Forum régional des acteurs de la rénovation urbaine dans l’Océan Indien

L’humain au cœur de la politique de la Ville

20 octobre 2007, par Manuel Marchal

Deux jours de débats autour du thème de la rénovation urbaine se sont conclus hier par l’intervention de Fadela Amara, Secrétaire d’État à la Politique de la Ville, et par la signature des conventions et protocoles ANRU du Port, Saint-André, Saint-Denis et Saint-Pierre. Lors d’une table-ronde, les participants ont évoqué les enjeux de la conduite de ce type de projet. Une certitude, la rénovation urbaine ne peut être se faire sans une concertation préalable avec les habitants des quartiers concernés. Cette démarche, initiée à La Réunion par la Ville du Port depuis plus de 30 ans à l’occasion des différentes opérations de résorption de l’habitat insalubre, est au cœur de la politique que le gouvernement met en œuvre à l’échelle nationale.

« L’avenir des quartiers prioritaires passera par ses habitants ». Lors de la conclusion du Forum régional des acteurs de la rénovation urbaine dans l’Océan Indien, Fadela Amara, Secrétaire d’État à la Politique de la Ville, a affirmé le cœur de la démarche du "Plan Marshall" pour les quartiers que veut mettre en place le Président de la République.
33 milliards d’euros investis dont 12 milliards financés par l’Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU). C’est, selon Philippe Van de Maele, Directeur général de l’ANRU, une des lignes budgétaires les plus importantes de l’État. À La Réunion, 4 communes sont concernées par des dispositifs de rénovation urbaine co-financées par l’ANRU : Le Port, Saint-André, Saint-Denis et Saint-Pierre. Le montant total des investissements s’élève à 230 millions d’euros (voir encadré).

« Culture de l’aménagement dans notre commune »

Lors de la table-ronde précédant la conclusion du Forum, il a été particulièrement question de l’action située sur le territoire de la Ville du Port : 346 constructions de logements, 72 réhabilitations, 91 améliorations et 179 démolitions dans les Quartiers Lépervanche, Raymond Vergès et Voie Triomphale, indique Véronique Douyère, Directrice générale de la SHLMR, le tout dans la commune ayant la plus faible superficie : 16 kilomètres carrés dont 40% sont consacrés aux activités portuaires et économiques, précise Jean-Yves Langenier, Maire du Port.
Ce dernier souligne que l’opération de rénovation urbaine conventionnée hier s’inscrit dans une « culture de l’aménagement dans notre commune ». Jean-Yves Langenier revient sur l’origine de cette politique : la délibération de décembre 1971 votée sous la première mandature de Paul Vergès. « C’est la délibération la plus importante pour la Ville du Port », elle comportait un schéma d’aménagement et des objectifs : réduction de l’insalubrité, construction des équipements publics (écoles...). Conséquence de cette délibération : la préemption systématique de la commune lors de chaque vente de terrain sur son territoire. Résultat : les deux tiers du foncier de la commune appartiennent à la puissance publique. Cette rénovation ANRU s’inscrit dans le projet de ville, et elle va à nouveau recourir à une méthode qui fait ses preuves depuis des décennies au Port : la concertation préalable avec les habitants concernés.

Une voix réunionnaise à faire entendre

Le maire de la cité maritime a également souligné que cette réhabilitation va s’accompagner d’efforts financiers de la part des familles concernées. Véronique Douyère abonde dans ce sens, indiquant qu’une des principales difficultés de ce type d’opération est le loyer restant à la charge du locataire.
Jean-Yves Langenier note que depuis la construction de ces quartiers, les normes ont évolué en termes de qualité. Par ailleurs, ces nouveaux logements seront équipés de chauffe-eau solaires et d’autres dispositifs d’économies d’énergie qui sont autant de réductions de dépenses pour les familles. C’est l’intégration de cette opération dans le projet "Le Port, Ville solaire".
Au-delà du logement, la rénovation urbaine est aussi un service pour la cohésion sociale. C’est ce qu’a rappelé dans son discours Fadela Amara.
Présentant le "Plan Marshall" pour les quartiers que souhaite engager le président de la République, la secrétaire d’État indique que « les Réunionnais ont une voix à faire entendre ». Et elle compte prendre en compte les propositions de l’Outre-mer dans la construction des orientations de la Politique de la Ville que le gouvernement mettra en œuvre. Ces orientations émergeront des 230 rencontres territoriales prévues jusqu’à fin novembre, avant d’être débattues lors d’une grande conférence associative au début de l’année prochaine. Fadela Amara souhaite que cette « grande expression populaire » puisse être l’occasion de rendre la politique de la Ville plus efficace.

