame de la chanson française et Marcel Cerdan. On se demande comment une si courte vie a pu être aussi riche et aussi douloureuse à la fois. Marion Cotillard a déclaré qu’elle avait mis 1 an avant de sortir du rôle d’Edith Piaf. Je pensais : "quelle fadaise !" eh bien, après la projection, je dois avouer que mon avis avait changé, car, comme dans la "métamorphose des cloportes" joué par Polanski, il est difficile de sortir indemne d’une telle interprétation. Et maintenant, avec le recul, je crois que je ne pouvais pas passer à côté d’un tel événement cinématographique, sinon je me serais retrouvé comme un conn...d qui voit un grand chanteur mourir et qui se précipite dans les bacs pour acheter son dernier album.
Cotillard m’a bouleversé, tout comme Piaf a agi sur mes sentiments tout au long de ma vie. On a un peu trop tendance à oublier qu’Edith Piaf était bien plus qu’une interprète, et l’auteur du film ne manque pas de nous le faire remarquer lorsqu’il nous montre la "Môme" écrire sur son cahier d’écolier "L’hymne à l’Amour", à son "Amour", Cerdan !
Il faut reconnaître que cette scène, ainsi que celle dans laquelle Piaf rencontre Marlène Dietrich, resteront les scènes cultes de ce grand film en forme d’histoire d’amour. Après la mort de Marcel Cerdan, Michel Vaucaire et Charles Dumont écriront pour Piaf "Mon Dieu" : « Laissez-le-moi encore un peu, Mon amoureux ! Un jour, deux jours, huit jours... Laissez-le-moi encore un peu à moi... ». En paraphrasant cette chanson, j’ai envie de dire : "Mon Dieu, laissez-nous la encore deux heures, le temps de l’entendre, de nous l’imaginer, le temps de la voir revivre et de la pleurer, le temps du film d’Olivier Dahan "La Môme" !

Philippe Tesseron
http://pht974.blog-reunion.com/


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