Droits humains : Comité de soutien aux expulsés de Mayotte

’Mayotte est une zone de non-droit’

10 décembre 2005

Membre du comité de soutien aux expulsés de Mayotte, Maître Aly Abdoulatifou, avocat au barreau mahorais, affirme que ’Mayotte est une zone de non-droit’ car ’toutes les lois de la République n’y sont pas appliquées, notamment en matière de regroupement familial’. Le comité aussi demande que les Comoriens en situation irrégulière dans l’île soient traités plus humainement. Maître Aly Abdoulatifou et Saïd Ahamadi rencontreront demain la mission parlementaire à Mayotte.

Récemment crée, le Comité de soutien aux expulsés de Mayotte (COSEM) regroupe des membres de la société civile de Mayotte, des Comores, de La Réunion, et de Métropole. Il a tenu une conférence de presse hier pour dénoncer "le traitement réservé aux ressortissants comoriens résidant sans papiers à Mayotte". En effet, depuis quelque temps ces "sans papiers" sont dénoncés par une partie des élus mahorais comme étant porteurs de tous les maux. Ils sont, entre autres, accusés d’aggravation, de délinquance et d’occuper des emplois au détriment des Mahorais. Ces élus ont trouvé un écho du côté du gouvernement. François Baroin, ministre de l’Outre-mer s’est en effet déclaré favorable à une éventuelle remise en cause du droit du sol et donc de l’acquisition de la nationalité française par les enfants nés sur le sol mahorais de parents étrangers, Comoriens en l’occurrence.
"Je ne peux pas être d’accord avec cela. Je ne veux pas que Mayotte soit la fille indigne de la France patrie des Droits de l’Homme, du respect de l’individu et de ses droits fondamentaux", disait Maître Aly Abdoulatifou.

"Être aux côtés des plus faibles"

À propos du droit du sol, il fait état d’une ordonnance de mars 2000 qui stipule qu’à Mayotte "celui qui se présente comme le père de l’enfant peut le reconnaître, avec l’accord de la mère, même s’il n’est pas le père biologique". Il affirme que cette ordonnance a été prise par l’État français à la demande du député mahorais de droite Mansour Kamardine, qui est aujourd’hui le fer de lance du mouvement pour l’expulsion des "sans papiers". Alors lorsque François Baroin "veut remettre en cause le droit du sol, cela me fait sourire. Il y a une loi, il faut l’appliquer", commente l’avocat.
Dans le même ordre d’idée, il déplore que la loi sur le regroupement familial (permettant à la famille d’un étranger de venir le rejoindre sur le sol français) ne soit pas appliquée à Mayotte. "Les lois et leur application doivent être partout les mêmes sur tout le territoire français. Or pour le moment Mayotte est une zone de non droit", dit-il.
Saïd Ahamadi, maire apparenté socialiste de Koungou, la commune mahoraise qui accueille le plus de "sans papiers", tient sensiblement le même langage, car note-t-il, "je préfère être aux côtés des plus faibles. C’est l’essence même de la République", souligne-t-il. "J’ai beaucoup de nouveaux arrivants "sans papiers" et j’en suis très heureux. Ils faut les aider à s’installer et à vivre dignement", estime-t-il.

Rencontre demain

Si Maître Aly Abdoulatifou et Saïd Ahamadi ont fait le voyage jusqu’à La Réunion pour s’exprimer, "c’est pour être sûrs de ne pas être censuré comme c’est le cas à Mayotte". C’est également pour rencontre la mission parlementaire qui sera sur l’île aux parfums à partir de la semaine prochaine pour étudier le dossier de l’immigration clandestine. "Les parlementaires ont accepté de rencontrer notre comité ce dimanche à La Réunion", annonce Monique Couderc. "Nous allons lui remettre un document dénonçant la non-application de la loi à Mayotte. Nous allons également poser le problèmes de ces dizaines de Comoriens qui tous les ans meurent noyés en essayant d’entrer clandestinement à Mayotte en kwassas kwassas (barques de pêche)", indique Monique Couderc.


Les premiers soutiens

Dès sa création, le Comité, composé d’une vingtaine de personnes, a reçu le soutien de personnalités et d’association.
Il s’agit en particulier de Mme Rabany, députée et présidente de la Ligue des Droits de l’Homme de Madagascar, de l’association Ankraké, du théâtre Talipot, de la Compagnie de danses Ismaël Aboudou, du Collectif Masixa Mamé, de Jean-François Reverzy, de Cécile Seigle-Vatte, de l’Association Initiatives dionysiennes, de la Ligue des Droits de l’Homme de Mayotte, de la Ligue des Droits de l’Homme de La Réunion, de Michel Dufour, président du Conseil national du PCF, de Saïd Ahamadi, maire de Koungou, de Maître Aly Abdoulatifou.
Par ailleurs, différentes associations comoriennes de La Réunion et de métropole apportent leur soutien au Comité.


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