Conséquence d’un système à bout de souffle

Hausse des prix : vers une nouvelle aggravation de la situation

9 mars 2011, par Céline Tabou

Avec la crise en Afrique du Nord, les observateurs scrutent le marché du baril et tentent d’anticiper une future hausse du prix du pétrole. Dans le système actuel, toute hausse aura des conséquences directes sur la vie des Réunionnais avec une baisse du pouvoir d’achat. Car il est possible pour les compagnies pétrolières de maintenir leurs marges et de faire payer intégralement aux Réunionnais l’augmentation du coût de la matière première.

Dans un rapport, publié en 2009, l’Autorité de la concurrence avait émis un avis sur la marge octroyée par les compagnies pétrolières, et les conséquences sur les consommateurs. En effet, les marges de distribution ont évolué de plus de 98% de 2001 à 2009 pour les marges de gros, et de plus de 60% pour les marges au détail, soit une moyenne pondérée de plus de 77% à La Réunion sur neuf années.
Aujourd’hui, prétextant des conflits en Afrique du Nord et au Moyen Orient, les compagnies pétrolières souhaitent augmenter le prix de l’essence à la pompe afin de compenser la hausse du prix du baril de pétrole. Cependant, les différentes compagnies pétrolières présentes à La Réunion pourraient rogner sur leur marge, afin d’éviter aux consommateurs de payer plein pot, une crise pétrolière qui aurait pu être anticipée. En pleine crise, un effort peut être fait.
En effet, comme l’a expliqué Philippe Jean-Pierre, dans un article publié par Imaz Press Réunion, « des facteurs structurels » participent à la hausse des prix, et pas seulement les conflits internationaux.
Dans son rapport, l’Autorité de la concurrence avait proposé de « réformer en profondeur le système actuel en formalisant des objectifs de politique publique et une stratégie à moyen terme ». En clair, à des facteurs structurels qui tirent les prix vers le haut, l’Autorité propose de changer la structure de la formation du prix à La Réunion.
Cette réforme du système passerait par le renforcement de « la régulation en amont pour mieux encadrer les monopoles et garantir des approvisionnements au meilleur prix », l’assouplissement de « la régulation de détail en passant d’une fixation administrative des prix à un contrôle administratif avec plafonnement en cas de dérive des marges », et la mise en place d’une « période d’expérimentation de trois ans, afin d’observer les évolutions réelles du marché et procéder aux ajustements nécessaires ». Tout cela n’a pas été pris en compte par l’administration, car la formation du prix en amont est toujours aussi opaque. Cet amont couvre l’extraction du pétrole, le raffinage, le transport et la rémunération de tous les intermédiaires jusqu’à l’arrivée sur le quai du port. C’est payer sans droit de savoir.
Comme l’a annoncé le rapport de l’Autorité de la concurrence, il existe des alternatives afin d’éviter aux consommateurs de payer les hausses du prix du baril. Cela passe par une réforme structurelle urgente à engager.
Mais dans l’immédiat, les compagnies pétrolières auront-elles un geste de solidarité en cette période difficile ? Ou le représentant de l’État arrivera-t-il à imposer cette solidarité ?

Céline Tabou


Pourquoi augmenter les prix ?

Dans un communiqué publié le 25 février 2011, la préfecture de La Réunion a annoncé que face aux « fortes tensions sur le marché du pétrole, dues aux évènements actuels qui bouleversent certains pays producteurs », le prix de vente des hydrocarbures à compter du 1er mars 2011 devrait tenir compte d’« une évolution défavorable des cours et des prix au cours des prochaines périodes ». Cette mise en garde anticipe une hausse prochaine. Or, ce n’est pas la seule solution, car à La Réunion c’est le représentant de l’État qui fixe le prix de vente maximal. Il a donc le pouvoir de réduire les marges des compagnies pétrolières pour préserver le pouvoir d’achat des Réunionnais. N’oublions pas que le prix du carburant intervient dans la composition du prix de toutes les marchandises vendues dans notre île. De plus, la situation actuelle est d’une gravité sans précédent : 52% de Réunionnais vivant sous le seuil de pauvreté, 28,9% de chômage, 55% des jeunes sans emploi, hausse des prix des produits alimentaires. Face à cette situation d’exception, le préfet pourrait-il convenir d’un prix en accord avec les conditions économiques et sociales de la population de La Réunion ?

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