Débat sur les déplacements à La Réunion

Des propositions irresponsables

4 février 2005

Pour contrer le projet de tram-train défendu par le président de la Région, ses détracteurs avancent une série de plusieurs solutions qui sont toutes aussi farfelues les unes que les autres.

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Une route des Plaines rapide pour désenclaver l’Est et le Sud, des liaisons par navettes maritimes, et un tram-train limité entre le Port et l’aéroport : telles sont les grandes lignes d’un plan des déplacements dont l’objectif serait de régler les problèmes de circulation de l’île, assurent les détracteurs du tram-train.
"On ne pouvait, à notre sens, faire autant étalage de bêtise et d’irresponsabilité", a expliqué mardi, lors d’une conférence de presse, Éric Fruteau au nom du PCR.
L’élu saint-andréen rappelle que la solution du tram-train représente pour le PCR "un équipement structurant pour le siècle à venir. Cette solution n’a pas pour raison d’être de régler des problèmes immédiats comme ceux des embouteillages. Dans quelques années et au rythme actuel de l’accroissement du parc automobile, nous allons arriver à une situation de blocage. On ne peut pas se contenter de colmater quelques brèches, il faut une solution plus globale".

Il faut regarder la réalité en face

Il faut régler les problèmes du Sud et de l’Est, disent les opposants au tram-train. Tout en ne sous-estimant pas leur réalité, Éric Fruteau affirme : "la solution au problème des déplacements ne peut être une addition de solutions à des problèmes particuliers."
"Il faut regarder la réalité en face" : chaque jour, il entre en moyenne sur Saint-Denis 70.000 voitures par l’Est et 50.000 par l’Ouest. 40% des voitures en circulation empruntent ce secteur. Si on élargit le champ en se basant sur la liaison Gillot/Le Port, la proportion est plus importante.
Face à une telle réalité, "ce n’est pas en réglant les problèmes du Sud - qui sont des problèmes réels - que l’on solutionnera ceux du Nord",dit le responsable communiste.
Il faut moderniser la liaison Saint-Pierre/Saint-Benoît, disent les détracteurs du tram-train. "Sur les 70.000 voitures qui entrent à Saint-Denis par l’Est, beaucoup viennent du Sud en passant par les Plaines. Ce sont des automobilistes du Sud qui veulent éviter les embouteillages de Saint-Leu, du Cap de la Marianne et de la Route du Littoral. Si on modernise la liaison Saint-Pierre/Saint-Benoît, on va accentuer le mouvement. Il y aura beaucoup plus de sudistes qui gagneront Saint-Denis par la route des plaines. Combien de milliers de voitures supplémentaires entreront ainsi par l’Est à Saint-Denis ?", demande Éric Fruteau.

Commencer le tram-train par les deux bouts

Il est en effet connu que les déviations, les rectifications, les redressements de tracé, c’est-à-dire les améliorations d’un réseau routier contribuent sans doute à régler un problème ponctuel, "mais on ne fait que déplacer dans l’espace et dans le temps le problème", note Éric Fruteau. C’est une donnée universelle.
Lorsque a été inaugurée la déviation de Sainte-Marie, il est clair et évident que l’on allait déplacer le problème des embouteillages un peu plus vers Saint-Denis. On a accéléré le rythme des entrées par l’Est dans la capitale et on a augmenté le nombre des entrées posant à Saint-Denis d’autres problèmes, dont celui des places de parking. La déviation de La Saline a réglé le problème des embouteillages dans cette zone mais augmenté ceux qui sont causés par le passage du cap de la Marianne.
"Nous avons proposé que l’on commence le tram-train par ses deux bouts : le Sud et l’Est. Au cours des débats, cette solution a progressé", constate le responsable communiste. Ce dernier rappelle que le président du Conseil régional, bien avant que ne débute le débat, avait déclaré que compte-tenu de la complexité du problème posé par la route du littoral et du retard que risque de faire prendre la recherche d’une solution, avait proposé de commencer la réalisation du tram-train par les deux bouts, c’est-à-dire par Saint-Benoit et Saint-Pierre. "La question de la desserte sinon de la priorité au Sud et à l’Est trouverait ainsi sa réponse", note Éric Fruteau.

