Réunion de l’UMP ce dimanche

Extrémistes contre républicains : l’heure du choix

11 décembre 2009, par Geoffroy Géraud-Legros

Face au débordement des républicains par la frange « ultra », une incertitude pèse sur l’issue de la réunion de dimanche. Qui de l’UMP ou d’Objectif Réunion gardera la Direction ?

On connaît le dicton selon lequel le silence est d’or. Il peut aussi être de plomb. Et c’est bien une chape de plomb qui semble recouvrir la préparation de la rencontre, qui, après un report en catastrophe la semaine dernière, se tiendra finalement ce week-end. Une telle discrétion surprend, à l’approche de l’important rendez-vous des Régionales. Elle laisse encore plus perplexe, tant elle contraste avec l’omniprésence des parlementaires de cette formation politique il y a quelques semaines encore. Certes, le camouflet subi par ces derniers dans l’affaire du Tram-train n’est pas étranger à ce mutisme subit. Certes, le tandem Robert-Virapoullé a été étourdi par le soutien exprimé au Tram-train par François Fillon le jour même où ces derniers espéraient abattre le projet. Il se dit d’ailleurs dans les couloirs de la Mairie du Tampon que les petits fours et le champagne destinés à fêter une « victoire » annoncée ont été remballés en attendant des jours meilleurs.
Au-delà de cette défaite dans la bataille du rail, le silence qui succède aux outrances d’Objectif Réunion recouvre une réalité ancrée dans le jeu politique réunionnais : celle de l’affrontement entre deux courants idéologiques, dont les buts et les moyens apparaissent de jour en jour moins conciliables.

“Ultras” contre républicains

L’absence d’extrême-droite organisée et indépendante est l’une des différences les plus notables entre le champ politique réunionnais et celui de l’Hexagone. Depuis l’échec qui a suivi l’adhésion au Front national de Jean Fontaine, alors député-maire de Saint-Louis, en 1984, les extrémistes locaux ne se sont plus aventurés à abandonner les étiquettes des grands partis de la vie républicaine. Conséquence : certains des partis identifiés à des grandes formations nationales dans notre pays ont toujours dû compter avec une frange “ultra”, que ses méthodes et son idéologie rapprochent bien plus d’une extrême-droite classique de type Front national que de la droite ou du centre républicains. Les périodes de fortes oppositions idéologiques — dont la Guerre froide — rendaient impossible une dissociation véritable des deux courants. Néanmoins, ceux-ci apparaissent aujourd’hui de plus en plus clairement opposés à l’épreuve de la pratique politique.
En effet, l’évolution des rapports entre les autorités centrales et les Réunionnais dans le cadre de la République décentralisée tend par elle-même à marginaliser le comportement des “ultras”. D’autre part, face à l’urgence du développement, on observe à La Réunion même des convergences entre des forces sociales autrefois opposées. Tout concourt donc aujourd’hui à marginaliser la tendance “ultra”… qui n’en réagit que plus violemment, attaquant radicalement l’ensemble des projets portés par le partenariat institutionnel. On a vu, avant la tentative de casse du Tram-train, l’annulation pure et simple par Didier Robert de la construction de la rocade du Tampon, au moment ultime de l’ordre de service donné aux entreprises.

Le partenariat institutionnel pour cible

Contradiction majeure créée par l’activisme des “ultra” : une rupture de plus en plus visible avec les orientations du Gouvernement à propos des projets de développement élaborés à La Réunion et validés par l’Exécutif… à laquelle la commune étiquette UMP ne change rien. Le refus du partenariat institutionnel est au fondement de l’opposition de la guerre de tranchée que mènent les “ultras” à La Réunion, derrière l’unité apparente du label “UMP”. Les effets directs ou collatéraux de cette fronde contre Paris peuvent prendre des formes particulièrement violentes, où se révèle leur nature politique véritable. On se souvient ainsi des blocus par la force de l’institution régionale dont le dernier en date, organisé lors de la visite du Premier ministre, finit par l’affichage de banderoles porteuses de slogans ouvertement fascistes (« tous les élus sont des rats »), et de caricatures que n’aurait pas reniées la propagande vichyste. L’activisme des ultras a atteint un point tel que le président de la République a dû lui-même y mettre bon ordre, précisant solennellement lors de la restitution des Etats généraux de l’Outre-mer qu’il ne tolèrerait pas d’atteinte aux autorités élues.
Parallèlement à ces tentatives de coups de force, c’est par le biais de réseaux que les “ultras” ont attaqué les projets du partenariat institutionnel : on a ainsi assisté à la multiplication des tentatives de manipuler, d’orienter et d’encadrer des représentants du Gouvernement lors de leurs visites dans notre île. Dernière manœuvre en date, le piège tendu il y a trois semaines à Marie-Luce Penchard, à l’issue de laquelle les “ultras” nourrirent l’illusion de donner un coup d’arrêt au Tram-train.

Un choix décisif

L’intensité de cet antagonisme au sein de l’UMP fait du rassemblement de dimanche un moment déterminant pour l’orientation future de cette formation à La Réunion. Car si les manipulations des “ultras” occupent l’espace médiatique, la tendance républicaine a su montrer récemment — et non sans courage — qu’elle savait se rallier aux projets d’intérêt général. Le choix décisif est donc posé entre, d’une part, une Direction politique qui fait fonction d’extrême-droite, et s’acharne contre le partenariat institutionnel… et, d’autre part, le courant républicain respectueux des règles de la démocratie. L’hypothèse d’une victoire du courant “ultra” fait craindre l’implosion pure et simple de l’UMP réunionnaise : le clivage entre les deux courants atteint un niveau de dureté telle, qu’il est de moins en moins possible d’imaginer la cohabitation les deux tendances au sein de la même structure. Pour l’heure, Didier Robert, après avoir créé Objectif Réunion, a obtenu le soutien de Cyrille Hamilcaro… qu’il a récemment embauché au Tampon. Pourra-t-il, fort de cet appoint, prendre la tête de l’UMP ? Sa détermination ne fait plus aucun doute, après l’éviction du Saint-pierrois Roland Hoarau, “coupable” d’avoir soutenu un projet gouvernemental… suite logique du boycott des Etats-généraux que le même Didier Robert avait imposé à son camp, sous peine de radiation de la liste des candidats aux Régionales.

Geoffroy Géraud

A la Une de l’actuDidier Robert

Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?

Messages

  • Très juste analyse.

    Il faut souligner que ces "ultras" disposent de certains médias à leur disposition, qui ne font pas dans la dentelle, notamment un "blog" ultra populiste, démagogue et diffamant, qui vient soi disant de fêter son millionième visiteur. Sur ce blog figurent notamment des appels récurents à la délation d’autrui, ainsi que de véritables appels aux meurtres d’élus de la république.


Témoignages - 80e année


+ Lus