Orientations de la Région pour 2008

Les compétences nouvelles vont peser sur le budget

2 novembre 2007, par Edith Poulbassia

Les Réunionnais devront mettre la main à la poche. C’est ce qu’a annoncé le Président de la Région lors de l’examen des orientations budgétaires pour 2008. La conséquence du désengagement de l’Etat en grande partie liée à ces transferts de compétences aux collectivités territoriales. Face aux défis que la Région doit relever, elle n’a pas d’autres choix que de recourir à la fiscalité. Ce qu’elle n’a pas eu à faire depuis 13 ans.

Le contexte est ce qu’il est. Difficile. Tant pour la Région que pour le Département, on l’a constaté il y a quelques semaines. A la différence près que la Région n’a jamais soutenu la politique de rigueur budgétaire que le gouvernement impose aux collectivités territoriales avec la décentralisation, et qu’elle a su anticiper et négocier avec l’Etat pour le financement des grands chantiers à venir, tram-train et route du Littoral. De même que pour le Programme Opérationnel Européen 2007-2013.
Avant le vote du budget 2008 dans 1 mois, les conseillers ont donc procédé à l’examen des orientations budgétaires, actions à poursuivre ou à réaliser pour chaque domaine de compétence du Conseil régional. Le Président Paul Vergès a ainsi rappelé que la collectivité devrait faire face à « une aggravation objective de la situation ». (Cf. encadré) Alors que les conditions budgétaires n’augmentent pas en proportion.
Conséquence de la décentralisation, le Conseil régional doit se préparer dès l’année prochaine au triplement de son personnel. Ses compétences sont en effet élargies, mais les moyens financiers ne suivent pas. La collectivité aura à supporter le transfert des routes nationales, et les 263 agents de la DDE qui s’en suivent, ainsi que les TOS des lycées. Pour qui, ajoute Paul Vergès, se posera « le problème de la normalisation des statuts du personnel à terme ».
Ces charges vont se greffer sur les efforts déjà en cours : la route des Tamarins à livrer fin 2009, la construction de lycées aux normes HQE (Haute Qualité Environnementale), la réhabilitation des centres de formation, l’application du PRERURE (Plan régional des énergies renouvelables et d’utilisation rationnelle de l’énergie), le tram-train et les études en cours afin de déterminer la solution la plus adaptée pour la partie de la future route du Littoral débouchant sur Saint-Denis, sans oublier la MCUR (Maison des civilisations et de l’unité réunionnaise).

La faiblesse des marges de manœuvre

Dans un tel contexte, les marges de manoeuvres sont faibles. Paul Vergès en a annoncé deux. D’abord, « il faut faire un effort pour stabiliser les dépenses de fonctionnement malgré le transfert des compétences ». Ensuite, « nous ne pouvons que tenir compte de la situation sociale et économique de La Réunion », et donc il n’y a pas d’autre choix que « le recours à la fiscalité. Pour le Président de la Région, c’est « une erreur » de ne pas avoir plus sollicité la fiscalité ces dernières années. Elle n’a pas augmenté depuis 13 ans, faisait-il remarquer.
C’est donc un appel à un effort collectif de tous les Réunionnais pour relever les défis de développement qui attendent l’île. Certes, il s’agit bien d’une contrainte de plus dans un département dont on connaît les handicaps (chômage, minima sociaux, cherté de la vie, etc...). Mais l’Etat en laisse-t-il le choix ? « J’ai le sentiment que des euros manqueront à l’appel », lançait alors Thierry Sam-Chit-Chong, conseiller régional de l’opposition. C’est oublier qu’il s’agit là d’une conséquence directe de la politique du gouvernement, et que la Région n’est pas la seule collectivité à s’en plaindre.
D’autres élus UMP, dont Roland Hoarau et Margie Sudre, n’ont cessé de critiquer les grands projets comme le tram-train et la route du Littoral. C’est avec une « sérénité bouddhique » que Paul Vergès les a écoutés. Ces projets ont en effet été approuvés par le gouvernement. « Est-ce qu’on peut commencer à être responsable, sérieux ? », leur a demandé en retour Paul Vergès. Car c’est bien de responsabilité et de sérieux dont il faut faire preuve dès à présent.
Faut-il renoncer aux actions qui engagent l’avenir de La Réunion ? Laisser pourrir la situation, alors que les perspectives seront catastrophiques si rien n’est fait, sous prétexte que les fonds viennent à manquer ? Qui peut dire aujourd’hui que les grandes infrastructures régionales ne répondent pas à une nécessité, de même que toutes les actions engagées pour la formation, l’éducation, la mobilité, l’environnement, la culture, etc...? Le Conseil régional a donc fixé son projet orientations budgétaires pour 2008, elles ne sont pas revues à la baisse, ses ambitions pour La Réunion restent les mêmes dans le cadre de ses compétences.

