L’ATR-Fnaut a déposé quatre recours contre les arrêtés préfectoraux

« La NRL ne fait pas l’unanimité »

30 avril 2014, par Céline Tabou

Une semaine après l’assemblée plénière du Conseil Régional, l’association ATR-Fnaut a organisé une conférence de presse à Saint-Denis, afin d’évoquer les quatre recours déposés, le 28 avril, au Tribunal Administratif de Saint-Denis. L’objectif est d’annuler les arrêtés pris par le préfet, Jean-Luc Marx, autorisant la construction de la NRL en mer sur le domaine public maritime.

D’ailleurs, aux déclarations du président de la Région, Didier Robert, concernant le rapport de la Chambre régionale des Comptes, Jean-Paul Panechou a indiqué que « depuis toujours et le début, Didier Robert a minimisé les impacts financiers et les aspects techniques de la nouvelle route du littoral. Et même sur le rapport du GIEC, Didier Robert a l’outrecuidance de dire que tout va bien », a raillé ce dernier.

« L’opinion réunionnaise doute »

Bruny Payet, président de l’ATR-Fnaut, a rappelé plusieurs événements attestant que « l’opinion réunionnaise doute » de cette route du littoral. « Après la désillusion de nombreux transporteurs, au moment de l’appel d’offre », la CAPEB a protesté face aux faibles retombées économiques et financières de la route pour les entreprises réunionnaises. Bruny Payet a d’ailleurs évoqué le rapport de la Chambre régionale des Comptes, qui a alerté « la Région sur sa capacité à trouver les moyens financiers et en matériaux » et interpellé « sur sa trop faible marge de manœuvre pour poursuivre l’ensemble de ses missions ».
Sur le plan politique, l’ATR-Fnaut a évoqué les déclarations de la nouvelle ministre des Outre-mer, George Pau-Langevin adressées au député Thierry Robert. La ministre « préfère s’abstenir de toute décision car dit-elle les travaux ‘semblent’ irréversibles. Mais semble seulement », a assuré Bruny Payet. Ce dernier a également évoqué l’intervention télévisée du maire de Saint-André, Jean-Paul Virapoullé, estimant que « le projet est mal ficelé financièrement et non sécurisé en mer et proposerait de plutôt de fluidifier l’entrée de Saint-Denis », a évoqué le président de l’ATR-Fnaut.
Toutes ces déclarations attestent, selon l’ATR-Fnaut, des doutes grandissants de la population et notamment des élus vis-à-vis de la NRL. D’ailleurs, « nul ne peut dorénavant ignorer que La Réunion sera confrontée à de nombreux défis économiques et sociaux. Le poids d’une future NRL, ne devra pas entraver nos capacités à les relever », a évoqué Bruny Payet. Ce dernier a évoqué les négociations entre la France et l’Europe sur les Accords de Partenariats Economiques (APE) qui modifieront « notre rapport à nos voisins et négativement notre intégration économique régionale hors d’un co-développement » ; les 50 milliards d’économie du gouvernement ; la remise en cause de l’octroi de mer et la suppression des quotas de production de sucre et « leur écoulement à un prix garantie qui donneront « le coup de grâce à la canne, notre principale exportation ».

Un Matignon III et une route terrestre

Pour Maurice Soubou, la solution serait « une route choisie sur terre », car « les derniers grands chantiers de la route des Tamarins ont permis de former des Réunionnais qui ne demandent qu’à être remis au travail et ont prouvé que le kilomètre de route terrestre restait beaucoup moins cher qu’en mer ». L’ATR-Fnaut veut un « Matignon III qui réorientera les fonds publics sur un projet terrestre de route et de TCSP sur rail, moins onéreux et plus sage pour l’avenir ».
Une route sur terre serait moins coûteuse, notamment face aux dérapages prévus d’au moins 20,7% par la Chambre Régionale des Comptes, voir 30% d’après les estimations de l’ATR-Fnaut, anticipées sur « les seules révisions des prix des marchés ». D’ailleurs, « les surprises en mer » sont à craindre pour l’associations car les Travaux Supplémentaires (TS) peuvent entrainer une surcoût de près de 40%, soit atteindre 2,2 milliards d’euros, a expliqué Maurice Soubou.
Ce dernier a évoqué le choix de desserte de La Montagne, avec « quatre possibilités de combinaison des liaisons routières avec un TCSP sur rail », comme le transport en commun avec le tracé du tram train par Saint Bernard, ou encore la liaison rapide Possession/Saint-Denis par un réseau ferré en tunnel direct. Mais aussi deux tracés routiers, l’un par en haut en combinant voies aériennes et tunnels, et l’autre sous la Montagne, en tunnels, dans la direction de Saint Denis et sur la voie actuelle côté mer pour l’autre sens.
Pour réduire les embouteillages, l’ATR-Fnaut propose « la création d’une entrée supplémentaire à l’ouest de Saint Denis » et « la libération du trafic de transit sur le boulevard sud ». Considérant les alternatives à cette nouvelle route du littoral et ses impacts financiers et techniques, l’ATR-Fnaut a décidé de demander l’annulation des arrêtés qui autorisent la route en mer. François Payet a assuré qu’il était nécessaire de relancer le débat public.

