Chronique

Le ciel est noir... Au Japon

15 mars 2011

La terrible catastrophe que connaît le Japon, quel qu’en soit le bilan humain d’une part, économique d’autre part, interpelle chaque pays, chaque gouvernement, chaque être humain qui qu’il soit et où qu’il soit, par cette double et tragique vérité :

- des forces naturelles incontrôlables, infiniment supérieures aux pouvoirs de l’Homme, peuvent agir à tout moment sur la terre, dans l’atmosphère, dans l’univers, et frapper tout ou partie de la population.

- mais les conséquences déjà considérables de ces catastrophes peuvent être immensément amplifiées à cause des hommes, par l’imprévoyance des responsables, par la veulerie ou la démagogie des gouvernements, par l’irresponsabilité de certains choix.
On a vu souvent, par exemple, des inondations (phénomènes naturels) entraîner des milliers de morts du simple fait que les pouvoirs publics avaient autorisé des constructions dans des zones à risques (erreurs humaines, choix politiques irrationnels ou démagogiques).
On voit aujourd’hui que le tremblement de terre et le tsunami, qui ont déjà par eux-mêmes causé d’immenses destructions et provoqué la mort de milliers d’êtres humains, risquent d’être aggravés par une ou plusieurs explosions de centrales atomiques, semblables à celle de Tchernobyl (26 avril 1986). Le monde entier a les yeux fixés sur la centrale de Fukushima, sur les trois autres qui connaissent des dysfonctionnements, et au-delà, sur les 11 à 15 réacteurs nucléaires arrêtés au Japon. La situation est d’autant plus extravagante qu’elle touche le seul pays qui ait, à ce jour, subi un bombardement nucléaire au cours d’une guerre : 140.000 morts à Hiroshima le 6 août 1945, 70.000 trois jours plus tard à Nagasaki. Mais la cruauté de la situation est-elle seulement due au hasard ou à un sort contraire ? Comment ne pas voir que le choix délibéré du nucléaire comporte en lui-même des risques immenses pour le devenir des peuples et des civilisations ? Comment ne pas voir que les problèmes des catastrophes naturelles, de production d’énergie, de préservation de l’environnement et de survie de l’espèce humaine sont étroitement liés et doivent recevoir une réponse globale ? Comment ne pas voir que, par-delà le drame de Fukushima, c’est à une réflexion mondiale pour organiser la sortie du nucléaire que les États doivent s’attacher ?
Bien entendu, faire le choix des énergies renouvelables exige d’être lucide sur l’avenir, d’avoir le courage de certains choix politiques, et d’être déterminé à s’engager sur le long terme. C’est précisément ce que l’Alliance avait fait en préparant l’autonomie énergétique pour La Réunion à l’horizon 2025/2030, et qui a été systématiquement démoli par Didier Robert et ses comparses de l’UMP.
Le pouvoir sarkozien sera-t-il capable d’infléchir complètement la politique du pays dans ce domaine ? On peut en douter. Et trembler pour nos concitoyens et tout le pays en songeant que ce ne sont pas 11, mais 58 réacteurs nucléaires, installés dans 19 centrales nucléaires, qui fonctionnent sur le territoire métropolitain...

En Europe et en Libye

C’est un tsunami politique qu’avait, pour sa part, provoqué Nicolas Sarkozy en annonçant tout de go jeudi soir (alors que le Conseil des Chefs d’Etat de l’Union européenne se réunissait le lendemain, et sans même en avertir M. Juppé, son ministre des Affaires étrangères, qui l’a appris par la presse) que la France reconnaissait comme seuls interlocuteurs libyens les insurgés de Benghazi. Politique de gribouille et pavé dans la mare du consensus européen, cette initiative discrédite un peu plus, s’il en était besoin, l’image de la politique étrangère de la France, de ses rapports avec l’Europe ainsi qu’avec les pays africains. Une fois de plus, Sarko, après avoir parlé trop vite, est condamné à rétro-pédaler honteusement dans la choucroute, sous les huées de toute la communauté internationale. D’une part, Mme Merkel, dans un style heureusement plus diplomatique que celui du président français, a parlé d’annonce prématurée ; d’autre part, le Conseil de Sécurité de l’ONU est seul habilité à se prononcer sur l’opportunité d’une option militaire en Libye ; enfin, sur le terrain des opérations, force est de constater, même si on ne s’en réjouit pas, que les troupes du colonel Kadhafi semblent parties pour reconquérir une large partie, sinon la totalité, du territoire contrôlé par les insurgés. Brandissant son sabre de bois, notre condottiere UMP va-t-il lancer son panache blanc à travers les dunes du désert libyen, ajouter l’ineptie militaire à l’imbécillité politique, et nous conduire à un désastre des sables aussi glorieux que celui de la cuvette de Diên Biên Phu ? D’autant plus que, comme le rappelait du bout des lèvres son éminence grise Henri Guaino dimanche soir au Grand Jury de RTL, il faudra prévoir dans cette hypothèse que nos soldats seraient bombardés par... des Mirages français ! Eh oui, ces avions, précisément, que nous avons vendus à Kadhafi au nom du libéralisme commercial international, de la concurrence libre et non faussée et autres principes sacro-saints qui servent de viatique à nos bourgeois UMP (Serge Dassault en tête), à nos libéraux européens et à l’Internationale des Faiseurs de Fric qui, à l’unisson de l’oncle Sam, s’autoproclament Conclave des Grands-Prêtres de la Paix, de la Prospérité et des Pots de Vin Généreusement Payés.
Henri Guaino, conseiller du Président et grand donneur de leçons d’histoire, a en 2007, comme je le rappelle souvent, osé écrire que « l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire ». On attend de lui maintenant qu’il nous montre comment l’homme européen sortira des sables libyens autrement qu’à grands coups de pieds dans le derrière : peut-être en s’effaçant prudemment pour laisser la place à “l’homme américain” ?... Ce ne serait pas le moins cocasse de cette affaire, qu’elle se résolve par un changement de derrières. Cela montrerait au moins l’endroit précis où se situe le cœur de la diplomatie guerrière des successeurs de Clémenceau et de De Gaulle.

Le chemin de croix de l’Ecole réunionnaise


Les soldes sont terminés, mais pour les amis de Didier Robert, la braderie du système éducatif réunionnais continue de plus belle. Après la suppression de 162 postes d’enseignants, c’est la disparition de 19 postes de conseillers pédagogiques (un par circonscription) qui est annoncée pour la rentrée 2011, soit 30% de l’effectif total dont disposait notre académie pour le Premier Degré. Quand on sait que la réforme du système de recrutement et de formation des nouveaux enseignants prend des allures de catastrophe nationale (reconnue comme telle par le Président de la République lui-même), on mesure ce que va entraîner de difficultés nouvelles cet affaiblissement scandaleux du potentiel de conseillers et de formateurs expérimentés, sur lesquels pouvaient s’appuyer aussi bien les nouveaux recrutés que les enseignants en poste au titre de la formation continue. Décidément, c’est d’une réaction massive et déterminée que relève désormais la sauvegarde du service public de formation. Qu’on y prenne garde : c’est l’échec massif et irrémédiable de générations d’élèves issus des milieux les moins favorisés qu’organisent froidement la droite UMP et ses supplétifs locaux. Plus qu’une forfaiture politique, c’est un crime pédagogique qu’ils sont en train de perpétrer, une offensive de destruction massive contre l’avenir de la jeunesse. C’est l’homme réunionnais qu’ils sont en train d’expulser de l’Histoire. A moins que l’inverse ne se produise avant...

Raymond Mollard

LibyeNucléaire danger

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