Les vœux du Président de la Région Réunion

7 janvier 2006

Chers Compatriotes,

En ce début d’année 2006, comme le veut la tradition, je vous présente mes vœux. Que cette nouvelle année vous apporte la réalisation de vos espoirs, à vous et à vos proches.

2006, c’est le soixantième anniversaire de la loi du 19 mars 1946 classant La Réunion, la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane, en département. Cette date, au même titre que le 20 décembre 1848, est une étape décisive dans l’histoire de La Réunion. Nous ne rendrons jamais assez hommage à l’oeuvre accomplie par Léon de Lépervanche, Raymond Vergès, Aimé Césaire, Léopold Bissol qui a permis aux habitants des “quatre vieilles colonies" de prétendre aux mêmes droits que les citoyens des autres départements. Ses conséquences ont été multiples et ont provoqué, au fil des décennies et grâce aux luttes menées, des bouleversements dans tous les secteurs de la vie économique, sociale et culturelle de ces départements d’outre-mer.

Il faut que chacun se rappelle que ces deux Réunionnais ont ouvert à leurs compatriotes et aux générations suivantes la voie pour réclamer constamment le respect de leurs droits à l’Égalité. Et ce combat est inséparable de celui essentiel, à ce moment de notre évolution sociale, de la structuration de notre identité, de la consolidation de notre communauté de destin.

En affirmant le principe de l’Égalité entre les êtres humains, égalité des citoyens sur le plan individuel, égalité entre ta métropole et t’outre-mer sur le plan collectif, la toi du 19 mars 1946 a été en définitive une forme moderne et inédite de décolonisation. Soixante ans après, ce principe d’égalité garde toute sa force créatrice et émancipatrice et demeure un combat d’actualité tant à l’échelle du monde qu’à l’intérieur même de nos sociétés. La bataille de l’Égalité à La Réunion continue dans des secteurs aussi divers que l’accès à L’emploi et au logement, la formation des prix ou encore le coût des communica-tions numériques ou téléphoniques...

Le 60ème anniversaire de la loi du 19mars 1946 devra être pour nous l’occasion de faire le bilan des changements profonds provoqués par le passage du statut de colonie à celui de département français et de nous interroger sur les nouveaux défis que nous avons à relever durant les prochaines décennies.

Rien n’est jamais définitivement acquis ainsi, dans un secteur, la santé, où les progrès les plus remarquables ont été enregistrés, La Réunion est aujourd’hui menacée par l’installation d’une pandémie, le chikungunya. 6.000 personnes officiel-lement déclarées, 30.000 selon d’autres estimations, ont dores et déjà contracté la maladie. Nous aurions tort de sous-estimer ce danger. S’il appartient à chaque Réunionnais et chaque Réunionnaise de se mobiliser, il est de la responsabilité de l’Etat de prendre les mesures nécessaires pour éradiquer cette épidémie. Les moyens doivent être à la mesure de cette pandémie qui, si elle s’installe durable-ment, pénalisera les Réunionnais et affectera l’économie.

Nous devons faire face à cette urgence à l’aube d’une année 2006 qui nous fixe des rendez-vous importants pour le développement de notre île.

2006, c’est l’année de la négociation du prochain contrat de plan État /Région et
du futur DOCUP
contractualisé avec l’Europe pour la programmation des crédits sur la période 2007/2013. Les aides européennes qui nous seront attribuées risquent de diminuer d’environ 15% et les concours de l’État subissent les contraintes des rigueurs budgétaires sur le plan national. C’est toute la dynamique de rattrapage de nos retards qui risque d’en être affectée.

Ce contexte d’inquiétudes sinon d’incertitudes est accentué par les transferts de charges découlant de la poursuite de la mise en œuvre de l’acte II de la décentralisation. Lune des illustrations est ta question du transfert des personnels non enseignant de l’Éducation Nationale (TOS). Les Collectivités concernées par ce transfert, la Région et le Département, ne peuvent accepter qu’on leur impose d’autorité des charges nouvelles (parfois même non prévues par la toi comme les personnels CES et CEC) sans que leur situation particu-lière, caractérisée par des retards et la progression démographique, ne soit prise en compte. Si le gouvernement n’entend pas la préoccupation légitime exprimée tant par les collectivités que les personnels concernés, de graves dysfonctionnements risquent d’affecter la rentrée scolaire du 30 janvier et toute La Réunion serait alors touchée.

