La mobilisation des entrepreneurs face à la réforme de l’octroi de mer

Cri d’alarme des industriels réunionnais

13 août 2004

L’article 5 §2 du nouveau décret fixant les conditions de l’application du régime de l’octroi de mer a suscité l’inquiétude des industriels réunionnais (voir “Témoignages” d’hier). Une issue favorable a été trouvée à ce problème.
Mais pour cela, il a fallu une mobilisation des professionnels concernés. Nous publions ci-après les sollicitations de trois entreprises réunionnaises - qui ont vu leur chuter leur exonérations -, auprès du président du Conseil régional et du président de la Commission du développement économique à la Région. Ces demandes ont été suivies des réactions que l’on sait. Elles montrent l’importance de la menace engendrée par la mondialisation des marchés et la nécessité de consolider notre économie de production dans le cadre d’un projet global de développement durable.

La SOCOVOI : "Cette exonération va mettre en péril brutalement notre entreprise" .

La Société de construction de véhicules de l’océan Indien (SOCOVOI) est spécialisée dans la construction d’autocars et d’autobus, et dans la fabrication et réparation des véhicules industriels, depuis plus de vingt ans (date de création : mars 1983). Elle emploie 23 salariés.
"Depuis le 1er août dernier, la nouvelle réglementation relative à l’exonération de l’octroi de mer considère que notre activité relève du “montage” et ne nous permet plus de bénéficier de cette exonération sur les produits importés", déplore le président directeur général de la société, Roger Demas, dans la lettre qu’il a adressée au président du Conseil régional.
"La valeur ajoutée sur nos produits fabriqués est de l’ordre de 25 à 50% suivant les modèles", déclare-t-il. "Vous comprendrez aisément que la suppression du bénéfice de cette exonération va mettre en péril brutalement notre entreprise, avec en particulier de graves répercussions sur l’emploi. Nous sollicitons donc votre intervention urgente pour l’abrogation de cette mesure".


La C.O.F.E.R. : "Des années de travail annulées"

En tant que fabricant "de A à Z" de chauffe-eau solaires à La Réunion, la Compagnie française des énergies renouvelables (COFER) est exonérée d’octroi de mer, depuis sa création en 1998, sur une grande partie des importations de matières premières nécessaires à la fabrication de ses produits finis.
À propos du nouveau régime mis en place depuis le début de ce mois, Michel Dijoux, gérant de la COFER, avait précisé dans sa lettre adressée aux présidents du Conseil régional et de la Commission du développement économique qu’il "comporte une incohérence majeure qui compromet l’existence même des fabricants locaux, alors que l’objectif majeur de la loi est de leur permettre de se défendre face aux importateurs de produits finis".
Pour lui, l’incohérence résidait dans le fait suivant : "les produits que nous fabriquons requièrent, pour une partie de leur constitution, des produits semi-finis tels que par exemple des angles d’aluminium extrudé, des cornières de plastique moulé, des écrous en laiton, des chapeaux de finition de cuve en métal pressé, et bien d’autres éléments que nous ne sommes pas prêts de trouver sur le marché local, compte tenu de leur faible coût de fabrication dans les pays où l’industrialisation améliore la rentabilité".
"Ces produits semi-finis bénéficiaient dans le précédent régime d’une exonération d’octroi de mer, alors que dans le nouveau régime, l’exonération nous est refusée au motif que ces produits sont eux-mêmes des produits finis", ajoutait-il.
En effet, pour le responsable de la COFER, ces produits, "même s’ils concouraient à la fabrication de nos chauffe-eau solaires, ne sauraient être considérés comme des matières premières et par conséquent sujets à exonération".
"Cette incohérence, comme vous l’imaginez, va largement fragiliser la position des usines qui fabriquent totalement, et éliminera à terme les monteurs au profit des importateurs, purement et simplement", indiquait M. Dijoux, qui a demandé au Président de la Région "d’intervenir au plus vite au plus haut sommet de l’État pour que cette incohérence, qui ne peut être qu’une erreur, soit rectifiée au plus vite, car à elle seule, elle annule des années de travail de l’ensemble des acteurs qui y sont participé".


ELLER Lubrifiants : "Préserver l’existence de notre unité de production"

Le gérant de la société Eller Lubrifiants, Dominique Rio, a lui aussi demandé une exonération de l’octroi de mer qui lui a été refusée par la Direction générale des douanes.
"Ma société est exonérée d’octroi de mer au taux de 6,5% (4,5 + 2) pour ma production de lubrifiants. Le décret d’application de la loi sur l’octroi de mer taxe les emballages que j’importe au taux de 18% (16 + 2) ; il s’agit de fûts métalliques et de seaux de 20 litres en polypropylène", précise M. Rio.
Il fait remarquer par ailleurs que "compte-tenu de l’importance des emballages dans notre prix de revient et du taux élevé de cette taxation, cette décision des douanes réduit de 50% le faible différentiel qui existe en faveur de la production locale, la mettant en péril".
Pour le gérant de la société, "cette nouvelle décision aggrave un peu plus notre situation fiscale antérieure qui ne nous permet pas de récupérer la TVA versée sur nos achats et nos charges (exonération des produits pétroliers de l’article 295 du code des impôts)".
Pour ces raisons et pour "préserver l’existence de notre unité de production qui existe malgré un marché ouvert (octroi de mer à 4,5%), une haute intensité concurrentielle et une situation fiscale défavorable", il demande que ces emballages (fûts métalliques de 300 litres et emballages en polypropylène de 20 litres), pour lesquels il n’existe "aucune production locale", soient taxés à 0%.

Octroi de mer

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