La pénurie d’emploi explose : Paris n’en tient pas compte

Ce gouvernement n’a plus de politique pour l’Outre-mer

8 septembre 2011, par Manuel Marchal

Hier, l’Assemblée a poursuivi l’examen des mesures du nouveau plan de rigueur. Les inquiétudes ne cessent de se confirmer. Mardi, la ministre de l’Outre-mer a adressé une fin de non-recevoir aux demandes d’une délégation de patrons qui demandaient au gouvernement de prendre en compte la situation particulière des Outre-mer. Cela signifie que l’Outre-mer sera mis à contribution dans ce plan d’austérité alors que le chômage atteint un niveau sans précédent. C’est la confirmation que ce gouvernement n’a plus de politique pour l’Outre-mer.

À la différence des députés UMP qui soutiennent mécaniquement le gouvernement, le patronat ultramarin a tenté de discuter avec lui. Mardi, au premier jour de l’examen par l’Assemblée nationale du nouveau plan de rigueur présenté par le gouvernement, une délégation de plusieurs organisations patronales ont été reçues par la ministre de l’Outre-mer.
Cette dernière était restée bien silencieuse depuis la présentation le 24 août dernier du nouveau plan de rigueur du gouvernement. Pourtant, les annonces de François Fillon n’avaient pas épargné l’Outre-mer. Dans notre île, la nouvelle la plus médiatisée concerne un "coup de rabot" de 10% sur les "niches fiscales", qui s’ajoute à une coupe de 10% déjà opérée sur ces dispositifs par le gouvernement dans le budget 2011. Rappelons que ces "niches fiscales" sont des moyens d’apporter à La Réunion des capitaux pour l’investissement, et donc pour créer des emplois.
Une autre annonce est la suppression de l’abattement de 30% sur le bénéfice imposable des entreprises situées dans les DOM. 

La ministre étrangement silencieuse

D’autres mesures visent plus largement la population. Il s’agit de la création de nouvelles taxes, ou de l’augmentation d’autres, qui pèseront sur le pouvoir d’achat d’une population étranglé par les effets de la crise. Paris prévoit en effet d’augmenter la taxe sur les contrats d’assurance maladie, et de faire payer davantage les petits épargnants. Et pour donner une touche de mesquinerie à ce nouveau plan de rigueur, le gouvernement décide de taxer les boissons sucrées au motif que ce prélèvement diminuera le risque d’obésité. Les experts de Paris savent pourtant bien que le problème vient du taux de sucre des boissons, pas du prix.
Jusqu’à mardi, Marie-Luce Penchard n’avait rien dit. Sa prise de parole a déçu les organisations patronales. Yann Le Prince, président du MEDEF-Réunion, s’attendait à ce que la ministre soit aussi efficace pour défendre l’Outre-mer que ne l’a été Jean-Pierre Raffarin pour les parcs d’attractions. En effet, l’ancien Premier ministre a réussi à faire reculer le gouvernement qui voulait la hausse de la TVA sur ce type de produit. Paris s’est engagé à retirer cette mesure du nouveau plan d’austérité, la somme prévue sera prélevée ailleurs.

Attitude révélatrice

À la sortie de l’entretien, les patrons ont fait des déclarations montrant leur déception. Pas question pour la ministre de défendre l’abattement de 30% sur les bénéfices imposables. Cette mesure signifie que des sommes importantes vont quitter La Réunion pour remplir la trésorerie de l’État.
Pour le "coup de rabot" supplémentaire, la seule ouverture faite par la ministre est d’exclure la défiscalisation sur le logement social de cette restriction. Mais les investissements dans les autres logements et dans l’industrie seront visés par la coupe budgétaire.
Cela confirme que ce gouvernement n’a plus de politique pour l’Outre-mer. Car c’est au moment où la pénurie d’emploi atteint un niveau sans précédent que Paris coupe des dispositifs pouvant aider quelques secteurs à ne pas plonger.
Cette attitude est lourde de conséquences pour la population, car cela signifie que le gouvernement n’a pas l’intention de tenir compte de notre situation sociale spécifique dans l’application des mesures de son plan d’austérité. Depuis l’arrivée de ce gouvernement voici quatre ans, la crise n’a fait que s’aggraver dans l’Outre-mer. Son nouveau plan de rigueur démontre qu’il n’a pas l’intention de la résoudre. Et n’oublions que seules « les circonstances présentes » liées à la campagne de la présidentielle expliquent pourquoi le gouvernement ne s’est pas encore décidé à tout casser.

