Politique :
U.M.P. : “Usurpation, Mascarade et Parodie”...

L’U.M.P. est-elle encore un parti à même de gouverner ?

28 avril 2004

Déclarations contradictoires, critiques envers le gouvernement, courses aux présidences, petites guerres entre ministres, stratégies personnelles et règlements de comptes internes... l’Union de la majorité présidentielle (U.M.P.) est-elle encore une organisation politique capable de diriger un État ?

La ligne de conduite de l’UMP relève plus de la mascarade que du projet politique. Chaque jour voit fleurir des propos contradictoires. Exemple : "Certaines injustices ne sont plus supportables". Une déclaration de la gauche ? Non, un “avertissement” de Jean-Louis Debré, le président UMP de l’Assemblée nationale qui a déclaré lundi : "il faut davantage de lisibilité dans l’action" du gouvernement, qui doit répondre à "toutes les urgences sociales. Je souhaite que le gouvernement hiérarchise mieux ses priorités. Il me paraît utile que le président s’adresse aux Français pour leur indiquer la direction et le sens des réformes engagées".
Il n’est pas le seul. Dans les couloirs de l’assemble, les députés “causent” : "Le gouvernement et l’UMP nous ont plantés. Fini le temps des godillots !" "Après les derniers événements, ils ne peuvent plus caporaliser les députés".
Et se positionnent, notamment sur le dossier de la décentralisation : "Tout le monde sait qu’il n’y aura plus de deuxième lecture. Si on change de Premier ministre dans trois mois, je le vois mal - le successeur de Jean-Pierre Raffarin - NDLR - faire le forcing pour un projet qui n’est pas le sien". "Le gouvernement n’a pas su faire savoir ce qu’il fait". "Le gouvernement est plutôt coupable de ne pas avoir fait assez de social. Pour les chercheurs, ça paraît stabilisé. Mais pour les chômeurs en fin de droits, les intermittents, il reste du travail".
"Les gens sont excédés par le maintien de Raffarin et le faux départ d’Alain Juppé. Ils rêvaient d’un parti efficace et ouvert, ils se retrouvent avec une machine à perdre, verrouillée de surcroît. Si rien ne change et que nous perdons les élections européennes, ce ne sera plus une fronde mais une révolution", analyse un haut responsable de l’UMP.

À peine voilé

François Baroin, secrétaire général délégué de l’UMP et principal inspirateur de la loi “sur la laïcité”, réagissait lundi à la publication du projet de circulaire rédigé par François Fillon, lequel avait expliqué que celle-ci pourrait encore être "modifiée après concertation" avant son examen par le Conseil supérieur de l’Éducation, le 6 mai. François Baroin expliquait lundi : "L’UMP est favorable à l’interdiction de tout couvre-chef, incluant le bandana, à l’intérieur des établissements scolaires publics".
Jeudi, c’est le ministre de l’Intérieur, Dominique de Villepin, qui croyait tenir une position "de bon sens" en suggérant "d’accepter le bandana discret".
En janvier, Luc Ferry, à l’époque ministre de l’Éducation nationale, avait invité les députés à "anticiper sur d’éventuels contournements de la loi" en envisageant, comme le suggère l’esprit de la loi, "l’interdiction de la barbe et du bandana".
Le vice-président du groupe UMP de l’Assemblée, Bernard Accoyer, avait aussitôt corrigé le ministre gaffeur : ces deux attributs étaient, assurait-il, "tout à fait en dehors du périmètre du projet gouvernemental".

Petite guerre interministérielle

La semaine dernière, c’est la question du budget qui a mis le feu aux poudres. Entre Michèle Alliot-Marie (Défense) et Nicolas Sarkozy (Budget), c’est la guerre ouverte, un "désaccord frontal".
“Libération” rapporte ainsi une anecdote illustrant “l’inimitié” existant entre les deux ministres : "Le 16 février, dans une caserne de la garde républicaine à Paris, la gendarmerie rendait hommage aux siens, “victimes du devoir”. Les deux ministres sont là : MAM parce que les gendarmes sont des militaires, Sarkozy puisque le ministre de l’Intérieur en dispose “pour emploi”. Comme ils doivent passer les troupes en revue ensemble, MAM a pris soin de mettre des chaussures à talon, pour dominer Sarkozy d’une bonne tête...".
Bonjour l’ambiance...

Course à la présidence de l’U.M.P. ...

Il y a également la course à la présidence de l’UMP : Nicolas Sarkozy pourrait être candidat à ce poste "si c’est nécessaire", déclarait dimanche le ministre délégué à l’Industrie, Patrick Devedjian, pour qui le ministre de l’Économie "ferait un bon président. Son dynamisme, sa force de conviction ne peuvent qu’aider l’UMP, qui a quand même eu quelques revers dans la dernière bataille électorale. Un surcroît d’énergie ne peut pas lui faire de mal".
Il aura en face de lui François Baroin, le “candidat Chirac”. "Je veux un parti qui tire sans faux-semblant les leçons de sa défaite, organise sa diversité mais pas contre quelqu’un, affiche un soutien loyal et exigeant vis-à-vis du gouvernement", assure François Baroin. Pour l’heure, il préfère s’en tenir à ces grands principes. "Il fait jeune communiant, mais n’a rien d’un enfant de chœur. Attention, il a déjà péché", sourit un député proche de Sarkozy.
Et Michèle Alliot-Marie pourrait bien, elle aussi, prendre part à cette course, au nom des chiraquiens... Jean-Claude Gaudin, pourrait compléter le trio anti-Sarko.
Mais cela pourrait ne pas suffire. En effet, Brice Hortefeux, député européen et fidèle parmi les fidèles de Sarkozy, a rappelé en début de semaine que "les militants souhaitent, dans leur immense majorité, que Nicolas Sarkozy s’implique davantage dans leur famille politique".

... et au groupe U.M.P. de l’Assemblée

Autre motif de rivalités au sein de la majorité gouvernementale : la course à la présidence du groupe UMP à l’Assemblée nationale. L’élection se fera le 4 mai. Il est tout à fait prévisible que l’on aille vers de nouveaux affrontements entre les différents courants de l’UMP.
Il s’agit de remplacer d’une part Jacques Barrot (qui succède à Michel Barnier comme commissaire européen à Bruxelles), et d’autre part un “questeur” (pour remplacer Henri Cuq, nommé ministre des relations avec le Parlement) et un vice-président (pour remplacer Marc-Philippe Daubresse, nommé secrétaire d’État au Logement). Avec comme arbitre de la rencontre : Jean-Pierre Raffarin, qui anime les réunions des groupes parlementaires.
Enfin, pour l’anecdote, cette information : Cécilia Sarkozy, l’épouse du ministre des Finances, a été officiellement nommée “conseillère technique" au cabinet de son époux, indique le “Journal officiel” de samedi. L’un des fils de Patrick Devedjian, Thomas Devedjian, devient également conseiller technique. Bien sûr, tout cela est parfaitement légal et conforme aux principes ; mais à l’UMP, certains n’apprécient pas, allant même jusqu’à parler de népotisme.
Au vu de cela - et c’est loin d’être complet -, avec ce marchandage, une question se pose : l’UMP est-elle encore un parti à même de gouverner ?

Dominique Besson


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