Éclairage sur un recours en annulation des élections — 3 —

La publication le jour du scrutin d’un sondage attribuant 40 points d’avance à Didier Robert

8 avril 2010, par Manuel Marchal

Après la diffusion d’une fausse nouvelle par un ministre et le ralliement d’un candidat de Gauche sur fond de transactions financières pour manipuler l’opinion en faisant croire à une dynamique de ralliement autour de Didier Robert, coup de projecteur sur le troisième volet de la stratégie qui a permis à la liste UMP de gagner une élection régionale perdue si les règles d’un scrutin démocratique avaient été respectées : la diffusion d’un sondage le jour du vote donnant à Didier Robert une avance de plus de 40 points sur l’Alliance, classée dernière en nombre de « suffrages ».

Dans ces éditions du 3 et du 6 avril dernier, "Témoignages" a expliqué les deux premières parties de la stratégie à trois temps destinée à favoriser à tout prix la victoire de l’UMP : la diffusion d’une fausse nouvelle par un ministre de la République afin de décrédibiliser l’Alliance pour casser la dynamique autour de ses projets, et la construction d’une dynamique totalement artificielle autour du ralliement d’Éric Magamootoo sur fond de transactions financières révélées par "Le Journal de l’île" du 16 mars et "Le Quotidien" du 25 mars. Mais cela n’était pas suffisant pour assurer la première place à l’UMP le 21 mars. Il fallait tenter de convaincre des électeurs proches de l’Alliance de ne pas voter.
C’est le site Zinfos974 dirigé par un ex-élu de la Droite ultra qui allait s’atteler à cette basse besogne en employant un procédé anti-démocratique et totalement interdit par l’état de droit : la publication d’un sondage dénombrant des pourcentages de suffrages le jour du scrutin.
En effet, un sondage prévoyant une large victoire d’un candidat a pour conséquence de donner l’impression à une frange non négligeable de l’électorat que son vote sera sans effet sur le résultat.

Violation délibérée de la loi

Cela explique pourquoi maintenant, lors de l’élection présidentielle ou européenne, les électeurs des Antilles, de la Guyane et de Saint-Pierre et Miquelon votent un jour plus tôt qu’ailleurs. Car en 2002, la publication en France des sondages à la sortie des urnes avait contribué à une abstention massive dans ces territoires où le scrutin n’était pas terminé.
De plus, la loi interdit strictement la publication de tout sondage et de tout commentaire relatif aux résultats de ces sondages non seulement le jour du scrutin, mais également la veille.
Un directeur de publication ne peut pas méconnaître ce fait. Et d’ailleurs, aucun média en France ne se risquerait à transgresser la loi, car c’est une question de respect de la démocratie.
Mais à La Réunion, la stratégie visant à faire gagner à tout prix l’UMP s’est appuyée sur cette transgression. La loi a été violée par un site web qui n’a jamais fait mystère de son soutien total à Didier Robert : Zinfos974.com.
Zinfos974.com publie donc le 21 mars au matin un sondage qui attribue 55% à Didier Robert qui « obtient donc la majorité absolue » « tandis que Paul Vergès ferme la marche avec seulement 13,6% des suffrages ».

L’abstention provoquée profite à Didier Robert

L’objectif de cette violation de la loi est clairement affiché. Il s’agit d’exagérer au maximum l’écart entre la liste UMP de Didier Robert et celle de l’Alliance. Ainsi, le site web dirigé par Pierrot Dupuy attribue plus de 40 points d’avance au député-maire du Tampon, et fixe l’Alliance à la dernière place de la triangulaire, « avec seulement 13,6% des suffrages ». Il est certain qu’au moment où le résultat de ce sondage a été diffusé, nombreux sont les électeurs qui ont jugé inutile de se déplacer pour voter pour l’Alliance, estimant qu’un retard de 40 points est irrattrapable. Cet appel à l’abstention en direction des électeurs de l’Alliance était renforcé par le fait que le sondage diffusé par Zinfos974.com le jour du scrutin ne parlait pas d’intention de vote, mais bien de « suffrages », ce qui signifiait un fait définitif.
Au soir du deuxième tour, l’objectif de la publication du sondage est atteint : la participation a chuté de 8 points par rapport à la précédente élection régionale, alors que la configuration du second tour était identique à 2004, c’est-à-dire une triangulaire avec l’Alliance, l’UMP et le PS. Quant au résultat du scrutin, il démontre clairement que cette abstention a profité à Didier Robert. Cette très grave atteinte à la démocratie renvoie La Réunion à l’époque des candidats officiels qui ne pouvaient que gagner une élection. Cette violation de la loi a été la touche finale apportée à une stratégie dont les Réunionnais commencent à percevoir les premiers effets : l’explosion sociale menace, indique l’Intersyndicale du BTP.

Fin

Manuel Marchal

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