Budget : Sarkozy fait des économies sur le dos de l’Outre-mer

La loi programme est-elle menacée ?

7 mai 2004

Les annonces faites par le ministre de l’Économie vont fortement pénaliser le développement de l’Outre-mer. La “chasse aux niches fiscales”, lancée par Nicolas Sarkozy, pourrait bien remettre en cause la loi programme.

Le Ministère de l’Économie et des finances l’a bien dit et répété : OK pour que la priorité soit donnée “au social” - c’est une exigence proclamée de Jacques Chirac — mais il va falloir faire des économies ailleurs. Et parmi les premières pistes d’ores et déjà lancées, figurent des gels de crédits, la suppression d’effectifs dans la fonction publique et, bien sûr, la suppression de certaines niches fiscales.
Le journal économique “Les Échos” dans son édition d’hier, écrit : "Bercy estime que la priorité sociale n’est pas compatible avec le respect des engagements pris ces dernières années dans d’autres domaines. Notamment ceux décidés par Jacques Chirac. Nicolas Sarkozy pense, en particulier, à la loi de programmation militaire 2003-2008, respectée en 2003 et 2004 - les crédits d’équipement ont augmenté de 1,3 milliard d’euros cette année -, mais qui prévoit une nouvelle forte hausse en 2005. D’autres lois pluriannuelles se retrouveront sur la sellette, sur les DOM-TOM ou la justice. C’est moins sûr sur la police...".

"Sur la sellette"

Ce que le journal évoque sous le terme générique de “lois pluriannuelles” version DOM-TOM, c’est purement et simplement la loi de programme pour l’outre-mer. C’est donc elle qui va être "sur la sellette" dans les jours à venir.
La loi de programme pour l’outre-mer date du 21 juillet 2003. "Traduction législative des engagements pris par le Président de la République et par le Gouvernement", pour reprendre la définition de Brigitte Girardin, elle a été conçue - selon ses défenseurs - pour promouvoir outre-mer "un développement fondé sur l’activité et la responsabilité".
Prévue sur 15 ans, cette loi fait de la défiscalisation des investissements une règle quasi générale, puisque sont exclues seulement quelques activités, notamment à cause des contraintes imposées par l’Europe. L’autre volet de la loi programme, ce sont les exonérations de charges sociales patronales.

Opérationnel

Au Conseil des ministres du 14 avril, la ministre de l’Outre-mer avait présenté un premier “bilan” de sa loi : "Un travail interministériel important a permis d’obtenir, en moins de 5 mois, l’aval de la Commission européenne sur les dispositifs constitutifs d’aides d’État et d’élaborer les textes d’application de la loi. Toutes les dispositions s’y rapportant sont donc désormais pleinement opérationnelles et les premiers résultats observés confirment la pertinence des choix et l’intérêt des mesures de cette loi au regard des objectifs de croissance et d’emploi réaffirmés par le Gouvernement".
"La loi de programme produira son plein effet en 2004 et 2005", déclarait la ministre avant le vote de sa loi.
Brigitte Girardin peut-elle encore aujourd’hui tenir ce même langage ?

Dominique Besson


Continuité territoriale

L’aveu de Brigitte Girardin

À l’Assemblée nationale, lors des questions au gouvernement, le 28 avril 2004, Joël Beaugendre, député de la Guadeloupe, interrogeait la ministre sur la loi programme et sur la continuité territoriale. Sur ce second point, il demandait à la ministre de faire "un état des lieux de la mise en œuvre de cette continuité territoriale qui renforce le lien entre les Français de là bas et les Français d’ici bas".
La réponse de Brigitte Girardin était la suivante : "J’espère, comme vous, que les Régions auront une attitude responsable et non partisane, en m’adressant au plus vite leurs critères d’éligibilité à cette dotation. Pour les collectivités du Pacifique qui ont déjà délibéré sur leurs critères de répartition, les dotations sont en cours de versement. Pour les DOM, nous devons notifier ces aides à Bruxelles avant leurs versements. J’engage donc les 4 présidents de Région d’outre-mer à m’adresser au plus vite leur proposition d’affectation de cette dotation. Les crédits étant disponibles, la balle est désormais dans leur camp pour répondre à une attente et à une impatience légitimes des Français d’outre-mer".
La preuve donc, que, malgré ce qu’elle avait toujours affirmé jusqu’ici, aucune Région d’outre-mer ne lui a communiqué une "proposition d’affectation". Rappelons que, lors de son voyage à La Réunion, en janvier, elle avait dit que seule la Région Réunion n’avait pas “fait son travail”. Trois mois plus tard, ce n’est plus la même version. Par ailleurs, la Guyane et la Martinique n’ont pas connu de changement de direction à la tête de la Région, suite aux consultations de mars. Un bel aveu...

D. B.


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année


+ Lus