Manuel Marchal


Un "Plan Marshall" pour les quartiers

Philippe Van de Maele, Directeur général de l’ANRU, souligne toute l’importance de la concertation préalable, ainsi que le poids des investissements publics, notamment 12 milliards d’euros pour l’ANRU. « Une dynamique s’est créée, il faut en profiter pour renforcer les actions sociales ».
Cet aspect a été particulièrement mis en évidence par Fadela Amara. La qualité de tout projet de Ville est « le fort lien entre l’urbain et l’humain ».
Cela signifie « remettre l’humain au cœur de la politique de la Ville » avec pour conséquence cette affirmation : « l’avenir des quartiers prioritaires passera pas ses habitants ».
La secrétaire d’État à la Politique de la Ville a ensuite décliné le "Plan Marshall" pour les quartiers que veut engager le président de la République.
C’est tout d’abord favoriser l’accès à l’emploi. Cela passe par « convaincre les entreprises qu’elles gagnent à embaucher ces jeunes qui ont un potentiel ».
Deuxième volet : le désenclavement. Il s’agit de « casser l’enfermement des quartiers ».
Troisième point : l’éducation. C’est un aspect essentiel. Cela concerne des mesures dans la formation initiale, l’éducation au respect et une plus grande implication des parents.


Plus de 230 millions d’investissement à La Réunion

Voici le détail des 4 conventions signées hier par les maires et Fadela Amara.

• Convention globale du Port (Quartiers Lépervanche, Vergès et Voie Triomphale)
Montant des travaux : 70,7 millions d’euros / Montant de l’aide ANRU+Etat : 24,1 millions d’euros

• Protocole de préfiguration de Saint-Denis
Montant des travaux : 15,5 millions d’euros / Montant de l’aide ANRU+Etat : 3,7 millions d’euros

• Protocole de préfiguration de Saint-André
Montant des travaux : 26 millions d’euros / Montant de l’aide ANRU+Etat : 11 millions d’euros

• Convention globale de Saint-Pierre (Ravine Blanche)
Montant des travaux : 120,2 millions d’euros / Montant de l’aide ANRU+Etat : 27,2 millions d’euros


Le financement du logement social : maillon faible des opérations ANRU

Les problèmes de financement du logement social sont identifiés comme le maillon faible des dispositifs de rénovation urbaine. Selon un représentant du ministère du Logement, plusieurs mesures ont été prises l’an dernier pour améliorer la situation. C’est tout d’abord l’extension à l’Outre-mer du volet logement du Plan de cohésion sociale : 37.500 logements dans les DOM et à Mayotte sont inscrits dans une programmation pluriannuelle. C’est ensuite le droit opposable au logement qui entre en vigueur à partir du 1er janvier prochain. Tout ceci oblige à construire davantage de logements sociaux.
Mais pour le ministère du Logement, l’argent de l’État ne suffit pas, l’importance du partenariat avec d’autres financeurs est essentielle.
Parmi les pistes abordées pour tenter de débloquer la situation, figure une plus fréquente utilisation du "1% logement". La possibilité inscrite dans l’avant-projet de la future loi-programme de réorienter une partie de la défiscalisation vers le logement social est aussi évoquée, ceci afin de réduire la pression sur le foncier, et aussi pour relancer l’intérêt des entreprises du BTP vers le logement social. Enfin, une modification des paramètres du financement est à l’étude. Elle vise à aller vers un financement sélectif, en concentrant les dotations vers les opérations les plus difficiles à mener.
Nicolas Gigot, Directeur général des services de la commune de Garges les Gonnesse, souligne le rôle pionnier des opérations ANRU. Selon lui, ces dernières préfigurent « l’évolution des politiques publiques ». Elles amènent à une rationalisation des méthodes, à d’autres manières de travailler que la directrice générale de la SHLMR n’hésite pas à comparer à « une révolution culturelle ». Pour Nicolas Gigot, la perspective est à une raréfaction des crédits de l’État. Les opérations ANRU permettent donc d’expérimenter de nouvelles pratiques qui permettront de s’adapter à cette tendance.


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