Edith Poulbassia


Le sauvetage en bonne voie de l’Octroi de mer

L’Octroi de mer ne fera pas naufrage. En tout cas, pas en 2008. Paul Vergès l’a affirmé lors de la séance plénière. La veille, le Président de la Région a assisté à une réunion sur les APE (Accords de partenariat économique) avec les 4 pays ACP de la zone (Madagascar, Seychelles, Comores, Maurice). Bref rappel de la situation : 79 pays, regroupés en 6 groupements régionaux, sont liés à l’Accord de Cotonou qui prend fin au 31 décembre. Cet Accord fixe des règles de coopération avec les 27 pays européens dont la France. Les APE devraient permettre à ces pays ACP (Afrique, Pacifique, Caraïbes) de faire entrer les produits sur le marché européen sans limitation grâce à des quotas, et sans droits de douanes. A La Réunion où l’Octroi de mer protège la fragile production locale, et assure des recettes aux communes, ces APE représentent un danger.
« L’initiative est inédite, affirme Paul Vergès. Les Seychelles, Maurice se sont adressé aux Comores, à Madagascar (les deux PMA, c’est-à-dire Pays les moins avancés) et à La Réunion. Nous allons peut-être vers un accord régional avant le 31 décembre. Les Seychelles et Maurice veulent protéger leurs activités comme la pêche, etc... ». Au cours de cette rencontre, La Réunion est donc parvenue à faire oublier la revendication de suppression de l’Otroi de mer, afin de s’engager vers « une ouverture réciproque de nos marchés ». Dans quelques jours, La Réunion, en représentante de la France, va se joindre aux 4 pays ACP à Bruxelles pour une rencontre avec le Commissaire chargé du Développement. « Si tout se passe bien, l’accord sera signé en novembre. Sur le plan de La Réunion, la menace concernant l’Octroi de mer est écartée... Au moins jusqu’en 2014 », précise Paul Vergès.

L’utilisation qu’en font les communes

Car l’Octroi de mer n’est pas un acquis. La négociation devra reprendre avant 2014 avec l’Etat et l’Europe. C’est pourquoi, dans un souci d’anticipation, le président du Conseil régional a alerté dès maintenant les communes qui sont en partie les bénéficiaires de cette taxe. L’Octroi de mer alimente le FRDE (Fonds régional pour le développement et l’emploi) depuis 1992. 80% de ce fonds sont redistribués à chaque commune, en fonction du nombre d’habitants, plus une majoration pour les communes qui accueillent une préfecture ou sous-préfecture. Les 20% restants sont attribués par la Région aux syndicats mixtes ou aux intercommunalités pour des projets d’aménagements du territoire, de désenclavement, de développement économique.
La Région a demandé aux communes d’établir la liste des projets financés par le FRDE, même si « rien ne les oblige juridiquement » à la faire, pour établir un bilan. Au total, ce sont plus de 47 millions 400.000 euros de dotation alloués aux 24 communes en 2006. Seules 10 communes ont accepté de transmettre l’information concernant l’utilisation du FDRE : Saint-Paul, Saint-Louis, la Plaine-des-Palmistes, l’Entre-Deux, La Possession, Le Port, Cilaos, Trois-Bassins, Etang-Salé et Sainte-Rose. Les 15 millions d’euros dépensés ont été affectés à la réalisation d’infrastructures et équipements publics, dont les voiries (60%), à des opérations d’équipement (école, salle polyvalente, équipement sportif, etc...) pour plus de 38%, et enfin seulement à des projets d’installation d’entreprises et création d’emplois (1%).
Raymond Lauret, le président de la Commission de Développement économique de Région, a regretté que l’utilisation du FRDE par les communes « s’éloigne de sa vocation initiale » : le développement économique local. Il a proposé que le Conseil régional prenne l’initiative de proposer la modification de la loi. Pour que les fonds alloués aux communes soient attribués aux intercommunalités qui « représentent l’échelon territorial le plus pertinent pour agir efficacement en faveur du développement micro-régional ». Cette proposition n’a pas manqué de faire débat, même si ce rapport d’information sur les dépenses des communes n’était pas soumis au vote.


