Préparation du budget 2006 français

Des nouveautés pour l’Outre-mer ?

28 septembre 2005

La France entre dans la phase active de préparation de son budget pour 2006. Celui-ci sera présenté aujourd’hui en Conseil des ministres. Il sera marqué à la fois par la prévision d’un faible taux de croissance, par la nécessité de réduire un important déficit public et par la préparation de la réforme fiscale qui entrera en vigueur en 2007. Poussé par l’aile libérale de la majorité, le gouvernement pourrait revoir certains dispositifs outre-mer (abattement de 30% de l’impôt sur le revenu, indexation des salaires et des retraites dans la fonction publique, TVA remboursée mais non-acquittée, etc.).

C’est aujourd’hui que Dominique de Villepin et son ministre de l’Économie, Thierry Breton, présenteront en Conseil des ministres le projet de budget 2006 de la Nation. Ainsi sera ouverte une longue procédure qui s’achèvera à la fin de l’année et au cours de laquelle députés et sénateurs seront appelés à débattre et à adopter le projet de dépenses et de recettes pour l’année prochaine.

3 éléments clés

Ce budget est placé sous le signe de 3 éléments clés.
Quel sera le taux de croissance en 2006 ? Plus il sera élevé, plus les productions de richesses seront importantes et plus les recettes fiscales seront significatives. Les experts restent extrêmement prudents et estiment que la France aura du mal à dépasser la barre des 2,5% voire même des 2%. Pour sa part, Thierry Breton espère mieux : "nous avons besoin de viser pour l’année à venir au moins 3 à 4%", vient-il de déclarer.
Deuxième élément : le niveau du déficit public. La France s’est engagée à respecter les contraintes européennes dites de Maastricht, c’est-à-dire le maintien de son déficit public (celui cumulé de l’État, des collectivités et de la Sécurité sociale) sous la barre des 3% du PIB. Pourra-t-elle le faire alors que la branche maladie de la Sécurité sociale, par exemple, terminera l’année 2005 sur un déficit de 8,3 à 8,4 milliards d’euros ?
Or, le gouvernement a annoncé des priorités - comme la lutte contre le chômage avec de nouveaux allégements de charge pour les entreprises, et la réforme de la taxe professionnelle - dont il lui faudra trouver le financement. Comment s’y prendra-t-il ?

Outre-mer : la chasse aux “niches fiscales” ?

Par ailleurs, la préparation du budget 2006 se placera sous le signe de la réforme fiscale bien que celle-ci ne prendra effet qu’en 2007.
On connaît le principe essentiel du projet gouvernemental : réduire les tranches d’imposition en les faisant passer de 7 à 5.
Une autre proposition contenue dans le projet de réforme, à peine avait-elle été annoncée qu’elle a levé l’inquiétude Outre-mer. En proposant de plafonner les réductions d’impôt dont bénéficient certains contribuables à 8.000 euros, plus 750 euros par personne à charge, la défiscalisation des investissements réalisés dans les DOM-TOM pouvait être menacée. Après de multiples interventions auprès du gouvernement, il semblerait que ce droit à des réductions d’impôt ne devrait pas être soumis au plafonnement. Mais rien n’est définitif. Car au sein même de la majorité, des voix s’élèvent pour manifester du scepticisme. Il y a quelques mois, Henri Torre, rapporteur spécial de la Commission des Finances du Sénat sur le budget, faisait remarquer que ladite défiscalisation s’élevait à 2 milliards d’euros. Il s’interrogeait quant à son efficacité réelle pour l’Outre-mer (1) .
Cette proposition gouvernementale rentre dans une démarche plus globale visant à réduire le nombre de “niches fiscales” que comporte la fiscalité française et qui a tendance à se multiplier.
Outre-mer, la défiscalisation sur les investissements n’est pas la seule “niche fiscale” existante. Parmi les autres spécificités, on peut citer l’abattement de 30% de l’impôt sur le revenu ou encore le système complexe et contesté dit de la TVA remboursée non-acquittée. Il permet à une société achetant un produit venant de l’extérieur d’être remboursée de la TVA alors même qu’elle ne l’a pas payée.
Mais au-delà de ces dispositions fiscales, l’Outre-mer recense plusieurs dispositifs spécifiques. Ils font régulièrement l’objet de contestation et de tentatives de remises en cause. Il s’agit, bien entendu, de l’indexation des salaires des agents de la fonction publique ainsi que la valorisation, dans certains territoires ultra-marins, des pensions de retraites de fonctionnaires. Il faut y ajouter le système de congés bonifiés appliqués aux natifs de l’Outre-mer travaillant dans le service public ou parapublic en Métropole.
Au nom de la recherche d’une plus grande justice sociale, depuis 2002, l’aile ultra-libérale de la majorité UMP/UDF a manifesté à plusieurs reprises sa volonté de remettre en cause toutes ces spécificités. Après des tentatives avortées menées en 2002 et 2003 et une pause en 2004, ces ultra-libéraux ont repris leur offensive au début de cette année.

Un affrontement entre chiraquiens et sarkozystes ?

Rappelons que le 5 avril dernier, à la surprise générale, Mme Brigitte Girardin, alors ministre de l’Outre-mer, était auditionnée par des sénateurs de la majorité, l’interpellant directement sur les suites qu’elle comptait donner au rapport Laffineur. Rédigé en septembre 2003, ce document recense toutes les spécificités ultra-marines et évalue leur coût pour le budget national.
Au cours de cette audition, M. Jean Arthuis, ancien ministre et président de la Commission des Finances du Sénat, expliquait que le moment était "désormais venu d’aborder à nouveau cette question sensible".
Si l’offensive de ces parlementaires porte en premier lieu sur le système bonifié des pensions de retraite outre-mer - système dénoncé notamment par la Cour des comptes -, l’intention de ces réformateurs est bien d’aller au-delà et de remettre en cause l’ensemble des dispositions spéciales ultra-marines dont le coût total pour le budget a été estimé par M. Laffineur à 2,4 milliards d’euros.
Lors de l’audition du 5 avril dernier, répondant à ses interlocuteurs, Mme Brigitte Girardin soulignait l’importance des questions abordées. Elle estimait qu’au-delà des seuls aspects techniques et méthodologiques, la dimension politique du problème justifierait qu’il fasse l’objet d’engagements de la part des futurs candidats à la prochaine élection présidentielle.
On se demandait alors qui ces propos visaient. Indirectement, n’était-ce pas Nicolas Sarkozy qui était ainsi sollicité ? L’actuel ministre de l’Intérieur, lors de son passage au Ministère des Finances et du budget, avait relancé l’idée de s’attaquer aux “niches fiscales” pour faire faire à l’État des économies. Avant lui, un de ses bras droits, Pierre Méhaignerie, vice-président de l’UMP et président de la Commission des Finances de l’Assemblée nationale, avait, dans une tribune publiée par “Le Monde”, lancé l’idée de remettre en cause les niches fiscales outre-mer et d’utiliser les économies réalisées pour le financement de ZEP dans les banlieues françaises. La bataille autour de la suppression des “niches fiscales” et autres spécificités domiennes serait-elle un des terrains de l’affrontement entre sarkozystes et chiraquiens ?

J. M.

(1) Cf. audition de Mme Girardin, le 5 avril 2005, par les Commissions des Finances et des Affaires sociales du Sénat.


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