
Chirac : une certaine idée de la France...
6 janvier 2007

Dans 4 mois, ce sont les élections présidentielles, et Jacques Chirac, jeudi dernier, lors de la cérémonie des vœux aux “Forces Vives de la Nation”, a évoqué sa conception d’un modèle social qui ne serait ni celui défendu par Ségolène Royal et encore moins celui du prétendant officiel de l’UMP, Nicolas Sarkozy. Renvoyant dos à dos la gauche, avec ses « idéologies et illusions », et le « tout libéral » qui prône « la compression des salaires et le rétrécissement de la protection sociale ».
Les grands principes de ce modèle sont la baisse des impôts (des entreprises) pour les encourager à ne pas délocaliser et même pour les attirer sur le territoire français, la participation des salariés aux bénéfices des entreprises au même titre que les actionnaires et une « sécurité sociale professionnelle ». Autant la vigueur du propos étonna d’abord ceux qui avaient “enterré” l’homme politique en fin de quinquennat, et principalement ceux qui sont dans son camp, autant furent intéressés ceux qui étaient dans l’assistance, les principaux PDG des groupes français, la dirigeante du MEDEF Laurence Parisot, les responsables syndicaux dont Jean-Claude Mailly (FO) et François Chérèque (CFDT), un parterre de ministres mené par Dominique de Villepin, ou encore l’Abbé Pierre en fauteuil roulant.
En ce qui concerne les impôts sur les sociétés, le Président de la République a proposé de ramener, en 5 ans, celui sur les sociétés de 33% à 20% pour faire face à « la concurrence fiscale entre les Nations ». Allant jusqu’au bout de cette logique, il a souhaité que les entreprises qui distribuent autant à leurs salariés, sous forme de participation ou d’augmentations de salaires, qu’à leurs actionnaires, bénéficient d’un taux d’impôt réduit à environ 10%. « Les salariés doivent bénéficier d’une partie des profits qu’ils ont contribué à créer par leur travail », a-t-il dit. Jacques Chirac a aussi plaidé pour la création d’une « sécurité sociale professionnelle », car « face au chômage, il ne suffit pas d’être indemnisé, il faut disposer de compétences actualisées en permanence ».
Auparavant, le Président Chirac, dans ses vœux au corps diplomatique, en présence du Président Abdou Diouf, a évoqué « la mondialisation, comme une lame de fond, (qui) bouleverse les équilibres anciens et, en quelque sorte, rebat les cartes de la puissance ». Puis, il a longuement insisté sur la nécessité de « sortir des schémas dictés par l’habitude et (de) déployer notre action diplomatique dans de nouvelles dimensions. Parce que le monde est menacé d’un conflit des civilisations, nourri du choc des ignorances, la France s’est portée à l’avant-garde du combat pour le dialogue des cultures, notamment dans le cadre de la Francophonie, (...) en faisant consacrer la diversité culturelle dans le droit international ». Et il a continué en disant : « Parce que la persistance d’une pauvreté extrême dans un monde de plus en plus riche constitue un scandale moral autant qu’une absurdité économique et un risque politique majeur, la France a bousculé les tabous. Elle s’est notamment engagée en pionnière sur la voie des financements innovants. Parce que la destruction de l’environnement compromet l’avenir même de l’humanité, la France a placé l’écologie au cœur de sa Constitution et des priorités de sa diplomatie ».
Devant les diplomates étrangers, Jacques Chirac a également évoqué les conflits qui secouent la planète. Le Moyen-Orient « épicentre des tensions internationales (où) le conflit israélo-palestinien entretient dans le monde musulman tout entier un sentiment d’incompréhension et d’injustice, comme si le nouvel ordre international comportait, en quelques sortes, deux poids et deux mesures ». La guerre en Iraq « a offert au terrorisme un nouveau champ d’expansion ». Le Président n’a pas évité « le refus du Traité constitutionnel par les peuples français et néerlandais » pour s’interroger sur la construction européenne.
Et pour finir, il a dessiné les « grands défis de notre temps : les moyens de la puissance économique, industrielle et scientifique ; la démographie ; le co-développement et la maîtrise des flux migratoires ; la sécurité énergétique et le changement climatique ; la sécurité alimentaire ; la préservation de notre modèle social ; le dialogue des cultures et l’intégration ; la montée en puissance de la Chine, de l’Inde et d’autres pays ». Il a également insisté sur « une meilleure prise en compte des préoccupations sociales et environnementales (...), la sécurité énergétique et la lutte contre le changement climatique (...), le développement des énergies propres (...), le défi écologique à dimension planétaire (...) et notre politique de coopération et d’aide au développement ».
Autant de thèmes qui ont une curieuse résonance ici à La Réunion. Les préoccupations que le Président Chirac exprime rejoignent sur beaucoup de points l’analyse développée par Paul Vergès depuis plus de 30 ans dans les différentes instances internationales, et depuis 1979 au Parlement européen, à l’Assemblée nationale et au Sénat (où il a fait voter à l’unanimité des 2 assemblées, la loi sur les changements climatiques), le refus du choc culturel et l’appel de Nouméa pour la diversité culturelle avec Marie-Claude Tjibaou, les actions pour aboutir à l’autosuffisance énergétique en 2025, les politiques de co-développement avec nos voisins immédiats, indocéaniques, Vietnam et Chine.
Le Président Chirac se place comme un initiateur d’un débat sur les grands enjeux politiques du pays et la place de la France dans le monde. Plus qu’un programme, c’est l’esquisse d’une certaine vision de la France qui se dessine, loin des propos électoralistes de certains. Sur le tard, Jacques Chirac renouerait-il avec la tradition gaulliste, telle est la question que l’on peut se poser aujourd’hui ?
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