Pas de prise en compte des spécificités

L’Outre-mer va couler à pic

15 mai 2004

Le gouvernement s’en est tenu à son projet, rejetant tous les amendements - dont celui co-signé par le député Christophe Payet, sur une prise en compte des spécificités d’outre-mer. Résultat : on va couler à pic !

Comme il fallait s’y attendre, le débat fut musclé à l’Assemblée nationale sur le projet de loi du gouvernement sur l’autonomie financière des collectivités locales. À tel point que les députés ont dû poursuivre jusque dans les premières heures de vendredi l’examen de ce projet de loi organique.
Non seulement ce texte ne prend pas en compte les “spécificités” des collectivités d’outre-mer, mais en plus la notion de “ressources propres” n’est toujours pas plus clairement précisée. Et le désaccord sur la définition du vocable transcendait le traditionnel clivage droite/gauche, des députés de la majorité demandant, comme l’opposition, que seuls les impôts, dont les collectivités fixent elles-mêmes le taux et l’assiette, soient pris en considération. En cela, ils sont soutenus par l’Association des maires de France, l’Association des maires des grandes villes de France et d’autres encore.
La TIPP (taxe intérieure sur les produits pétroliers) fut aussi au cœur des débats et l’on peut souligner que le texte du gouvernement est mal ficelé. Jean-François Copé l’indiquait lui-même : le gouvernement a "engagé une démarche de dérogation" auprès de Bruxelles afin que "les régions puissent faire varier les taux de TIPP", dont une partie doit financer les futures compétences transférées aux collectivités. Même si cela ne nous concerne pas directement, notons que le projet gouvernemental n’est pas, en l’état actuel, de nature à apaiser toutes les craintes, puisque l’une des conséquences n’est pas encore validée par l’Europe...
Pas plus que les réponses faites au sujet de la péréquation n’ont permis de lever quelques doutes. En effet, la péréquation, destinée à favoriser l’égalité entre les collectivités, est certes prévue par la Constitution mais elle ne fait pas partie de ce texte de loi, Jean-François Copé ayant indiqué qu’elle serait "un des axes forts de la prochaine réforme des dotations prévue pour 2005".
Une réforme qui laisse aussi craindre le pire. Non seulement parce que les dotations de péréquation jusqu’ici versées ne sont pas à la hauteur de ce que l’on peut en attendre (voir “Témoignages d’hier) , mais si en plus, cela passe sous les mains de Sarkozy, qui veut à tout prix faire des économies, on peut s’attendre à ce que ces dotations soient elles aussi revues à la baisse.

“Malvenu”

Enfin, élément soulevé par Christophe Payet, l’outre-mer connaît des spécificités : "L’architecture des recettes étant très sensiblement différente outre-mer de ce qu’elle est en métropole et la dépendance vis-à-vis des dotations d’État y étant beaucoup plus forte, nous proposons, par l’amendement 148, de créer une catégorie spécifique. Cela éviterait également de faire baisser inutilement le seuil de l’autonomie financière de toute leur catégorie actuelle. Enfin, au moment où le gouvernement et l’ensemble de ces régions militent auprès des instances européennes pour une consolidation de leur statut de régions ultra-périphériques, ne pas prendre en compte leurs spécificités serait un mauvais signal envoyé à Bruxelles", déclarait-il lors des débats.
La réponse du rapporteur fut celle-ci : "Cet amendement pose une question pertinente mais la Commission l’a repoussé, d’une part, parce qu’il a été décidé de ne pas déterminer les catégories en fonction des structures financières des collectivités qui les composent, mais des compétences exercées ; d’autre part, parce qu’il serait malvenu de distinguer collectivités ultra-marines et métropolitaines alors que l’unité républicaine doit au contraire conduire à les réunir de manière exemplaire". L’avis était partagé par le ministre délégué, Jean-François Copé. Et c’est ainsi que l’amendement 148, mis aux voix, n’a pas été adopté.
Les spécificités de l’Outre-mer n’auront donc pas été reconnues par le gouvernement français, alors que l’Europe, elle, les reconnaît.
Toujours est-il que les députés devraient achever lundi l’examen, en première lecture, de ce texte qui sera soumis mardi au vote solennel de l’Assemblée.
Question : que vont faire les trois parlementaires UMP de La Réunion ?

D. B.


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