Le contraire de ce que l’on souhaite

Ce dernier constate que les détracteurs du tram-train proposent de limiter ce mode de transport entre le port et l’aéroport. Sa réponse est sans ambiguïté : "que l’on construise le tram-train de Saint-Benoît à Saint-Pierre ou du Port à Gillot, les investissements seront conséquents mais, à cause de la traversée de la Montagne par les Hauts comme par les Bas, c’est sur le tronçon Port/Gillot qu’ils seront les plus importants.
Pour rentabiliser un tel investissement, il faudra - au lieu d’une péréquation qui pourrait se faire sur une ligne Saint-Benoît/Saint-Pierre - établir un prix élevé du billet. Cela reviendrait à rendre le tram-train plus cher et donc peu attractif. On favoriserait ainsi la voiture individuelle. On ferait exactement le contraire de ce que l’on souhaite faire"
, déclare le conseiller général de Saint-André.
"Limiter le tram-train à la seule liaison le Port/Gillot serait aussi une aberration, dans la mesure où les personnes circulant sur ce trajet viennent bien au-delà du Port et de Sainte-Marie", note Éric Fruteau.
Pour les détracteurs du projet tram-train, la solution aux problèmes de circulation viendrait de la création dun TCSP-bus reliant Saint-Benoît à Saint-Pierre. "Lorsqu’on a supprimé le chemin de fer au début des années 60, la solution de remplacement a été le bus, le fameux RTR (réseau de transports réunionnais). Nous savons comment cela a fini", rappelle l’élu communiste.
Il fait remarquer que la Région n’a pas la compétence des transports en commun par bus : "cette prérogative relève des syndicats d’agglomération quand ils ont pris la compétence-transport et, plus généralement du Département qui est l’autorité organisatrice. Pour la mise en œuvre d’une telle solution c’est donc vers ces collectivités et principalement vers le Conseil général qu’il faudrait se tourner, pas à la “Pyramide inversée”", estime le responsable communiste.

Ils s’accusent eux-mêmes

"Dans la réalité donc, les détracteurs du projet tram-train s’accusent eux-mêmes ou accusent leurs propres amis politiques de leur propre carence. Ignorants quelles sont leurs propres responsabilités, ils proposent à la Région de réaliser un TCSP qu’ils estiment indispensables et dont la réalisation incombe à la collectivité qu’ils dirigent !", note Éric Fruteau.
Ce dernier rappelle que le Département gère actuellement un système de transports en bus. Il est largement déficitaire. "Veut-on, par le biais d’un TCSP, élargir et amplifier le déficit ? Nous souhaitons qu’on nous le dise".
"Enfin, vous connaissez l’état actuel de la circulation routière et l’état du réseau routier. Il faudra dégager 1 ou 2 voies pour installer le TCSP, comme cela a été le cas à Saint-Denis. Cela veut dire qu’on va limiter les voies réservées aux voitures et aux camions. Il ne devrait en avoir qu’une dans un sens.
On va donc installer deux “canals bichiques” sur toute l’île : un pour circuler dans le sens des aiguilles d’une montre et l’autre dans l’autre sens. On va multiplier les embouteillages et donc créer plus de problèmes que ceux existants actuellement. On aura reculé plutôt que d’avancer"
, estime l’élu saint-andréen.

J. M.


Quand Montrouge déraille

Citant Éric Fruteau lors de la conférence de presse tenue mardi par le PCR ("le bus n’est pas le projet qui réglera la situation. Il n’a pas les avantages du tram-train, ni sa modularité, ni sa régularité") et une précédente déclaration d’Élie Hoarau ("les travaux commençant aux deux extrémités - entre Saint-Joseph et Saint-Benoît - je propose dans un premier temps que le TCSP soit un TCSP-bus, l’assise pouvant ensuite évoluer pour accueillir un tram-train"), Yves Montrouge du “JIR” semble y lire une contradiction.
Le secrétaire général du PCR propose comme solution définitive le tram-train et fait du TCSP-bus une phase transitoire. Les détracteurs du tram-train n’en veulent pas et militent pour un TSCP-bus comme solution pérenne. Éric Fruteau leur répond que le bus comme projet pérenne ne réglera rien. Il n’y a pas de contradiction mais cohérence. Il faut être myope pour ne pas le voir.


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