Une étrange communication du gouvernement

Egalité réelle : les Réunionnais tenus à l’écart de leur avenir

20 août 2016, par Manuel Marchal

Le projet de loi sur l’égalité réelle engage l’avenir de La Réunion et des Réunionnais pour les 20 ans à venir. Mais pour le moment, le gouvernement n’a pas pris d’initiative pour que le débat s’engage avec les personnes concernées, c’est-à-dire l’ensemble des Réunionnais. C’est pourquoi le PCR demande au gouvernement d’adresser à tous les Réunionnais le texte du projet de loi et les contributions écrites des organisations politiques qui ont présenté des propositions.

Près de la moitié des Réunionnais vivent dans la grande pauvreté, comment pourront-ils participer à la concertation organisée par le gouvernement. (photo Toniox)

Dans un communiqué diffusé le 18 août, la Préfecture de La Réunion annonce notamment qu’« une grande campagne de consultation participative est ouverte jusqu’au 9 septembre 2016 sur la plateforme https://egalite-reelle-outre-mer.fr. Elle permettra à chacun de proposer sa définition de l’égalité réelle et d’avancer des propositions qui permettront d’enrichir le texte de loi. C’est la première fois que l’ensemble des concitoyens ultramarins sont consultés au même moment, sur un même sujet autre que celui d’une élection. »

La date butoir pour faire parvenir les contributions est fixée au 9 septembre. Entre la publication du communiqué et la fin de la consultation, il s’écoulera donc 22 jours.

La démocratie participative selon le gouvernement…

Tout d’abord, cette méthode de communication amène à s’interroger sur plusieurs plans. Concernant le support de la consultation, il est en service depuis le 3 août, soit le jour de la présentation du projet de loi sur l’égalité réelle en Conseil des ministres. Cela fait donc deux semaines qu’il est possible de déposer des propositions et de consulter le projet de loi, mais à condition d’avoir accès à Internet, de savoir utiliser cet outil et d’être au courant de son existence. Manifestement, les médias à La Réunion ont suivi le calendrier du gouvernement, en n’informant seulement hier, pour la presse écrite, de l’existence de ce site. Pour sa part, le PCR a mis en ligne sur ce site le 10 août les remarques qu’il avait adressées au Conseil économique social et environnemental, ainsi que la suite de sa critique dans un second envoi hier. Le PCR a pour tradition de faire des propositions écrites et de les assumer, il est donc logique qu’il ait utilisé ce canal pour les faire connaître malgré toutes les réserves que l’on peut émettre au sujet de cette manière de consulter.

Le site egalite-reelle-outre-mer.fr fait également apparaître quelques centaines de contributeurs, dont le ministère des l’Outre-mer. Il est à noter que ce dernier a posté 137 contributions toutes datées du 2 août, c’est-à-dire avant qu’il ne soit possible de présenter des propositions. Cette manière de faire visait sans doute à déjà orienter le débat. En tout cas, la maîtrise de l’outil a permis à Paris d’avoir un coup d’avance.

Pourquoi pas de consultation depuis mai 2015 ?

Mais si la méthode du gouvernement est décrite comme une démocratie participative, elle laisse la plupart des personnes concernées sur le bord du chemin, mais n’est-ce pas la but recherché ?

Il est également à noter que le site egalite-reelle-outre-mer.fr présente le projet de loi qui est déposé à l’Assemblée nationale. Le texte est donc déjà écrit avant que la consultation ne débute. Selon la loi, il ne peut donc plus être modifié que par les parlementaires et le gouvernement.

Pourtant, ce projet de loi est annoncé depuis déjà plus d’un an. En mai 2015 en Guadeloupe, François Hollande avait annoncé son intention de présenter un texte ayant pour but l’égalité réelle entre la France et l’Outre-mer. Il avait missionné un parlementaire pour animer le débat auprès des partis politiques et des élus. Le PCR avait donné suite et présenté sa contribution au débat, tout comme le sénateur Paul Vergès. Mis à part Thierry Robert, les autres parlementaires se sont tus. Même silence de la part des partis politiques à l’exception du PCR. Dans ces conditions, comme accorder du crédit au réveil possible de ces élus quand les caméras de télévision vont se braquer sur l’Assemblée nationale et le Sénat à l’occasion de l’examen du projet de loi ?

Entre l’annonce du président de la République et le passage en Conseil des ministres, il s’est écoulé plus d’un an. C’était largement suffisant pour lancer un débat faisant honneur à la démocratie participative, et pas seulement sur Internet, et cela avant de rédiger le projet de loi. Mais l’option choisie a été de maintenir la population à l’écart, alors que le gouvernement affirme que ce projet de loi n’est rien moins que le texte le plus important depuis la loi du 19 mars 1946, qui a fait changer le statut de La Réunion, de la Guadeloupe, de la Guyane et de la Martinique.

Propositions du PCR pour que la population soit informée

Compte tenu de l’importante portée de ce texte, le Parti communiste réunionnais a demandé au gouvernement de créer les conditions pour que les Réunionnais soient les mieux informés. Il a fait pour cela des propositions remises à la ministre des Outre-mer par courrier, et présentées à la presse le 10 août.

- Transmettre à tous les électrices et électeurs Réunionnais le projet de loi présenté en Conseil des Ministres.

- Compléter cet envoi par les contributions des Réunionnais (Elus-es, société civile, partis politiques, collectivités locales).

- Organiser des débats avec le concours du service public audio-visuel pour donner la parole à toutes celles et tous ceux qui ont manifesté, par une contribution écrite, de l’intérêt au projet de loi.

Ces propositions visent à donner les moyens à la population de s’emparer du débat sur son avenir. Car comment construire La Réunion des 20 ans qui viennent sans les Réunionnais ?

M.M.

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