Rien qu’à Saint-Paul, au moins 600 véhicules abandonnés répertoriés au premier semestre 2024

Le gaspillage automobile à La Réunion : fléau environnemental et économique

5 décembre 2024, par Manuel Marchal

La Réunion, comme beaucoup de territoires insulaires, subit de plein fouet les effets de la société de consommation importée d’Occident. Le gaspillage lié aux véhicules hors d’usage (VHU) illustre les impacts négatifs de ce modèle économique installé par le néocolonialisme français à La Réunion. Les activités génératrices de revenus créées autour de ces véhicules abandonnés qui prolifèrent sont loin de compenser un coût considérable pour tous les contribuables, pour l’environnement, ainsi que les risques sanitaires.

Photo Groupe Facebook « La Montagne 97417 Nout’ Kartier »

Le marché automobile réunionnais est marqué par une forte incitation au renouvellement des véhicules. Cette tendance est alimentée par deux facteurs principaux. Tout d’abord la société de consommation importée, qui valorise le neuf et l’obsolescence programmée. Ensuite des normes européennes destinées à satisfaire les intérêts des capitalistes de ce continent pour pousser à renouveler un objet qui fonctionne parfaitement. Cela se traduit par des contrôles techniques de plus en plus exigeants. Résultat : des voitures en état de marche mais nécessitant des réparations pour passer le contrôle sont abandonnées. Pourtant, elles peuvent être capables de parcourir des dizaines voire des centaines de milliers de kilomètres supplémentaires.

Saint-Paul : un exemple révélateur de la crise générale

Le cas de Saint-Paul illustre l’ampleur du problème. Au premier semestre 2024, 600 véhicules hors d’usage y ont été répertoriés, indique un reportage de Réunion Première. Selon ce média, une brigade dédiée a permis de réduire ce chiffre de deux tiers. Cela illustre la situation sur l’île.
Ces carcasses ne sont pas seulement des nuisances visuelles. Elles engendrent de nombreux problèmes. C’est tout d’abord un risque sanitaire. Les véhicules abandonnés deviennent des lieux de prolifération pour les moustiques, vecteurs de maladies comme la dengue et le chikungunya, ainsi que pour les rats, transmetteurs d’une autre maladie grave, la leptospirose. C’est ensuite une pollution environnementale. Les batteries, huiles et autres fluides toxiques finissent par contaminer les sols et les eaux.

Le contribuable doit payer cette conséquence de la société de consommation importée

Les contribuables réunionnais sont doublement pénalisés. D’une part, ils doivent financer les campagnes de collecte et de destruction des VHU. D’autre part, ils subissent les conséquences environnementales et sanitaires de ces pratiques, aggravées par des réseaux illégaux de récupération de pièces détachées.
Des Réunionnais arrivent à créer des activités génératrices de revenus. Illégalement, ils démontent ces véhicules abandonnés pour récupérer des pièces détachées. Ces dernières sont ensuite revendues à un prix moins élevé que les pièces neuves importées, voire d’occasion. Mais ce point positif ne permet pas de contrebalancer le coût environnemental et économique de cette conséquence de l’importation de la société de consommation à La Réunion par le néocolonialisme français.
À La Réunion, l’importation massive de véhicules neufs et de leurs normes associées ne tient pas compte des spécificités locales, où le pouvoir d’achat est limité et les infrastructures de gestion des déchets encore insuffisantes.

Rompre avec le néocolonialisme pour aller vers l’économie circulaire

Pour limiter ce gaspillage, plusieurs pistes méritent d’être explorées :
Tout d’abord encourager les réparations plutôt que l’achat du neuf. Cela signifie faciliter l’accès aux pièces détachées à prix raisonnables et rechercher un cadre formel pour les travailleurs réunionnais qui tirent des revenus du démontage clandestin de véhicules abandonné.
Ensuite, promouvoir le reconditionnement des véhicules qui peuvent encore rouler plusieurs années.
Cette orientation vers l’économie circulaire suppose une rupture avec le néocolonialisme pour recentrer l’économie de La Réunion sur la création de richesses qui ne sont pas ensuite rapatriées dans les comptes de sociétés françaises. Ces sociétés françaises n’ont en effet aucun intérêt à voir leurs bénéfices diminuer au profit du pouvoir d’achat des Réunionnais.

M.M.

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