Incroyable mais vrai : les dirigeants d’une entreprise veulent décider de la composition de la délégation des salariés

Grève à Air Austral : la direction refuse de négocier

7 janvier 2017, par Manuel Marchal

Hier au 5e jour de grève à Air Austral, la direction persiste dans son attitude. Méprisant le Code du Travail, elle veut décider de la composition de la délégation des salariés venus négocier. Les grévistes refusent un tel coup de force. En agissant de la sorte, les dirigeants d’Air Austral prennent la responsabilité de refuser de négocier. Aucune rencontre n’a pu se tenir hier. Contrairement au communiqué rassurant publié hier par Air Austral, la lutte s’amplifie. Les personnels navigants commerciaux ont été rejoints par des salariés du call-center. L’agence de Saint-Pierre est restée fermée. Le mouvement pourrait s’étendre au Centre de contrôle opérationnel, aux pilotes et au personnel au sol, ce qui révèle l’existence d’un malaise social généralisé dans un fleuron de l’économie réunionnaise.

Au lendemain d’une séance de plusieurs heures de négociation, la situation restait toujours bloquée hier à Air Austral. Contactée à 14 heures pour une rencontre à 14h30 par la direction, Marie-Noëlle Wolff a donc transmis la composition de la délégation. En tant que déléguée syndicale, elle a le droit d’être accompagnée par des salariés de son choix. Mais la direction veut pouvoir fixer elle-même la composition de cette délégation. Elle refuse en effet la présence de Vivien Rousseau, pilote et par ailleurs représentant du SNPL.

Jeudi, l’UNSA a accepté de transiger sur la composition car finalement, Frédéric Bénard, délégué CFDT et représentant le personnel au sol, a pu participer à la rencontre. Mais ce vendredi, plus question de se laisser dicter la composition de la délégation par les dirigeants d’Air Austral. C’est la vérité et rien de plus, et c’est un démenti catégorique au communiqué diffusé hier par la direction aux médias dans lequel elle affirme que l’UNSA exige de changer la composition de la délégation et que « le syndicat revient sur toutes les discussions ». L’usage de telles contre-vérités témoigne d’un manque certain de sérénité de la part de dirigeants qui ont sous leur responsabilité l’avenir d’une entreprise de plus de 800 travailleurs, devenue un fleuron de l’économie réunionnaise sous la direction de Gérard Ethève et la présidence de Paul Vergès.

Mouvement prêt à s’étendre

L’étau se resserre autour de la direction d’Air Austral. Hier, des travailleurs du call-center ont cessé le travail. Ce service ne fonctionne que grâce à des stagiaires et des CDD. Si ces derniers ne sont pas dans le mouvement, cela est dû au climat social délétère qui flotte sur Air Austral avec l’équipe dirigeante actuelle.

Outre les pilotes qui envisagent d’entrer dans la grève, le Centre de contrôle opérationnel pourrait lui aussi participer à la lutte. Le CCO est un point névralgique de la compagnie. C’est en effet dans ce service que les vols sont préparés. De plus, l’agence Air Austral de Saint-Pierre est restée fermée ce vendredi.

Toujours à Saint-Pierre, la direction a montré une étrange conception du dialogue social. 13 hôtesses et stewards travaillent sur les vols de l’ATR entre Maurice et La Réunion. Du fait d’un temps de vol très court, les salaires sont très bas car fonction du nombre d’heures de vol. Un PNC peut donc se retrouver avec ’un salaire inférieur à 900 euros. C’est pourquoi les grévistes demandent que le temps de présentation soit pris en compte dans le salaire. Ce temps de présentation est la période préalable au vol durant laquelle les PNC doivent être présents, afin que le voyage puisse se dérouler en toute sécurité, mais il n’est pas rémunéré.

Déjà plusieurs millions d’euros de perdus

11 salariés sur 13 de la base de Saint-Pierre sont en grève. L’UNSA a eu hier connaissance de discussions entre une personne non-gréviste et la direction. Cette dernière est prête à accorder de manière unilatérale une revalorisation des salaires à condition que le travail reprenne à l’aéroport de Saint-Pierre. Ainsi, des négociations très particulières sont menées sans que les syndicats soient mis au courant… Quoiqu’il en soit, cette manœuvre a échoué, car les PNC basé à Saint-Pierre restent solidaires du mouvement et sont toujours en grève.

Face à la probable amplification du mouvement, la direction s’enfonce dans une impasse très dangereuse pour l’entreprise. Elle a en effet prévu de continuer à assurer le transport de tous les passagers. Cela signifie continuer à perdre près de 800.000 euros par jour en affrétant des avions de compagnies étrangères. Depuis le début de la grève et jusqu’à hier, les dirigeants d’Air Austral ont donc fait perdre 4 millions d’euros à la compagnie réunionnaise. Cette intransigeance risque de coûter très cher à une société qui est déjà sur le fil du rasoir à cause d’une stratégie bien hasardeuse.

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