Après les effets dramatiques du dernier conflit sur les carburants

La Région alerte l’opinion et les décideurs : Un précédent qui risque d’être grave de conséquences pour l’avenir

18 novembre 2008, par Manuel Marchal

Dans un contexte d’aggravation de la situation, nombreux sont les professions et les citoyens qui vont vouloir faire entendre leurs revendications. Si les futurs mouvements sociaux barrent les routes, l’attitude de l’autorité publique sera-t-elle la même qu’envers les transporteurs ? Toute différence de traitement sera perçue par l’opinion comme une prise de position politique de l’Etat, a indiqué hier Paul Vergès en conférence de presse. La manière dont l’autorité publique a laissé faire le blocage de La Réunion par les transporteurs est « un précédent terrible fait à La Réunion ».

Autour de Paul Vergès, plusieurs membres de la majorité régionale, notamment plusieurs personnalités de la société civile parmi lesquelles Catherine Gaud.
(photo MM)

Hier, Paul Vergès et plusieurs membres de la majorité régionale, parmi lesquels plusieurs personnalités de la société civile, ont tiré les enseignements du mouvement des transporteurs et ses conséquences dans un contexte marqué par l’imminence de « rendez-vous redoutables ». Le président de la Région note que ces échéances sont chacune l’occasion pour des catégories professionnelles de faire entendre de justes revendications :

- D’ici quelques jours, le vote du budget dans l’Outre-mer fixera les nouvelles règles de financement des investissements par la défiscalisation à La Réunion. Dans l’état actuel, ce projet fait l’unanimité des professionnels contre lui.

- L’an prochain, la signature d’un Accord de partenariat économique entre l’Union européenne et les pays voisins, selon les conditions de ces derniers, pose le problème de la survie de l’Octroi de mer, et donc celui de la mise en concurrence des producteurs locaux avec ceux de la région.

- En 2013, c’est la fin du régime provisoire de l’Octroi de mer accordé par l’Union européenne.

- Également en 2013 se situent deux rendez-vous essentiels : la mise en œuvre des futurs Contrat de projet État-Région et de Programmes européens. Étant donné d’une part le contexte de récession économique en Europe, et d’autre part l’élargissement de l’Union à des régions plus pauvres que La Réunion, il est difficile de concevoir que le niveau des crédits puisse être égal à celui de la période 2006-2013.

- En 2014, c’est l’échéance qui attend tous les planteurs de cannes avec la fin du règlement sucrier européen.

Crise comparable à celle de 1929

Il est à noter que ces rendez-vous ont lieu dans un contexte d’aggravation de la situation. « Nous sommes entrés dans une période de crise comparable à celle de 1929 », précise Paul Vergès. Or, la crise du 1929 a provoqué d’importants bouleversements qui ont amené la Seconde Guerre mondiale.
Dans ce contexte, tout responsable politique doit avoir comme préoccupation de faire avancer l’idée d’une solution globale aux problèmes, pour tous les secteurs. Dans ce cadre, il est essentiel de permettre à chacun d’exprimer ses revendications, sans pour autant nuire aux autres catégories de la société.
Mais la manière dont s’est déroulé le mouvement des transporteurs est un précédent grave de conséquences pour l’avenir.
Cette catégorie socioprofessionnelle a fait entendre une revendication légitime : faire baisser le prix des carburants. Et elle a mis en œuvre une action : des barrages sur les routes.

Et les autres mouvements sociaux ?

Pendant cinq jours, le mouvement des transporteurs a donc mis en œuvre la stratégie énoncée publiquement par un de ces dirigeants : « nous allons bloquer l’économie de La Réunion ». Durant cette période, des barrages ont été dressés sur les routes, violant la liberté de circuler, y compris pour les véhicules d’urgence, alors que l’autorité publique, présente sur les lieux, n’intervenait pas. Cela a eu des conséquences dramatiques (voir encadré).
Alors que nous n’en sommes qu’au début de la crise, Paul Vergès a demandé si d’autres professions, et si les 52% de Réunionnais sous le seuil de pauvreté, qui pourraient également organiser des barrages sur les routes pour faire également entendre d’aussi justes revendications, bénéficieront de la même attitude de l’autorité publique. Toute différence de traitement sera perçue par l’opinion comme une prise de position politique de l’Etat, constate Paul Vergès.
La manière dont l’Etat a laissé faire le blocage de La Réunion est « une exception qui aura une portée de principe considérable », ajoute-t-il.
De deux choses l’une : soit cette attitude est une directive du gouvernement, soit elle est le résultat d’une décision prise par l’administration de l’Etat au niveau régional ou départemental. Quoi qu’il en soit, c’est « une faute, une erreur » qui pèsera sur tout le déroulement du mouvement social à La Réunion, constate Paul Vergès. « Car la crise va durer, et des professions sont menacées », conclut-il.

Manuel Marchal


Un lourd bilan

Vendredi 7 novembre à Saint-Joseph, une ambulance du SMUR est retardée de longues minutes à un barrage. Le patient décédera à son arrivée à l’hôpital. C’est l’événement le plus dramatique de ce mouvement social.
Pendant cinq jours, tous les véhicules des entreprises ont été interdits de circuler. Ce blocage de l’économie provoque un lourd bilan : plus de 500.000 euros de pertes pour les agriculteurs ; retard dans les travaux de sécurisation de la route du Littoral ; des touristes obligés de marcher de Gillot à Saint-Denis, et cela à quelques jours des Assises du Tourisme de l’Outre-mer... un blocage inconcevable en France, constate Paul Vergès. Cela pose un problème de principe. Une loi récemment votée impose un service minimum en cas de grève dans les services publics. Pendant cinq jours, aucun service minimum n’a pu être assuré pour faire fonctionner l’économie. Cette loi a été violée par les barrages, avec la présence de l’autorité publique sur ces barrages, constate Paul Vergès.

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