Profits en hausse pour les actionnaires

Libéralisme : ceux qui en profitent

19 février 2005

La crise n’est pas pour tout le monde, comme le montre la publication de bénéfices records pour les actionnaires de grandes entreprises françaises. Une fois de plus, la question de la répartition des fruits du travail se pose, avec un constat : les inégalités de revenus ne font que s’accroître. Les profits pour les uns, la précarité pour les autres : la politique libérale soutenue par le gouvernement Raffarin est un dramatique retour en arrière, mettant en danger la cohésion sociale. Un article paru hier dans “l’Humanité” fait le point sur la situation.

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Le PDG de L’Oréal, Lindsay Owen-Jones, annonce un bénéfice net en augmentation de 143%, pour s’établir à 3,6 milliards d’euros. Le groupe pétrolier Total, premier groupe français pour sa capitalisation boursière (cours de l’action et nombre d’actions), annonce un bénéfice record de 9 milliards, en hausse de 23% par rapport à 2003, poussé par la flambée des prix du baril. Le 10 février dernier, France Télécom affichait une réduction de sa dette de 26 milliards d’euros (qui reste tout de même à 44 milliards), et distribue 1,2 milliard d’euros aux actionnaires. Une semaine auparavant, la BNP-Paribas ouvrait le bal, avec un bénéfice net record de 4,7 milliards d’euros, soit 24% d’augmentation par rapport à 2003, et faisait bondir le dividende de 38%. Renault lui emboîtait le pas en publiant un résultat net de 3,55 milliards d’euros, soit une progression historique de 43%. Son PDG, Louis Schweitzer, décide d’augmenter la rémunération des actionnaires de 29%. En opposition, la CGT Renault réclame d’"investir sans plus tarder en direction de ceux qui créent la valeur ajoutée, tout en menant une politique de formation qui assure le maintien et le développement des qualifications des femmes et des hommes du groupe".

Le gouvernement au service du cac 40

Au vu des premiers résultats, les groupes français sont en pleine rémission. Ils affichent des profits record et distribuent des dividendes pléthoriques, tout en continuant à détruire des emplois et à geler les salaires. Quelle crédibilité accorder à Jacques Chirac et Jean-Pierre Raffarin expliquant qu’il faut "travailler plus pour gagner plus", alors que les groupes recherchent une rentabilité toujours plus élevée ? En trois ans, le gouvernement aura mis tout son poids et engagé d’énormes ressources publiques (loi Larcher sur les licenciements, loi Borloo sur les 35 heures, réductions fiscales, etc.) pour soutenir les groupes et éviter au CAC 40 de sombrer.
Pendant ces trois années, des gains de productivité importants ont été obtenus par une pression accrue sur les rémunérations et les conditions de travail. Les Français ont “travaillé plus” et ont, proportionnellement, “gagné moins”. En effet, la France est l’une des grandes économies où les gains de productivité du travail et les salaires divergent fortement. Alors que productivité par tête et le salaire par tête sont au même niveau d’évolution au début du second semestre 2003, l’écart se creuse ensuite violemment. Aujourd’hui, la productivité évolue à un rythme annuel de plus de 3% tandis que la progression annuelle du salaire par tête est, elle, inférieure à 1% (sources : INSEE, Ixis CIB). Conséquence : dès le début de l’année 2004, les profits, en France, progressent beaucoup plus vite que la richesse produite elle-même.

La rentabilité a détruit 80.000 emplois industriels

L’impact sur l’emploi et la croissance réelle est lourd. Le taux de chômage reste vissé à 9,9%. L’évolution du PIB dépassera à peine 2,3% en 2004, et 1,9% cette année. Selon les chiffres publiés mercredi par le ministère de l’Emploi, l’économie française n’a créé que 39.000 emplois net en 2004. Le solde positif est dû au secteur tertiaire et à la construction alors que l’industrie détruisait près de 80.000 emplois.
Le cœur de la régulation capitaliste est donc bien protégé. La BNP-Paribas affiche une rentabilité financière de 16,8%, en augmentation de 2,5 points (il s’agit là du ROE - return on equity - qui mesure les nouveaux revenus générés par rapport aux fonds propres de l’entreprise). France Télécom met en exergue une hausse de 7,4% de son résultat d’exploitation, dévoilant les pressions répétées sur les charges de personnels (-2,5%) et les investissements. Le pilotage des gestions par la valeur actionnariale s’avère toxique. En 2003, les entreprises ont utilisé 40% de l’ensemble de leurs ressources pour faire des placements financiers, payer des intérêts aux créanciers ou verser des dividendes aux actionnaires (source : INSEE, Comptes de la nation 2003), le tout jouant contre le développement des ressources humaines. Nul doute que directions d’entreprises et gouvernement tenteront d’imprimer les mêmes politiques en 2005.
La relance actuelle de la Bourse tranche singulièrement avec les exigences sociales exprimées. La manifestation interprofessionnelle et unitaire du 5 février sur le temps et les conditions de travail, l’emploi et les salaires a été une manière pour les salariés du public et du privé de réclamer une réorientation complète des gestions, pour éviter que le boulet ne repasse.


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