Or, plus que jamais, La Réunion doit concentrer ses efforts sur les enjeux fonda-mentaux du développement. Comme toutes les petites économies insulaires et vul-nérables, elle est confrontée à l’impact de la mondialisation. La réforme du marché communautaire du sucre, imposée par les règles de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), ne lui laisse aucun sursis. C’est en 2006 que les professionnels du secteur sucrier devront négocier la nouvelle convention canne sucre avec comme point essentiel le prix de la tonne de canne. Elle couvrira les 7 prochaines années, avec un prix du sucre qui diminue de 36% et sans aucune perspective au-delà de 2013. Ce rendez-vous est décisif et pèsera lourdement sur l’avenir économique et social de notre île.

Dans ce contexte en évolution rapide où les contraintes extérieures sont de plus en plus fortes, la nécessité de doter La Réunion d’une véritable stratégie de développement économique à long terme est de plus en plus ressentie. C’est dans cette optique que la Région a pris l’initiative, en concertation avec les autres acteurs du développement, d’élaborer le Plan Réunionnais de Développement Durable (PR2D). Cannée 2006 sera marquée par la poursuite de la concertation et débouchera sur l’adoption de ce Plan de Développement qui devra être approprié par tous les Réunionnais.

Ce document de mise en cohérence et de perspective prendra en compte les différents documents de planification déjà élaborés, et en premier lieu le Plan Régional de Développement des Formations (PRDF) dont l’adoption est prévue pour le premier trimestre 2006. Mais il devra surtout fournir le cadre stratégi-que permettant à La Réunion d’appréhender toutes les potentialités de dévelop-pement offertes par son environnement géoéconomique. C’est ainsi que durant l’année 2006, la Région accentuera les efforts déployés dans le domaine de la coopération régionale et des initiatives seront prises pour le renforcement des échanges avec les deux grandes puissances émergentes du 21ème siècle que sont la Chine et l’Inde.

Cette année 2006 sera également remarquable pour l’aménagement du territoire. En effet, le Schéma d’Aménagement Régional entrera dans sa phase active de révision. D’ici la fin de l’année, les grands axes en seront définis. Il dessinera le visage de La Réunion des prochaines décennies. IL établira un équilibre entre les zones à protéger, celles à développer ou densifier pour organiser l’accueil des 250.000 habitants supplémentaires que La Réunion abritera dans les 20 prochaines années. L’anticipation des conséquences prévisibles des changements climatiques exige un renforcement des dispositifs de protection des zones exposées et de prévention des risques.

Ce sera aussi l’année de mise en place du Parc National des Hauts qui devra tenir compte des orientations du Schéma d’Aménagement Régional. Cannée 2006 devra également voir se confirmer l’essor des énergies renouvelables avec la mise en œuvre du plan régional de développement des énergies renouvela-bles (PRERURE). En effet, face aux conséquences de la raréfaction des ressour-ces et des augmentations durables du coût des carburants, l’objectif d’autono-mie énergétique en 2025 que nous nous sommes fixé est plus que jamais à l’ordre du jour.

Au delà de cette attention aux défis fondamentaux qui pèseront sur le développement de La Réunion, et sur la base de l’élaboration et de la mise en œuvre des documents stratégiques, la Région continuera en 2006, dans le cadre de ses compétences, à consacrer ses efforts pour rassembler les Réunionnais afin de bâtir le développement durable de notre île.

2006 sera l’année de la montée en puissance des grands travaux lancés par la Région La Route des Tamarins, la poursuite des autres travaux routiers (sécurisa-tion de la route du Littoral, déviations de Grand bois, Saint-Joseph Saint-Benoît, bou-levard Sud, aménagement de la Route des Plaines...), les études complémentaires pour le Tram Train régional, les premières réalisations de la piste cyclable totale-ment sécurisée tout autour de l’île, le centre de formation aux métiers de l’automo-bile et des transports, la construction de la Maison des Civilisations et de l’Unité Réunionnaise, la mise en service du réseau haut débit "Gazelle" pour développer les nouvelles technologies...

Jamais les défis qui se posent à nous n’auront été aussi nombreux jamais les projets ambitieux et la volonté d’entreprendre n’auront été aussi détermi-nés. Mais rien ne sera possible sans la participation active de tous les Réunionnais et sans la préoccupation permanente de créer dans tous les secteurs des emplois pour les femmes et les hommes au chômage, et d’abord pour les jeunes. Dans une société meurtrie par l’ampleur du chômage et de graves inégalités menaçant la cohésion sociale, aucun développement ne sera durable s’il n’est pas solidaire, s’il n’offre à chacun la possibilité d’inscrire sa réussite individuelle dans un projet collectif. 60 ans après la loi du 19 mars 1946, c’est cette ambition qui nous anime au moment où nous entamons cette année 2006.

Paul Vergès


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