M.M.


L’abattement de 30% : une première brèche

Dans le train de mesures que le gouvernement compte inscrire dans le dernier budget qui sera voté avant la présidentielle se trouve la suppression de l’abattement de 30% sur les bénéfices imposables des sociétés situées dans les départements d’Outre-mer.
Il existe un autre abattement de 30% dans notre île, c’est l’abattement spécifique DOM de 30% sur l’impôt sur le revenu.
En prenant pour cible un dispositif destiné aux entreprises, le gouvernement ne lance-t-il pas un ballon d’essai préparant un démantèlement des avantages de l’Outre-mer après la présidentielle ?


Plan de rigueur : la levée de boucliers des mutuelles

Destination santé a diffusé un article rendant compte de la réaction des dirigeants de la Mutualité française à l’annonce des mesures du plan d’austérité :

« L’idée de créer un impôt sur la maladie, c’est une blague ? » Alors que s’ouvre ce mardi à l’Assemblée nationale, le débat sur le Projet de loi de finances rectificative pour 2011, la Mutualité française — qui fédère près de 600 mutuelles santé — part en campagne contre l’une des mesures de ce plan de rigueur : la « taxe sur les mutuelles ».

« La Mutualité veut montrer à nos concitoyens comme à l’ensemble des parlementaires, que le gouvernement fait un choix dangereux pour l’accès aux soins des Français, en particulier des plus modestes d’entre eux », précise Étienne Caniard, président de la Mutualité.
Le texte gouvernemental en effet, prévoit notamment de supprimer le « taux réduit applicable à la taxe spéciale sur les conventions d’assurance afférentes aux contrats solidaires et responsables ». En bon français de tous les jours, cela signifie que « tous les contrats complémentaires qui répondent aux critères d’interdictions et d’obligations fixés par la loi du 13 août 2004 sont visés », précise Marylène Oge-Jammet, directrice adjointe à la Direction Santé de la Mutualité française…
Cette loi en effet, prévoyait d’exonérer de cette taxe, tous les contrats de ce type puisqu’ils visent notamment, à faciliter la mise en place du parcours de soins. Aujourd’hui, le gouvernement revient donc sur cette exonération en « proposant » de les taxer à 7%. Il faut dire que ces contrats sont très largement majoritaires, puisque 94% des 38 millions d’adhérents à un organisme affilié à la Mutualité Française en bénéficieraient. Une belle cible fiscale…
L’union Harmonie Mutuelles regroupe 7 mutuelles rassemblant 4,6 millions d’adhérents — comme elle fait également partie de la Mutualité française — s’associe naturellement à cette levée de boucliers. Dans une lettre ouverte adressée au Premier ministre François Fillon, son président Guy Herry s’emporte également contre la « taxe CMU » à hauteur de 6,27%. Applicable aux contrats complémentaires, celle-ci serait destinée au financement du fonds CMU.
Comme le rappelle Étienne Caniard, les mutualistes craignent que « la taxation quasi uniforme des garanties complémentaires santé ne permette plus de valoriser les contrats solidaires et responsables ». Sans compter que, les tarifs augmentant, cette mesure pourrait « conduire de nombreux Français à renoncer à une couverture complémentaire ». Ou enfin accentuer « la dérégulation et l’exclusion par la sélection des risques ». Bref l’impôt sur la maladie, ce ne serait pas une blague…

Source : Mutualité française, 5 septembre 2011 – Harmonie Mutuelles, 5 septembre 2011 - Mutualité française, 24 août 2011

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