Éclairage sur un recours en annulation des élections — 2 —

Comment un soutien très surprenant a permis de faire croire à une dynamique de ralliement

6 avril 2010, par Manuel Marchal

La fausse nouvelle diffusée par Christian Estrosi a permis à Didier Robert de ne pas être irrémédiablement distancé au soir du premier tour. Pour espérer renverser la tendance, il devait alors impérativement démontrer à l’opinion que sa liste était le centre de la dynamique de ralliement. Cette dynamique, Didier Robert et ses amis se sont employés à la créer à tout prix, en obtenant notamment le ralliement très surprenant d’Éric Magamootoo, élu PS en 2004.

Dans "Témoignages" du 3 avril dernier, il a été question du rôle joué par Christian Estrosi, ministre de l’Industrie, dans la campagne électorale. Son intervention, en tant que membre du gouvernement, affirmant la fausse nouvelle de l’impossibilité de réaliser le tram-train avait pour but de briser la dynamique créée autour des projets de l’Alliance.
Quand Christian Estrosi s’est exprimé, il restait une semaine avant le vote, trop peu pour que l’Alliance puisse répliquer. Le coup porté allait permettre de remettre Didier Robert dans la course. Distancée de 8 à 20 points dans les sondages, la liste UMP réalisait en effet un score très flatteur : elle n’était qu’à 4 points derrière l’Alliance arrivée en tête.
La campagne du deuxième tour débute, et avec un si faible écart, la clé se situe dans la dynamique de ralliement. Pour doubler l’Alliance, il fallait que la liste UMP démontre qu’elle était capable d’élargir son électorat.

Un ralliement très, très étonnant

C’est là que les soutiens déclarés ont un rôle capital. C’est au début de la campagne du second tour que tout s’est joué. C’est tout d’abord Nadia Ramassamy qui décide de venir toute seule sur la liste de Didier Robert. Ce choix n’a pas surpris grand monde. Quand Nadia Ramassamy a été élue au Conseil général en 1998, elle s’est aussitôt placée dans le camp de la majorité de droite de l’époque, ce qui lui a permis d’obtenir une vice-présidence.
Le soutien d’Eric Magamootoo, éliminé au 1er tour, à l’UMP Didier Robert est au contraire beaucoup plus surprenant. Lors de la précédente élection régionale, Eric Magamootoo a en effet été élu sur la liste PS. Mais au lieu d’appeler à voter pour la liste au sein de laquelle le PS est représentée, Eric Magamootoo tient une conférence de presse avec Didier Robert pour annoncer son ralliement à l’UMP. D’où vient donc ce brusque changement ce cap ?
La réponse à cette question est essentielle, car plus que celui de Nadia Ramassamy ou de Jean-Paul Virapoullé, le soutien d’Éric Magamootoo à Didier Robert a créé les conditions de la dynamique de ralliement puisque l’ancien conseiller régional socialiste a apporté la caution de gauche à une liste estampillée UMP et apparentés.

Créer à tout prix une dynamique

Quelques heures avant l’annonce publique de son soutien, Eric Magamootoo constate qu’au premier tour, il ne dépasse pas 5%, ce qui ne l’autorise pas à fusionner, mais fait plus grave pour lui, ne lui donne pas droit au remboursement de ces frais de campagne électorale. Plus grave, car le jour de la présentation des 12 listes en course au premier tour, il n’avait pas fait mystère des « gros soucis financiers » qui l’attendent s’il ne dépasse pas les 5%.
C’est là que deux éléments d’ordre financiers entrent en ligne de compte. C’est tout d’abord la révélation le 25 mars d’un fait datant d’avant le premier tour. Il s’agit du paiement par une société de Jean-François Sita, co-listier de Didier Robert et aujourd’hui 7ème vice-président de la Région, de plusieurs publicités pour le livre-programme d’Eric Magamootoo. Ce paiement d’une facture de 5.636,85 euros est un don d’une personne morale, ce qui est interdit par la loi. De ce fait, c’est non seulement le compte de campagne d’Eric Magamootoo qui est menacé de rejet, mais c’est également la liste de Didier Robert qui est éclaboussée et risque de subir la même peine. À cela s’ajoute l’affirmation du "Journal de l’île" du 15 mars dernier publiée dans l’éditorial en page 3 : « Eric Magamootoo, à qui la Droite fera un cadeau de 125.000 euros (ses dépenses de campagne) ».
À ce jour, le 6 avril, aucun communiqué d’aucune des parties concernées par cette transaction n’a été diffusé dans la presse.
Sans le soutien bruyamment affiché d’Eric Magamootoo à Didier Robert, ce dernier n’aurait pu bénéficier de la dynamique qui lui a permis de refaire son retard et de dépasser l’Alliance en une semaine. Or, les moyens employés pour créer cette dynamique sont entachés de lourds soupçons d’achat de voix.
Mais ce procédé n’était pas suffisant pour assurer la victoire à l’UMP. Il fallait convaincre une large part de l’électorat de ne pas aller voter le 21 mars. C’est là qu’entre en scène le site Zinfos974.com…

(à suivre)

Manuel Marchal

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