Des bénéfices de plusieurs dizaines de milliards pour les grandes entreprises françaises

Les profits s’accroissent,
... les inégalités aussi

6 août 2005

Les profits impressionnants annoncés par les grandes entreprises françaises au moment où les droits des travailleurs sont attaqués de toutes parts amènent à se poser la question : où va donc tout cet argent avec lequel de nombreux emplois pourraient être créés ?

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L’annonce des profits des grandes entreprises françaises cotées en Bourse fait état de bénéfices en forte croissance : +240% pour France Télécom, +122% pour Arcelor, entreprise de l’industrie sidérurgique et métallurgique, +52% pour Renault, constructeur automobile bien connu. Et les dirigeants patronaux de se féliciter de ces résultats, quant aux libéraux, ils affirment que ces bénéfices vont permettre de créer des emplois, si bien-sûr les acquis sociaux qui constituent autant d’obstacles à l’embauche sont vidés de leur substance.
Force est de constater qu’ils sont écoutés : c’est la voie tracée par le Contrat “nouvelles embauches”, mis en application par ce gouvernement à peine deux mois après l’échec retentissant de la “Constitution Giscard”.
Mais de là à dire que les chiffres de la Bourse signifient un partage de la croissance via une relance de l’activité créatrice d’emplois, c’est quelque chose d’illusoire.

Quels investissements ?

C’est ce qu’écrit “Le Monde” dans son éditorial d’hier, en revenant sur ce que l’on appelle le “théorème de Schmidt”. Du temps où l’inspirateur du Traité constitutionnel européen mis en échec le 29 mai dernier était président de la République, il reprenait volontiers une expression de son contemporain, le chancelier socialiste allemand Helmut Schmidt : "Les profits d’aujourd’hui font les investissements de demain et les emplois d’après-demain".
"Si le constat est exact, il faut alors se réjouir des performances engrangées ces derniers mois par tous les grands groupes français", écrit “Le Monde”, "car (...) du secteur pétrolier jusqu’au secteur bancaire, en passant par l’industrie de la pharmacie ou la publicité, la plupart des champions français affichent des chiffres d’affaires et surtout des gains plus élevés que prévu". Et de nuancer les affirmations de l’ancien chef de l’État.
"Ce "théorème de Schmidt", aucun économiste n’a jamais vraiment pu apporter la démonstration qu’il fonctionnait réellement", insiste “Le Monde”. Notre confrère explique que "la montée en puissance, aux États-Unis d’abord, puis en Europe, au cours des deux dernières décennies, d’un nouveau type de capitalisme, faisant la part belle aux logiques patrimoniales, est venue renforcer ce scepticisme".
Ce qui lui fait écrire que les profits finissent avant tout dans les poches des actionnaires, et quand ils sont investis, c’est à l’étranger, là où un marché est à “conquérir” ou là où les salaires sont beaucoup moins élevés.

Qui sont les assistés ?

Cela signifie que ces bénéfices ne sont pas utilisés à préparer des créations d’emploi, mais à d’abord enrichir ceux qui ont déjà les moyens de pouvoir se permettre de miser une partie de leurs revenus en Bourse. Cela a pour résultat de creuser encore les inégalités entre ceux qui ont des revenus suffisants pour jouer et gagner en Bourse et les autres. C’est donc une frange très minoritaire qui bénéficie de hauts revenus grâce au travail des autres. Ces privilégiés encaissent les bénéfices, des assistés de luxe en quelque sorte.
Cette croissance fait des victimes : "Alcatel réussit à faire grimper de 104% son bénéfice sur les six premiers mois de 2005 après avoir fait disparaître plusieurs de ses sous-traitants", écrit “l’Humanité” de mercredi.
Cette hausse des profits n’est pas étonnante au fond. C’est le résultat d’une politique, notamment fiscale, qui favorise ce type de placement au détriment de l’investissement, et donc de l’emploi. Comment dans ces conditions peut-on faire croire que la priorité est la lutte contre le chômage ?

Manuel Marchal


Favoriser le chômage pour augmenter les bénéfices

Mercredi dernier, “l’Humanité” expliquait pourquoi en France il est illusoire de croire que les grandes entreprises vont créer des emplois, bien au contraire. Le mandat de leurs dirigeants est avant tout de gonfler les bénéfices des actionnaires, à n’importe quel prix, et ils sont encouragés en cela par la politique fiscale du gouvernement.
"Les mesures du gouvernement amplifient et pérennisent une situation paradoxale où, d’un côté, les groupes et leurs actionnaires accroissent leurs capitaux de façon très rapide et, de l’autre, l’économie tout entière est à l’arrêt, amorphe", précise notre confrère en citant l’“indicateur avancé de l’activité économique en France d’Ixis CIB”. "La banque prévoit en effet un taux de croissance du PIB de 1,3% en 2005", poursuit notre confrère pour qui "l’atonie de l’économie française est saisissante et pèse sur l’emploi".
"Pour freiner la hausse du chômage en France, une croissance du PIB de 3% au minimum serait nécessaire", écrit “l’Humanité” qui affirme que "la politique du gouvernement et la gestion des groupes empêchent un tel résultat". Et de constater que "tout est mis en œuvre pour gonfler le profit et le bénéfice au service du dividende de l’actionnaire, comme le montre le cas Alcatel où le résultat net par action est prévu en hausse de 40% cette année".
Les actionnaires les plus nantis gagnent sur tous les tableaux, explique “l’Humanité” : "D’une part, en poussant les Directions d’entreprise à pressurer comme jamais les dépenses sociales (salaires, formation, retraites, etc.) et l’emploi, ils font croître mécaniquement les bénéfices disponibles pour augmenter les dividendes. D’autre part, les actionnaires bénéficient d’exonérations d’impôts de plus en plus importantes sur les plus-values réalisées à la revente de leurs actions".


Les capitaux s’accumulent

Dans son édition de mercredi, “l’Humanité” revenait sur les raisons de la spectaculaire remontée des entreprises françaises au sommet de la Bourse. Extraits.

"La rémission boursière des groupes français intervient seulement trois ans après que le CAC 40 ait dévissé sévèrement. Au printemps 2002, l’indice avait dégringolé jusqu’à 2.600 points, un niveau qu’il n’avait pas atteint depuis le 28 octobre 1997.
Enfoncées par une secousse tellurique de très grande ampleur, les 40 plus grandes sociétés françaises avaient vu leur valeur dégradée de plus de 40% par les marchés financiers en à peine 6 mois. Par exemple, le cours de l’action France Télécom, qui culminait à plus de 250 euros en 2000, s’est vu alors “douché” à moins de 10 euros. La cause : les grands groupes français s’étaient lourdement endettés pour multiplier les opérations de fusions-acquisitions.
Aujourd’hui, après avoir réduit fortement leurs dettes et licencié à tour de bras, les groupes s’apprêtent à se relancer dans de vastes opérations transfrontières. Il y a fort à parier qu’un tel mouvement sera lourd de conséquences."


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