Les questions du PCR à Nicolas Sarkozy

’Le ministre ne peut pas ne pas s’exprimer sur nos problèmes...’

28 septembre 2005

Élie Hoarau, secrétaire général du PCR, a tenu hier une conférence de presse motivée par la venue de Nicolas Sarkozy, ministre de l’Intérieur, qui arrive jeudi, pour participer dit-on à la “Semaine de la laïcité”, à l’invitation de la présidente du Conseil général.
Sans ignorer les objectifs ou les arrière-pensées du président de l’UMP et du candidat à la présidentielle de 2007, c’est au ministre d’État que le PCR adresse ses questions.

La première interrogation porte sur le motif donné à la visite, "d’autant plus étonnante - commente Élie Hoarau - que le thème de la laïcité est une des pommes de discorde entre le président Chirac, qui pense que la loi sur la laïcité est un acquis qui fait l’unanimité, tandis que le ministre de l’Intérieur voudrait la “toiletter”". Au passage, le PCR observe aussi que le chiraquien François Baroin, qui devait accompagner le ministre de l’Intérieur, a remis son voyage à plus tard. En octobre ?
Mais le président de l’UMP et le candidat à la présidentielle "a parfaitement le droit de venir en campagne" - a ajouté Élie Hoarau. "Encore faudrait-il savoir qui paie...", a-t-il évoqué par deux fois. Et puisqu’il ne fait aucun doute que le ministre de l’Intérieur a dans sa visée les élections de 2007, le PCR va observer avec intérêt le positionnement des politiques de la majorité.
Sur la question de la laïcité, le PCR estime que "le problème ne peut être abordé de la même manière à La Réunion et en France métropolitaine : les conditions de son enrichissement se posent dans les deux cas dans des contextes très différents", a estimé Élie Hoarau en souhaitant que ce sujet délicat ne soit pas prétexte à des "déclarations dérivantes".

Quel bilan en 100 jours ?

C’est surtout au ministre d’État que le PCR adresse ses questions, estimant que Nicolas Sarkozy est comptable du bilan des gouvernements Raffarin et de Villepin. Quant à ceux qui, ici, se situent dans son camp, "ils ne peuvent être considérés que comme solidaires du bilan et des projets du candidat" a ajouté Élie Hoarau.
Au ministre, donc, le PCR pose plusieurs séries de questions : sur le bilan des 100 jours, sur les objectifs économiques du gouvernement et sa politique de l’emploi, sur sa politique devant le sentiment d’insécurité exprimé par certaines catégories de citoyens, sur les visées du gouvernement concernant le code de nationalité et surtout sur le positionnement du gouvernement dans les grandes questions qui seront soulevées après la clôture du “cycle de Doha”, à la fin de cette année.
"M. Sarkozy ne peut pas partir d’ici sans s’exprimer sur le bilan des cent jours. Il a annoncé pour la France une réduction du chômage de 5% : quel objectif a-t-il pour La Réunion ?"
"Des milliers de CES et CEC vont être supprimés au 31 décembre. Que leur propose-t-il, tandis que le nouveau Contrat (CNE) tarde à se mettre en place ?"
"La régularisation du statut de près de 10.000 employés communaux - qui constituent ici 80% de la FPT - relève directement de son ministère : que propose-t-il et que va-t-il dire aux maires de sa majorité qui ont refusé le début de normalisation enclenché entre 1998 et 2001 ?"

