"Ce qu’on attend, c’est un plan Marshall contre les violences faites aux femmes, ce qu’on attend c’est des résultats", a martelé Anne-Cécile Mailfert, la présidente de la Fondation des femmes.
Lors d’une conférence de presse, en présence d’une dizaine d’association, Anne-Cécile Mailfert a expliqué que « ce qu’on veut, c’est qu’à la fin du Grenelle, tout soit mis en place pour qu’il y ait moins de féminicides en 2020, et même moins de féminicides d’ici la fin de l’année. Et ça, c’est possible ! ».
Assurer l’application des mesures souhaitées
Les associations, dont la Fédération Nationale Solidarité Femmes - qui gère le numéro d’écoute 3919 -, Femmes Solidaire ou le Planning familial, compte présenter les mesures concrètes qu’elles souhaitent voir annoncer et appliquer à l’occasion de ce "Grenelle".
Parmi les demandes figurent la création, avant la fin de l’année, d’au moins 2.000 places d’hébergement pour les femmes ayant fui le domicile conjugal ; un renforcement de la prévention contre les violences sexistes dès l’école ; la création d’instances judiciaires spécialisées ; ou encore une meilleure formation des policiers et gendarmes qui recueillent les plaintes des femmes victimes.
Ce Grenelle prévu jusqu’au 25 novembre doit réunir politique, associations et militantes, qui se sont dites "confiantes". "C’est un moment charnière, voire historique", car l’événement est inédit, a estimé Marie Cervetti, de l’association "Une femme, un toit".
"Il y a une prise de conscience au plus haut niveau de l’Etat qu’il va falloir agir", pense-t-elle. Mais les associations restent "vigilantes".
"On ne veut pas un Grenelle des fake news, on va être extrêmement attentives à ce que ce ne soit pas une opération de communication de la part du gouvernement", a avertit Marie Cervetti.
"On souhaite que ce qui va être annoncé demain soit budgété, soit concrètement réalisé. L’attente est énorme. Les 100 femmes qui ont été assassinées (depuis le début de l’année) nous obligent", a-t-elle ajouté à l’Agence France Presse.
Les réunionnaises principales victimes des violences
À La Réunion, 7 plaintes pour violences conjugales sont déposées chaque jour, contre 5 plaintes par jour en 2016. En 2018, les forces de l’ordre sont intervenues 6000 fois à domicile, pour des faits de violences conjugales, contre 4000 interventions en 2012.
Concernant les entretiens avec des victimes de violences conjugales, l’ARAJUFA compte 710 échanges passés en 2015 contre 940 en 2018. La Réunion se retrouve en 3ème position du classement annuel des violences conjugales, après la Guyane et la Corse.
D’ailleurs, « le taux de mort violente au sein du couple est de 0,2169 pour 100 000 habitants au niveau national, ce taux est de 0,4636 à La Réunion, soit plus de deux fois supérieurs », a déploré la députée socialiste Ericka Bareigts dans un courrier adressé à Marlène Schiappa, Secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations.
De plus, les femmes ayant quitté leur conjoint dans l’année déclarent des faits de violences plus graves et en plus grand nombre. Elles sont 6% à avoir été menacées de mort et 3% à avoir été menacées avec une arme, où ont subi une tentative de meurtre, selon le préfet de La Réunion, Amory de Saint-Quentin.
Un contrat réunionnais contre les violences conjugales, sexistes et sexuelles
Le 27 août, un contrat local contre les violences conjugales, sexistes et sexuelles de La Réunion a été signé entre la préfecture, certaines communes de l’Est de l’île, mais aussi les associations, les bailleurs sociaux, les professionnels de santé, le procureur Éric Tuffery et le Rectorat.
26 personnes ont signé ce premier contrat local, qui est « un premier pour La Réunion et un premier pour les Outre-mer », d’après Nadine Caroupanin, déléguée régionale aux droits des femmes.
Cette dernière a expliqué au micro de RTL Réunion qu’« un des objectifs phares de ce contrat, c’est déjà de démarrer avec la désignation dans chaque commune d’une personne référente qui a en charge d’animer à l’échelle de sa commune toute la politique et toute la stratégie en faveur de la meilleure prévention, une meilleure prise en charge et une meilleure protection des femmes ».
Selon une enquête de mars 2019, un quart des couples réunionnais se trouve dans une situation conflictuelle. La commune de Saint-Benoît serait davantage touchée, avec en 2018, 2 016 plaintes recensées et 6 203 interventions liées à des violences intrafamiliales, soit une hausse de 13% par rapport à 2017.
« Il y a manifestement un problème à La Réunion », reconnait le procureur Éric Tuffery, « mais il n’y a pas de fatalité et l’on va parvenir à faire baisser les chiffres avec ce maillage opérationnel. Cette convention permettra de mieux détecter, écouter et accueillir les victimes. Il faut que la parole se libère ».