“Comment mieux se déplacer demain ?”

Elie Hoarau pour la “priorisation” des transports en commun

1er octobre 2004

Le secrétaire général du PCR, avec son expérience du Sud, est intervenu mardi soir à Saint-Pierre, lors de la deuxième réunion du Débat public (voir notre article d’hier). Il insiste notamment sur la nécessité de ne pas tenir le Sud à l’écart des projets en débat, et d’assurer des conditions convenables de déplacements entre les micro-régions.

Vous avez souligné, à l’instar de nombreuses personnes, le risque d’aggravation du déséquilibre Nord/Sud si on gardait l’aménagement en deuxième tranche de la liaison tram-train Saint-Paul/Saint-Joseph via le triangle Saint-Pierre/Saint-Louis/Le Tampon. Qu’est-ce qui vous faire dire ça ?

- Après le refus de la modification de l’organisation administrative de l’île, on voit s’aggraver le déséquilibre entre le Nord et l’Ouest d’une part et le Sud d’autre part. Ce qui fait qu’aujourd’hui, avec le mitage des terres, La Réunion est en train d’évoluer vers une sorte d’“île-village” dans laquelle les gens, habitant n’importe où, sont amenés à se déplacer pour aller n’importe où afin de rejoindre les lieux de travail, de loisirs, de démarches administratives... Il est donc nécessaire d’assurer des conditions convenables de déplacement entre les micro-régions pour l’ensemble de la population. Ce qui pose le problème de la priorisation des transports en commun.

Dans un premier temps : le TCSP bus

Si l’on veut traiter de manière équitable les populations de toutes les micro-régions, les travaux du Transport en commun en site propre (TCSP), reliant Saint-Benoît à Saint-Joseph par Saint-Denis, doivent être commencés simultanément par les deux extrémités.
En effet, si on se contentait de réaliser en 1ère tranche le TCSP Saint-Benoît/Saint-Denis/ Saint-Paul, celle-ci risquerait d’absorber la totalité des crédits, renvoyant à une date indéterminée la jonction du Sud avec l’Ouest et à partir de ce moment le Sud verrait son déséquilibre se creuser avec l’Ouest et le Nord.

Que proposez vous pour éviter ce nouveau déséquilibre ?

- Les travaux commençant aux deux extrémités, je propose dans un premier temps que le TCSP soit un TCSP bus, l’assise pouvant ensuite évoluer pour accueillir un tram-train.
Il est indispensable de doter ce bassin de population sud, d’un réseau routier conséquent.

Accessoirement vous avez également évoqué la possibilité d’accroître la déconcentration des services de l’État...

- Bien évidemment, mais avec un certain scepticisme. Les déconcentrations qui ont été réalisées jusqu’à présent n’ont pas atteint un niveau qualitatif suffisant. Aussi, l’effet d’entraînement sur le développement des autres secteurs d’activité n’est-il pas aussi important que celui que l’on était en droit d’attendre avec la création d’un deuxième département.

Avant d’aborder vos propositions sur le tram-train et la nouvelle route littorale, vous avez tenu à soulever la question de la route de moyenne altitude entre Saint-Joseph et l’Etang-Salé ainsi que l’aménagement de la RN 3. Pourquoi avoir évoqué ces problèmes en premier ?

- Le bassin de population du Sud est très important et devrait atteindre 450.000 habitants à l’horizon 2020. La circulation des populations, nous l’avons vu, augmente considérablement. Il est donc indispensable de doter ce bassin Sud d’un réseau routier conséquent. Ce qui pose le problème du “désenclavement” des populations en moyenne altitude.
De la même manière, pour que le TCSP bus soit efficace dans cette micro-région, il serait intéressant qu’il desserve les hauts de la Petite-Ile, Monvert, le Tampon, l’Entre-deux et la Rivière Saint-Louis, entre Saint-Joseph et l’Etang-Salé.

Contournement du Tampon par une rocade

Par ailleurs, l’aménagement de la RN 3 prévu au niveau des rampes du Bras des Calumets n’est pas suffisant si l’on veut que la population du bassin Sud l’emprunte pour se rendre à Saint-Denis. Le goulot d’étranglement est beaucoup moins cette portion comprise entre le col de Bellevue et le 3ème village de la Plaine des Palmistes, que la traversée du Tampon. Si l’on veut détourner un partie du flux Sud/Ouest/Nord vers cet itinéraire, il est nécessaire d’aménager le contournement de la ville du Tampon par une rocade. Elle devrait recouper la route de moyenne altitude Est/Ouest, constituant ce que j’appelle la Croix du Sud.

D’autres intervenants comme le représentant de la mairie de Saint-Pierre ont demandé que l’on priorise le tram-train par rapport à la nouvelle route littorale, notamment pour des questions de finances. Mais il nous semble que pour réaliser le tram-train entre Saint-Denis et Saint-Pierre, il faut également aménager la nouvelle route du littoral ?

- Si l’on veut prioriser le transport en commun, il faut réserver la route littorale au transport en commun et aux poids-lourds, et réaliser pour les véhicules légers une route qui passerait par les Hauts. Cette dernière aurait l’avantage supplémentaire de mettre en valeur les centaines d’hectares de la Montagne. De plus, en réservant la route littorale aux transports en commun et aux poids-lourds, les aménagements seront beaucoup moins lourds que ceux qui sont envisagés dans les propositions mises en débat.

Ce même représentant de la mairie de Saint-Pierre - c’est un aveu de taille - a dit qu’il ne fallait pas compter sur le gouvernement et sur l’Europe pour augmenter leurs participations. N’est-ce pas faire peu de cas de la capacité des Réunionnais à plaider leur cause ?

- Il est évident que La Réunion, dans le programme de grands travaux annoncés par le Premier ministre, doit avoir sa part. La voix de La Réunion sera d’autant mieux entendue que les projets pour notre île sont réalistes et procèdent d’un aménagement harmonieux du territoire. Ce qui exclut des réalisations comme la route digue ou le viaduc en mer, qui nous semblent totalement disproportionnés.

Malgré les différences, vous semble-t-il possible que les élus du Sud s’entendent sur une position commune ?

- Le débat de l’autre soir a montré qu’il y avait unanimité des représentants du Sud - et des citoyens dans la salle - pour réclamer que le Sud ne soit pas tenu à l’écart de ces grands investissements. Personnellement, je reste plus que jamais convaincu que si le Sud disposait de structures administratives dotées de compétences d’aménagement à part entière, sa voix se serait exprimée avec plus de force.

Propos recueillis par L. M. 


Repères

- Un Transport en commun en site propre emprunte des voies réservées aux transports en commun, pour garantir la régulation des heures de départ et d’arrivée aux usagers. Le TCSP peut accueillir différents types de transport : bus, train, tram...

- Le tram-train est un tramway qui pénètre et dessert d’une manière relativement fine les centres-villes. Il assure une liaison rapide et un très bon confort entre zones urbaines.


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