Conséquence de l’annonce de Paul Vergès —2—

Le précédent victorieux de l’égalité

29 septembre 2011, par Manuel Marchal

En 1986, Paris refusait l’égalité aux Réunionnais et le Parlement votait en majorité pour inscrire ce refus dans la loi. Face au blocage, Paul Vergès et Élie Hoarau ont alors décidé de donner une nouvelle impulsion à la lutte en démissionnant de l’Assemblée nationale. Les deux anciens députés ont alors animé la lutte qui a permis d’obtenir la victoire irréversible de l’égalité.

En 1986, quarante ans après le vote de la loi du 19 mars 1946, l’égalité n’est toujours pas respectée. Si le SMIC est appliqué, son montant est inférieur de plus de 20% à celui en vigueur en France pour la même durée de travail. Quant aux prestations familiales, soit elles n’existent pas, soit elles représentent environ la moitié de ce qui a cours en France. Facteur aggravant : les travailleurs privés d’emploi n’ont droit à rien. À cette époque, La Réunion est déjà touchée par le chômage de masse. Quant à la vie chère, elle est une réalité également.
En 1986, un gouvernement décide d’inscrire cette inégalité dans le marbre de la loi. C’est la parité. À La Réunion, une classe décide de soutenir la parité, elle se regroupe autour de Jean-Paul Virapoullé et rassemble les conservateurs. Malgré les protestations de Paul Vergès et Élie Hoarau, les deux députés du Parti communiste réunionnais, le Parlement vote pour le projet de loi. Alors dans l’opposition, le Parti socialiste avait la possibilité de saisir le Conseil constitutionnel pour empêcher la promulgation de cette loi. La parité s’oppose en effet à un fondement de la Constitution : l’égalité entre les citoyens de la République. Mais aucun recours n’a été déposé, et la loi a été promulguée.

Le tsunami de l’égalité

À Paris, les conservateurs réunionnais avaient réussi à obtenir satisfaction, la situation était bloquée. Le PCR a décidé de porter le cœur du combat dans notre île, en suscitant la prise de conscience des classes populaires. Le 14 octobre 1987, Paul Vergès et Élie Hoarau remettent leur démission au président de l’Assemblée nationale. Cette décision allait être le point de départ d’un véritable tsunami que personne n’a pu arrêter.
Cette égalité qui quelques mois auparavant paraissait inatteignable est soudainement devenue possible, puisqu’elle était projetée au cœur de la bataille des présidentielles en France l’année suivante. Cette égalité s’est ensuite progressivement appliquée, avec des acquis irréversibles. C’est le résultat de la lutte des classes populaires du pays, qui a réussi à obtenir le droit à des revenus minimums pour faire face à la crise. L’égalité, ce sont aussi chaque année des milliards injectés dans l’économie réunionnaise. Sans cette égalité, comment pourrait-on vivre aujourd’hui ?

Et maintenant, le développement

25 ans après ce combat, un autre a commencé à La Réunion, c’est celui du développement. Son objectif, c’est d’aller encore plus loin que l’égalité en donnant les moyens au pays de sortir de la pénurie d’emploi et de logement, et de construire le développement durable d’un million d’habitants. Comme à l’époque de la lutte pour l’égalité, le développement de La Réunion est refusé par une classe sociale qui n’a aucun intérêt à voir évoluer la société.
Après avoir permis la prise de contrôle de la Région par l’UMP alors que Sarkozy est très minoritaire dans le pays, cette classe a tenté de stopper toute velléité de résistance en offrant plus de la moitié des suffrages des grands électeurs à l’UMP aux sénatoriales. Dimanche, elle croyait avoir porté un coup décisif à toute possibilité de développement. Le soir même, cette classe a déchanté et a commencé à prendre peur.
Paul Vergès a annoncé sa démission et sa volonté d’animer la lutte à La Réunion pour gagner la bataille du développement. En 1986, l’égalité était un objectif encore plus lointain que la construction d’un tram-train aujourd’hui. Cette bataille a été gagnée. Et sur la base du principe de l’égalité, existera-t-il un gouvernement qui osera encore refuser aux Réunionnais le droit à un chemin de fer ?
Connaissant les effets catalyseurs de la démission d’un parlementaire réunionnais, les acteurs du vote de classe en faveur de l’UMP savent désormais qu’ils ont déclenché un nouveau tsunami.

(à suivre)

Manuel Marchal


La victoire irréversible de l’égalité

Au moment du vote de la loi sur la parité en 1986, voici un aperçu des inégalités entre les citoyens de La Réunion et de la France qui sont pourtant intégrés dans la même République. C’est cette inégalité que les conservateurs ont voulu graver à jamais dans le marbre de la loi. Les démissions de Paul Vergès et Élie Hoarau ont permis de lancer la contre-offensive victorieuse.

La Réunion France
Allocation au jeune enfant 0% 100%
Allocation parentale d’éducation 0% 100%
Aide au logement 0% 100%
Allocations familiales 0% (chômeurs)
55% (salariés)
100%
Complément familial 0% (chômeurs)
57% (salariés)
100%
Allocation de soutien familial 0% (chômeurs)
48% (salariés)
100%
Supplément de revenu familial 0% (chômeurs)
50% (salariés)
100%
Allocation de parent isolé (API) 86% 100%

La mobilisation a permis une victoire totale, décrite dans ces quelques dates :

1er juillet 1994 : égalité des allocations familiales
1er janvier 1996 : égalité du SMIC, de l’allocation au jeune enfant et de l’allocation parentale d’éducation
Janvier 2002 : égalité du RMI
Janvier 2007 : égalité de l’API


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