Le Grand Débat, tué dans l’oeuf

14 janvier 2019

Alors que l’Acte IX des gilets jaunes s’est avéré plus important que ce qu’attendait le gouvernement, celui-ci va lancer le 15 janvier son grand débat national, afin de mettre un terme à la crise. Une initiative très critiquée, car l’issue de ce débat est déjà connue des manifestants et de l’opinion.

Sur son site internet, le gouvernement explique avoir engagé ce grand débat national "sur quatre thèmes qui couvrent des grands enjeux de la nation : la fiscalité et les dépenses publiques, l’organisation de l’Etat des services publics, la transition écologique, la démocratie et la citoyenneté". Des thèmes bien loin des revendications de la population, mobilisée depuis 9 semaines.

De décembre 2018 à avril 2019, ce grand débat sera officiellement lancé sur demain, mardi 15 janvier. En effet, "la plateforme numérique du grand débat national permettra à tous les citoyens, élus, organisations à but lucratif ou non lucratif souhaitant organiser des réunions locales de s’enregistrer et de recevoir le kit d’accompagnement des réunions et toutes les informations nécessaires pour la bonne tenue des débats", note le site de l’Etat.

La RIC voulue, vite oubliée

Or cette consultation est contestée avant même d’être lancée. De nombreux Gilets jaunes ont remit en question sa légitimité, affirmant que le vrai débat était aujourd’hui « dans la rue ». D’autant plus que le choix des manifestants s’est porté sur une Réforme d’Initiative Citoyenne (RIC).

Pour les manifestants de ce mouvement, essentiellement axé sur le pouvoir d’achat, le RIC permettrait à toute proposition de loi accompagnée de 700 000 signatures émanant de citoyens français, et recueillies sur un site internet sous le contrôle d’un organisme indépendant, de faire l’objet d’un référendum national dans un délai d’un an, après amendement éventuel par les députés.

Ainsi, il serait possible de "modifier la Constitution dans le but d’introduire le RIC dans toutes matières", permettant de "donner au peuple le droit de rédiger ou d’abroger une loi sur le sujet qu’il choisit". Une initiative rejeté par une partie de la classe politique.

Un grand débat national déjà goupillé

Face à cette volonté populaire, le gouvernement a décidé de mettre en place le grand débat national. Or Benjamin Cauchy, porte-parole des « gilets jaunes libres », a estimé que l’issue du débat « est déjà connue. Circulez y’a rien à voir nous dit Emmanuel Macron. Quel manque de respect. »

Selon un sondage Odoxa-Dentsu Consulting pour Le Figaro et France Info publié la semaine dernière, 81% des Français ont entendu parler du débat mais 77% estiment qu’il ne sera pas mené "de façon indépendante du pouvoir" et 70% s’attendent à "ce qu’il ne soit pas utile pour le pays".

En effet, le président Emmanuel Macron a envoyé dimanche 13 janvier une lettre pour cadrer le grand débat national, autour des sujets qui l’intéresse. Alors que le pays traverse une « période d’interrogations et d’incertitudes », il propose de bâtir un « nouveau contrat pour la Nation » et suggère 33 questions (pas plus) qui pourront être débattues au cours de ce grand débat national.

La gauche fustige les manoeuvres du gouvernement

Olivier Faure, premier secrétaire du Parti socialiste (PS), a regretté que la question de l’ISF ne puisse être discutée : "On ne convoque pas tous les Français à un débat en leur interdisant de parler par exemple de l’ISF. Les conclusions doivent être celles des Français pas celles déjà prévues par le président de la République."

Même son de cloche pour Jean-Luc Mélenchon, chef de file de La France insoumise (LFI), qui a dénoncé une "grande diversion". "Le grand débat ? Une grande diversion, écrit le député des Bouches-du-Rhône. On refait le débat de la présidentielle mais le gouvernement fixe les conclusions. Rappel : après le ’Débat’ DOM-TOM et celui sur l’Europe, aucun résultat. La France de Macron est-elle vouée aux bavardages ?"

De son côté, le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel, a dénoncé ce débat qui aurait pu être "l’occasion d’éviter de répondre aux questions de justice fiscale et de justice sociale que posent les Français depuis des mois". "Il doit encore moins servir à cautionner des politiques d’austérité encore plus sévères. Il n’est à aucun moment question de ’pouvoir d’achat’ dans ce courrier aux Français", a-t-il ajouté, déplorant qu’il n’y ait "rien non plus sur l’évasion fiscale et les moyens de lutter contre la financiarisation de l’économie".


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