La question du test ADN

Devant le sentiment d’insécurité grandissant, les syndicats de la police font des propositions pour combler nos retards en nombre de policiers, a rappelé Élie Hoarau. "Si l’approche de proximité est dans ses options, va-t-il faire revenir ici les nombreux policiers réunionnais qui sont en France et qui demandent à rentrer ?" a-t-il ajouté, en parlant de "demande massive".
Enfin, l’actualité du débat soulevé par certains de ses amis de La Réunion, pour la "remise en cause du Code de la nationalité" va aussi placer cette question au cœur de la visite du ministre de l’Intérieur. "Partage-t-il le point de vue selon lequel un test ADN pourrait freiner les flux migratoires ?", a poursuivi Élie Hoarau.
Enfin, avec la fin des négociations de l’OMC inscrites dans “le cycle de Doha” et la conférence de Hong Kong, les gouvernants ont déjà débattu des thèmes du prochain cycle, qui doit notamment porter sur les services. "Parmi les conséquences du cycle de Doha, il y a peut-être la fin de la filière canne. Les gouvernements ont commencé à négocier sur les services. Les conséquences des réformes annoncées, dans les grandes lignes, sont déjà connues. Que va-t-il en sortir pour La Réunion ? Il n’est pas possible qu’un ministre de ce rang, venant ici, ne parle pas de ces questions fondamentales pour l’avenir de La Réunion", a conclu le secrétaire général du PCR, en appelant pour finir au succès de la manifestation intersyndicale du 4 octobre prochain.

P. David


Nicolas Sarkozy à La Réunion

“Républicain” connaît pas ?

Depuis François Mitterrand, une sorte de tradition a été instaurée à La Réunion. Elle a été reprise et amplifiée avec Jacques Chirac. En visite à La Réunion, le chef de l’État recevait tous les parlementaires de l’île ainsi que les présidents des collectivités lors d’un “repas républicain”. Même en vacances dans notre île, l’actuel locataire de l’Élysée avait sacrifié à la tradition. Au cours d’un dîner ou d’un déjeuner, une sorte de dialogue convivial s’instaurait entre le président et ses invités. La parole était libre et chacun ou chacune pouvait développer son point de vue ou encore attirer l’attention sur tel ou tel aspect.
Avec le temps, cette pratique a été étendue : les Premiers ministres ou les titulaires d’un grand Ministère de passage dans l’île ont repris la formule. À son arrivée à la rue Oudinot, François Baroin, ministre de l’Outre-mer, exporta cette manière de faire. Dès sa nomination, il invitait à un déjeuner l’ensemble des parlementaires de l’Outre-mer et avait eu avec eux de nombreux échanges.
À la lecture du programme du séjour de Nicolas Sarkozy dans notre île, tel qu’il est actuellement connu, on constate qu’à aucun moment n’est prévue une rencontre de ce genre avec les parlementaires et les dirigeants des collectivités locales. Par contre, on note que le ministre, changeant de casquette et revêtant celle de chef de parti, tiendra une "réunion publique de l’UMP à la salle de Champ Fleury". De même, la rencontre avec le Conseil municipal de Saint-Pierre, le vendredi 30 à 17h30 - où apparemment l’opposition n’a pas été invitée - devant un parterre d’administrés appelés à faire la claque, ressemble à une initiative plus politicienne qu’un contact avec une administration communale...

Aucune rencontre avec la presse

Certes, la majorité des officiels ayant séjourné à La Réunion et quel que soit leur bord politique, ont eu des rencontres avec leurs partisans. Ce genre d’initiative n’était généralement pas annoncée dans le programme officiel. Elle était discrètement classée sous la rubrique de rencontres “privées”. C’était la partie “off” du séjour, celle qui ne se voyait pas ou encore qu’on annonçait comme ne faisant pas partie du voyage officiel.
Nicolas Sarkozy semble donc vouloir briser un certain nombre de pratiques ayant court jusqu’ici dont une était qualifiée de "républicaine". Faut-il voir là une signification particulière et penser que le ministre n’a pas la fibre aussi républicaine qu’il ne le dit ?
Enfin, dans son programme tel qu’il est connu, n’apparaît non plus aucune rencontre avec la presse. Pas de conférence, pas de débat, et aucun entretien télévisé ou radiodiffusé n’est annoncé. Étonnant de la part d’un homme qui aime à se faire médiatiser, et qui se sert de la presse pour distiller des petites phrases et nourrir la polémique avec les chiraquiens.

J. M.

Parti communiste réunionnais PCR

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