« Recours en excès de pouvoir » contre le Préfet

L’ATR-Fnaut est représentée par la SCP Belot Cregut Hameroux qui a saisi, le 28 avril, le Tribunal Administratif pour un « recours en excès de pouvoir contre quatre arrêtés pris par Monsieur le Préfet de La Réunion en octobre 2013 ». Ces quatre arrêtés concernent :
- la concession d’utilisation du Domaine Public Maritime (DPM) pour la réalisation des travaux des viaducs,
- la concession d’utilisation du DPM pour l’immersion des récifs artificiels,
- l’approbation de la convention relative au transfert de gestion établie entre l’Etat et Conseil Régional de La Réunion portant sur une dépendance du domaine public maritime pour la réalisation et l’exploitation des digues et des pièges à cailloux de la nouvelle Route du Littoral,
- l’autorisation au titre du Code de l’Environnement des travaux de la Nouvelle Route du Littoral sur les communes de Saint-Denis et La Possession.

François Payet a ainsi expliqué qu’une concession ne peut pas aller au-delà de 30 ans. Passé ce délai, la Région devra demander une nouvelle autorisation d’utilisation de la route. En cas de restitution, la Région devra remettre en état les lieux, car la construction est faite sur le domaine public. De fait, « l’ensemble de l’environnement naturel doit être rendu en l’état », or « on n’imagine pas l’Etat venir en aide pour l’entretien de la NRL », a expliqué ce dernier.
Un fait dénoncé par François Payet est qu’à « La Réunion, une collectivité publique se donne le droit, avec la couverture de l’Etat, de ne pas respecter la loi et de rendre en l’état » la NRL et son environnement naturel. Autre point contesté par l’ATR-Fnaut est l’absence totale de procédures de sécurité en cas de chute de véhicule. Il n’y a « aucun dispositifs de sécurité proposé en cas de chute de véhicule, aucune proposition faite en terme de sécurité d’usage de la route », même chose pour les secouristes ne bénéficiant d’aucune procédure d’urgence concernant cette route, a expliqué François Payet.

Pour conclure, Bruny Payet a souhaité « pour éviter ces conséquences désastreuses », l’annulation des arrêtés de la NRL et « la ré-étude de la liaison Est-Ouest » permettant de « reprendre en compte les contraintes économiques et sociales pour l’avenir de notre population ». « Il nous faut pouvoir relancer un débat bénéfique tant dans le public qu’au niveau de ses représentants élus, par l’annulation préalable de ces arrêtés préfectoraux ».

Céline Tabou

La mainmise des majors du BTP


Pour Jean-Paul Panechou, la NRL « ne fait plus recette dans l’opinion réunionnaise ». Evoquant la contestation de la CAPEB, ce dernier a fait le lien avec « la poignée de main de Didier Robert et du Préfet » Jean-Luc Marx, le 20 décembre 2013, lors la pose du premier tétrapode. Une poignée devenue « symbolique », face à la « mainmise des majors européennes sur le BTP de notre île ». En effet, « le duopole Bouygue-Vinci confirme sa prééminence en contrôlant le marché de la NRL » et le « rapprochement de Lafarge et Holcim assujettira l’ile à un monopôle des ciments ».
Pour Jean-Paul Panechou, « les trois premiers chantiers engagés étaient attendus pour certains d’entre eux depuis longtemps car ils répondent à des besoins réels. Mais ils ne nous obligent nullement à poursuivre les travaux en mer ». D’autant plus que les ressources en matériaux et financiers devraient manquer « pour ce projet pharaonique ou titanesque comme on a pu le lire ». Ce dernier a cité le rapport du GIEC indiquant que « nous vivons à une époque marquée par les changements climatiques d’origine humaine, dans de nombreux cas, nous ne sommes pas préparés aux risques climatiques ». Alors « comment faire face à l’avenir avec un tel projet en mer ? », a posé Jean-Paul Panechou.

Plusieurs illégalités


« Nous voulons montrer au tribunal administratif que plusieurs manquements entachent d’illégalité les autorisations accordées à la Région », a expliqué François Payet. Ce dernier a évoque l’illégalité de la Demande d’Utilité Publique, car « au regard de la loi littoral », le Schéma d’Aménagement Régional « ne prévoit pas de route en mer » et « il existait d’autres variantes par les hauts ou en digue et tunnel ».
De plus, « au regard de la théorie du bilan », la route entrainera des « dégâts irréversibles à la nature », contraire au SAR, l’étude d’impact est « incomplète notamment quant aux carrières et ressources » et les mesures compensatoires sont « impossibles », car l’arrêté autorisant la destruction ne prévoit pas de reconstruction.
L’ATR-Fnaut précise également que le « bilan est insincère » et un bilan « incomplet, car la Région compare les coûts de 2011 aux coûts de 2006 et non ceux de 2010 pour la Route des Tamarins.

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