La Région aux côtés des TOS

Une motion d’urgence, présentée par l’Alliance, a été votée à l’unanimité en séance plénière. La Région confirme sa solidarité avec les TOS dont les contrats relèvent de la responsabilité de l’Etat. La collectivité demande l’organisation en urgence d’une table-ronde par le Préfet avec tous les acteurs concernés (Etat, collectivités, responsables d’établissement, syndicats, parents d’élèves, etc...). La Région demande à l’Etat de ne procéder à aucun licenciement des personnels TOS précaires. Pour les lycées, la Région demande des mesures urgentes pour assurer la continuité du service public dans les lycées : dotation de rattrapage en postes de TOS et plan de résorption de la précarité.


Amplifier la politique en faveur de la maîtrise de l’énergie

L’Alliance a proposé deux motions pour la maîtrise de l’énergie et les énergies renouvelables. Les motions demandent de faire de La Réunion un laboratoire expérimental en matière d’énergie propre et d’amplifier les efforts et investissements pour la recherche et développement. La Région sollicite ainsi l’accompagnement de l’Etat en matière juridique, financière et humaine pour réussir le projet Réunion 2030 en matière de maîtrise de l’énergie et de production d’énergies renouvelables en complément de la biomasse et de l’hydraulique.


Le Comité Régional du Tourisme est né

Le Comité de Tourisme de La Réunion (CTR) n’existe plus depuis fin juillet. A la place, le Comité régional, l’association “Ile de la Réunion tourisme” fera plus que de la promotion. Le secteur touristique a besoin de bien plus aujourd’hui. L’association aura pour mission : la mise en œuvre d’actions notamment dans les domaines des études, de la planification, de l’aménagement et de l’équipement, des assistances techniques à la commercialisation, de la structuration des filières, de la structuration de l’offre, de la formation professionnelle, et le suivi des actions engagées, la coordination et la gestion des actions de promotion touristique de la destination Réunion sur les marchés locaux, nationaux et internationaux, à la demande de la Région Réunion, le suivi de l’observation touristique et, à ce titre, le portage de l’Observatoire Régional du Tourisme, et l’association peut se voir confier d’autres missions, par exemple la gestion de la future plate-forme “e-tourisme”. Cette transformation permet d’associer le Département, les Etablissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI), les Chambres consulaires, les Conseils consultatifs et les organisations professionnelles. Au total, le Conseil d’administration est composé de 35 membres de droit, dont 10 professionnels du secteur touristique.
34 conseillers régionaux ont désigné leurs 8 représentants en séance plénière : Marie-Pierre Hoarau (24), Emmanuel Lemagnen (22), Marie-Paule Abriska (22), Wilfrid Bertile (21), Jocelyne Lauret (20), Yvon Virapin Kichenin (20), Catherine Gaud (18), Pierre Vergès (17).


Le nouveau SAR voté en décembre

Lors de la délibération du 5 novembre 2004, la Région a décidé la mise en révision du SAR (Schéma d’Aménagement Régional) de 1995. Le Tribunal administratif de Saint-Denis a demandé à la Région d’abroger cette décision. La commune de Saint-André et un conseiller régional ont sollicité l’abrogation de la révision du SAR l’année dernière, soit 2 ans après la délibération de la Région. Toutefois, a précisé Philippe Berne, ce jugement, s’il retarde l’approbation du nouveau SAR, ne remet pas en cause les travaux déjà engagés dans le cadre de la révision du SAR. Le nouveau SAR devrait être voté en décembre.

EP


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