L’impuissance du cadre actuel à répondre à l’urgence sociale

La crise de l’emploi explose à nouveau

18 avril 2013, par Manuel Marchal

En moins de 48 heures, La Réunion a connu deux manifestations de jeunes liées au manque d’emplois. Mardi dans le quartier de Bellepierre à Saint-Denis, des jeunes ont bloqué la route et la nuit suivante dans la cité de la Palissade à Saint-Louis, d’autres ont affronté des policiers. Deux événements qui rappellent l’ampleur de la crise, et donc la nécessité d’une rupture avec toutes les politiques suivies jusqu’à présent.

Depuis samedi, la question de l’emploi est au centre de l’actualité. Ce jour-là, le ministre des Outre-mer a signé six contrats d’avenir lors de sa rencontre avec les acteurs économiques réunis à la Chambre des métiers. Les contrats d’avenir, c’est une des deux mesures phares choisies par le gouvernement pour lutter contre le chômage des jeunes, avec les contrats de génération.

Le soir même, le ministre installait officiellement Patrick Lebreton en tant que député en mission chargé de proposer des solutions pour favoriser l’emploi des Réunionnais à La Réunion.

Dimanche, le ministre des Outre-mer a de nouveau eu l’occasion de présenter les politiques publiques de l’emploi lors d’une conférence de presse organisée sur le plateau de Réunion Première.

Les moyens du cadre actuel

Lundi, c’est le préfet qui a tenu une conférence de presse pour rendre compte des travaux du service public pour l’emploi régional. Le SPER est une instance composée de l’État, de la Région, du Conseil général, de l’Association des maires, du Pôle emploi, des Missions locales et des partenaires sociaux. Elle est placée sous la présidence du préfet, représentant de l’État, structure qui a la compétence dans l’emploi.

Lors de la conférence de presse qui a suivi, une annonce a fait grand bruit : le préfet veut inverser la courbe du chômage. Il a détaillé les moyens mis à disposition des politiques publiques pour y arriver : 9.000 contrats aidés d’un an pour les collectivités, les employeurs publics et les associations, 3.205 contrats aidés pour le secteur privé, 214 emplois d’avenir déjà signés et 5.000 prévus d’ici la fin de l’année et un potentiel de 8.000 salariés pouvant partir en pré-retraite en échange de l’embauche d’un jeune. Pour les jeunes, contrats d’avenir et contrats de génération sont les mesures de l’État qui leur sont prioritairement destinées.

Voilà tout ce que le cadre actuel peut donner. Et il faudra faire avec, car à en croire les députés et Paris, La Réunion a été servie par une dotation au-dessus de la moyenne. Autrement dit, il ne pourra pas y avoir d’efforts supplémentaires dans ce cadre.

L’urgence sociale actuelle

En face de ces moyens, 25.000 jeunes inscrits à Pôle emploi au mois de février dernier, sans compter ceux qui sont tellement découragés qu’ils ne font plus partie des statistiques.

Au lendemain de l’annonce des moyens du cadre actuel, des jeunes ont de nouveau manifesté. Ce sont tout d’abord ceux de Bellepierre qui ont bloqué la route. C’est de ce quartier qu’en septembre dernier était parti un premier mouvement. À l’époque, des jeunes avaient barré le chemin pour obtenir des emplois qui leur auraient été promis pendant la campagne électorale. Quelques jours plus tard, ils avaient vu leur revendication aboutir.

Mardi, des jeunes de ce quartier sont de nouveau passés à l’action.

Quelques heures plus tard, c’est pour la même revendication que d’autres jeunes sont descendus dans la rue à la Palissade, un quartier de Saint-Louis. La situation a dégénéré dans un affrontement avec des policiers, plusieurs jeunes ont été arrêtés.

Le débat pour le dépassement

C’est un nouveau signe de l’accélération de la crise à La Réunion. Car malgré tout ce qu’il peut donner, le cadre actuel ne pourra pas répondre à la demande d’emploi des jeunes. C’est vraiment sous-estimer l’ampleur de la crise structurelle qui rend 60% d’une jeunesse inutile par un système injuste.

Pour sortir de cette crise, il est nécessaire que le débat aboutisse sur des solutions partagées. Le PCR propose une rupture, avec notamment une remise à plat de la politique des prix et des revenus, une gestion des contrats aidés par une autorité indépendante avec pour objectif la pérennisation, une priorité à l’emploi des Réunionnais, et de nouveaux moyens par une réforme institutionnelle.

Ces propositions gagnent chaque jour dans l’opinion jusqu’à imprégner une grande partie de ceux qui s’y opposaient encore voici quelque temps. Elles gagneraient à être discutées et enrichies dans le débat le plus large, afin que soient enfin mises en œuvre des propositions qui permettront de dépasser la crise. La jeunesse ne peut plus attendre, la moitié de la population qui vit en dessous du seuil de pauvreté non plus.

M.M.

Plus de 160.000 demandeurs d’emploi

Le nombre de demandeurs d’emploi connaît une hausse quasi-ininterrompue depuis 2007. Ce n’est pas la conséquence de la crise mondiale, mais d’abord de décisions politiques. Tout a commencé par la casse du projet de Rocade Sud au Tampon par Didier Robert en 2007. D’autres ont suivi en 2008 à la faveur de changements de majorité aux municipales : Pôle océan et zénith intercommunal à Saint-Denis, hippodrome et écocité à Saint-Paul ont coûté des milliers d’emplois.

À cela s’est ajouté le changement des règles de la défiscalisation qui ont donné un coup d’arrêt à la construction de logements privés, sans que le parc social ne puisse prendre le relais.

C’est ensuite que se sont manifestés les effets de la récession en Europe. La casse des grands projets portés par la précédente majorité à la Région, notamment le tram-train et l’autonomie énergétique, ont donné le coup de grâce. Le résultat, c’est la plus grande crise sociale de notre histoire, avec plus de 160.000 demandeurs d’emploi.
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