Le représentant de l’État confirme

C’est moi qui fixe les prix !

22 décembre 2008

Dans ces deux pages d’interview publiée dans le ’JIR’ de lundi dernier, le Préfet affirme plusieurs fois que c’est bien lui et lui seul qui fixe le prix des carburants, en fonction des informations fournies par les pétroliers. Il annonce même une baisse pour le 1er février.

Le Préfet s’est offert 2 pages d’interview dans le “JIR” du lundi dernier (voir “Témoignages” des 15, 16, 17 décembre 2008). Il apparaît clairement qu’il a voulu se dédouaner auprès du gouvernement qu’il a fini par embarquer dans une impasse, en protégeant les pétroliers. Ensuite, il tente de se justifier auprès des Réunionnais qu’il n’y avait pas d’autres solutions que de faire payer les pouvoirs publics. À la fin, tout son exposé permet d’éclairer son rôle dans la chaîne des responsabilités. Le fonctionnaire démontre que c’est lui et personne d’autre qui décide des prix des carburants. Il est donc le principal responsable du pouvoir d’achat des consommateurs, intermédiaires et finaux, ainsi que de la crise institutionnelle qu’on a vécue.

Une bizzarerie de l’économie de marché post-coloniale

Nous avons toujours dit qu’à La Réunion, les prix des carburants étaient fixés entre 2 interlocuteurs : les pétroliers et le représentant de l’Etat. C’est une bizzarerie de “l’économie de marché” post-coloniale, mais c’est ainsi.
Mais, dans la lutte pour la baisse des prix, il était distillé dans l’opinion, de manière sournoise, l’idée selon laquelle le Conseil Régional était responsable des prix élevés. Un jour, c’est l’Octroi de mer qui était mis en accusation, un autre jour, ce sont d’autres taxes. Les journalistes qui sont peu au fait des réalités réunionnaises s’évertuaient à soutenir cette thèse à partir de tableaux de circonstance, aux provenances douteuses. Mais quand la population apprend que depuis 8 ans, les taxes régionales, plus faibles ici qu’en métropole, n’ont jamais augmenté, et que 90% de l’Octroi de mer alimentent le budget des Communes, la clarification fait son chemin.

C’est le Préfet qui fixe les prix

Au détour de quelques affirmations, il déclare : « j’ai mis la pression sur les pétroliers »  ; « si, j’avais dû appliquer le prix de revient... »  ; c’est bien la preuve que c’est lui qui décide ; la Région n’avait donc rien à voir dans cette affaire. Et lorsque le “JIR” lui rappelle qu’il avait proclamé que notre île était la mieux lotie des Départements, il souligne : « Je peux vous affirmer dès aujourd’hui que les prix des carburants baisseront de nouveau en février et que je mettrais tout en œuvre pour que La Réunion soit à nouveau le DOM le mieux loti »  ; une telle foi soulève le doute du journaliste qui s’entend dire : « Oui. C’est un engagement ferme ».
Au-delà du côté péremptoire des déclarations, il assume bien la paternité des décisions. Mais, aussitôt, il ouvre une contradiction : puisqu’il est si sûr de lui, pourquoi envoyer au 1er février ce qu’il peut faire aujourd’hui ? Comment compte-t-il rembourser les Collectivités réunionnaises, alors qu’en Guyane et aux Antilles c’est le gouvernement qui contribue à la baisse des prix ?

Une crise institutionnelle sans issue

Toutes ces déclarations confirment la responsabilité totale et personnelle du Préfet dans la gestation, puis la gestion de la revendication des transporteurs. En choisissant d’orienter les transporteurs contre la Région pour soutirer à cette dernière 2,5 millions d’euros, il s’est transformé en partisan politique et non en fonctionnaire d’Etat soucieux de préserver les Institutions Publiques de la République.
Du fait de ses responsabilités, réaffirmées dans cette interview, il a provoqué gratuitement une crise institutionnelle majeure qui aurait pu dégénérer car, à cet instant précis, il n’y avait plus l’autorité de l’Etat, garant de l’ordre et de la sécurité. Le pire a pu être évité grâce au sang-froid des élus.
Le développement de la crise en Guyane et aux Antilles, ainsi que son traitement prouvent que si notre fonctionnaire avait agi autrement, il n’aurait pas mis les pouvoirs publics, qu’il est pourtant censé servir, en difficulté. En tout cas, cela lui aurait évité de s’épancher sur 2 pleines pages pour raconter ce que tout le monde savait déjà. Tout cela n’est-il pas un élément de plus pour alimenter la réflexion sur l’existence d’une ligne d’affrontement institutionnel.

J.B.

Prix des carburants

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