Contribution d’Aline Hoarau

La MCUR : « gardienne des âmes de nos ancêtres et construction la plus révolutionnaire »

6EME CONGRES DU PARTI COMMUNISTE REUNIONNAIS

19 mai 2009

Le samedi 9 mai 2009, Aline Hoarau est intervenue sur le thème de la culture réunionnaise, dans toutes ses dimensions, en tenant compte de la dimension historique, identitaire et de ses relations avec le développement durable. Voici le contenu de cette contribution.

Qui essaye de contrecarrer la mondialisation qui participe à la remise en cause des repères identitaires. On assiste dans le même temps à des mouvements de replis communautaires.
La mondialisation encourage des valeurs individualistes et remet en cause les valeurs traditionnelles des pays sans apporter de rapports de solidarité, ce qui laisse la porte ouverte à d’autres projets politiques porteurs d’autres idéologies.
Je pense par ailleurs que la culture est essentielle, c’est un pilier pour permettre aux citoyens de devenir pleinement acteurs du développement dans toutes ces acceptions.
D’après moi quatre piliers soutiennent notre culture
• d’abord, il y a la langue qui est à la base de la naissance et de l’élaboration de notre culture
• ensuite, notre histoire, l’histoire de notre pays incluant la partie esclavagiste et l’engagisme
• il y a aussi la lutte des esclaves, surtout ceux qui ont opté pour le marronnage, donc pour leur liberté

- la démarche du peuple réunionnais pour atteindre son unité.

1- La base de notre identité et notre unification : la langue créole
* La langue est la première manifestation du génie d’un peuple. Elle permet de faciliter les échanges entre les personnes, de favoriser la création artistique et littéraire et bien sûr permet la lutte.
C’est pour cela, je pense, que l’accent doit être mis sur une pratique de la langue créole passant par son emploi dans tous les domaines et toutes les disciplines.
Notre langue créole doit être respectée, valorisée et connue dans toutes les sphères économiques, sociales et éducatives.
Pourquoi ne pas la parler dans les tribunaux par exemple ?
* L’enseignement notamment doit tenir compte de cette approche, avec une conscientisation de la problématique dans le corps enseignant, qu’elle que soit sa constitution (zorey, kréol, etc…).
* Dans l’Éducation nationale, les programmes doivent obligatoirement intégrer la réalité ontologique des sphères culturelles indo-océaniques, en plus d’être en phase avec l’univers des Réunionnais.

2- La mémoire historique : comprendre notre passé pour armer le citoyen réunionnais dans le présent pour mieux préparer son avenir
« Nous sommes tous des immigrants, comment alors être un peuple qui avance, sans une reconnaissance totale de son passé ?
Pourquoi, dans ce cas, ne pas mettre en place :
* Une collecte patrimoniale matérielle et immatérielle pour avoir une bonne connaissance du passé historique ?
Notre petite île tropicale, vulnérable, hérite d’un long passé, une histoire difficile.
Nous devons poursuivre ce travail de valorisation, de préservation de manière durable de notre passé historique pour rendre un hommage élevé au service de ceux qui ont été humiliés pendant des siècles ; ceux qui ont contribué à la richesse de notre pays,
Les activités d’économie populaire vont de la survie à une reconstruction des liens sociaux ou de la cohérence sociale, sans cesse recherchée par tout groupement humain pour assurer son existence. Les acteurs individuels et collectifs de ces pratiques sont en général le “monde d’en bas”, les petits paysans, les artisans et les commerçants, les hommes, les femmes et les jeunes qui ont toujours existé et vécu dans la “société profonde”, la “société cachée”. Dans les discours sur le développement, ces gens qui représentent environ 90% de la population dans chaque pays n’existaient pas comme acteurs, mais comme sujets du développement.
* Une réflexion sur cette collecte reste nécessaire pour savoir comment travailler sur sa vulgarisation et sa diffusion à l’école.

3- La lutte des esclaves pour leur liberté et préserver leur identité
Notre identité repose sur la conquête des droits fondamentaux. Ces luttes sont menées par nos premiers marrons, les premiers défenseurs des droits de l’Homme en terre réunionnaise.
Rendons leur un hommage.
Cette lutte a d’ailleurs inspiré le PCR dans sa revendication d’autonomie dès 1959. Ce qui a permis d’éclairer notre histoire et de nous considérer comme les enfants de la terre réunionnaise.
Valoriser, préserver notre patrimoine est notre devoir.
* Et donc, tous les sites historiques oubliés, fréquentés par nos ancêtres doivent être valorisés, respectés et restaurés. Ces sites gardent l’empreinte et respirent la culture de nos ancêtres malgaches et africains. Ils sont utiles pour panser les douleurs liées à ce passé douloureux. Ce sont des lieux de recueillement, des lieux qui nous permettent de nous reconstruire, de nous ressourcer et surtout de renouer les liens avec nos ancêtres venus de Madagascar, d’Afrique, de l’Inde, de l’Asie, des Comores et d’ailleurs.
Par exemple :
Comme cela a été fait à Sainte-Suzanne, je pense qu’il faut continuer dans cette démarche qui consiste à réhabiliter l’image de nos célèbres ancêtres : Edmond Albius (stèle) au Bocage, noms des rues portant Cimendef, Anchaing ;
Ensuite à travers aussi un bel ouvrage tel que la route des Tamarins, qui traverse le territoire des marrons. Ce serait une célébration méritée que de baptiser les grands ouvrages d’art des noms de grands chefs historiques tels que Pitsa, Manjak, Sarcemate, Simandare, les femmes admirables aussi comme Rahariane, Sarlave…

- Les calbanons (comme à Sainte-Suzanne, le grand Hazier) est un lieu de mémoire parmi tant d’autres à réhabiliter,

- Le respect des anciens passe par les honneurs funéraires auxquels ils n’ont pas eu droit (tombes esclaves).

4 - Démarche du peuple réunionnais pour atteindre son unité
L’unité dans la diversité et la diversité dans l’unité traduisent ce « génie collectif réunionnais » qui a su traverser tous ces siècles en maintenant ensemble tous ces peuples venant de différents continents. Notre île porte cette identité métissée confondue dans un partage de cultures qui enrichit et consolide notre société. Préservons ce modèle de vie harmonieux.
Nous pouvons continuer à

- Lier la toponymie, la géographie et l’histoire,

- “Réunionniser” au maximum les appellations, toponymiques (lieux publics, rendre hommage aux ancêtres et aux militants culturels),

- Créer une Direction des Affaires culturelles réunionnaises où, notamment en matière architecturale, les angles d’attaque seraient élaborés à partir des problèmes réunionnais,

- Prise en compte des réalités culturelles indo-océaniques.

Pour finir, j’attache une importance à la réalisation de ce grand projet qu’est la Maison des Civilisations et de l’Unité Réunionnaise, sans pour autant que cette réalisation ne contrarie, concurrence les autres projets liés à la mémoire. La MCUR, la gardienne des âmes de nos ancêtres, sera la construction la plus révolutionnaire. Elle « va sonner l’heure de la réparation des injustices historiques et sera le point de départ pour construire ensemble cette unité de notre société », Paul Vergès.


Demain

Simone Yee Chong Tchi Kan : “Les femmes dans la société réunionnaise”.

Parti communiste réunionnais PCRMaison des civilisations et de l’unité réunionnaise6ème Congrès du PCR

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